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Aspects éthiques du dépistage de la trisomie 21: quelques points de vue

Par jauzein — Dernière modification 19/09/2017 09:54
Le dépistage et le diagnostic de la T21 font appel à des progrès techniques importants qui rendent le fœtus « accessible ». Depuis les années 70, ces progrès ont modifié le moment conceptuel du « début de la vie », qui n’est plus celui de la naissance mais celui de la fécondation.

 

 

La législation française permet l’interruption de grossesse pour raison médicale à tout moment de la grossesse (situé au delà du délai de 14 SA accessible pour les IVG). Le diagnostic de trisomie 21 peut donc conduire à une interruption médicale de grossesse chez un grand nombre des couples concernés. Le nombre d'interruptions médicales de grossesse s'élève en moyenne à 7000 chaque année en France.

 

Les quelques points de vue suivant s’inscrivent dans ces perspectives.

 
  • La position de la société
 

Cette position est éclairée par un rapport du 26 juin 2003 de la Cour des comptes intitulé «  la vie avec un handicap ».

Ce rapport rappelle le coût du diagnostic de la T21 : en 1999 il a coûté 100 millions d’euros. 85 434 caryotypes avaient été alors réalisés. C’est une grosse dépense mais la Cour estime que cela coûte infiniment moins cher que la prise en charge des trisomiques.

 

La Cour des Comptes relève les déficiences de la Société en terme de prise en charge des personnes handicapées mentales : les listes d’attente pour les établissements spécialisés accueillant ces personnes sont exagérément longues, leur intégration scolaire est insuffisante, il n’y a pas de cadre législatif relatif au vieillissement des personnes handicapées mentales, enfin il n’y a pas de démarche thérapeutique pour la T21.

 

C’est peut être sur ce dernier point que la Cour des Comptes insiste. Renseignement pris auprès de la Direction Générale de la Santé, aucune équipe ne travaille à étudier la relation qui existe entre T21 et retard mental. La recherche clinique est menée par une fondation privée et trois équipes hospitalières. Seul le dépistage bénéficie d’un financement.

 

La société est donc entièrement tournée vers le dépistage. Si l’avortement n’est pas systématique, on peut se demander de quel poids une telle politique pèse sur la décision des parents ? Que penser d’une prévention qui ne passe que par la suppression des handicapés ?

 
  • Le point de vue des parents
 

Les parents ont désiré un enfant et ils savent qu’ils auront à l’assumer moralement économiquement et socialement. La société ne peut donc en aucun cas nier leur autorité ni leur liberté. Aussi la loi les place comme seuls responsables de la décision d’avortement.

 

 Pourquoi prennent –ils la décision d’un avortement ?

 

L’enfant attendu suscite, le plus souvent, un désir de reconnaissance sociale du couple qui devient parents. Une déficience de l’enfant, quelle qu’elle soit, pourra être ressentie comme une entrave à cette reconnaissance.

Un handicap comme la T21 est donc une atteinte narcissique pour les parents. Cette atteinte est à l’origine des sentiments d’angoisse, de culpabilité ou d’échec propices à la décision de mort.

Depuis 1999, 75% des femmes demandent le dépistage, ce qui conduit à la mort de 95% des fœtus trisomiques diagnostiqués. De plus, un enfant trisomique sur cinq est abandonné.

 

Ces chiffres illustrent la puissance de ce sentiment. Certains parents surmonteront ses sentiments et feront le deuil de l’image d’un enfant « normal ». Alors ils s’adapteront à cet enfant qu’ils cesseront de considérer comme malade. Il ne sera pour eux qu’un enfant particulier.

 
  • Les points de vue des médecins
 

Les médecins classent les dépistages prénataux en deux catégories :

-      les dépistages médicaux ou thérapeutiques quand ils conduisent à prévoir un traitement, un meilleur accueil pour un nouveau-né en difficulté ou encore un traitement in utero ;

-      les dépistages eugéniques qui conduisent à un avortement.

 

Le dépistage comme celui de la T21, dépistage à l’issue duquel aucune thérapie ne peut être proposée et qui peut conduire à un avortement, est donc considéré comme eugénique.

Certains professeurs de médecine, comme le professeur Milliez se réclament d’un « bon eugénisme, un eugénisme médical» puisqu’il répond à la liberté des parents.

 

Le professeur Le Méné, président de la fondation Jérôme Lejeune refuse l’idée d’un « bon eugénisme, décidé par les parents et d’un mauvais eugénisme de masse et systématique » Il s’en tient au caractère eugénique d’un tel dépistage. Il discute d’ailleurs cette classification en notant la généralisation du dépistage et la totale prise en charge (médicale, financière et même psychologique) de l’avortement. Le choix de l'avortement propose une issue rapide et simplifiée à la T21 d’un enfant. Le choix de garder un enfant trisomique est un choix qui sera confronté à la difficulté voire à l’impossibilité d’une prise en charge de qualité par les parents.

 
  • Un point de vue théologique : la position du catholicisme
 

Le Vatican n’est pas opposé aux diagnostics prénataux en général : ces diagnostics ne posent pas de difficulté morale s’ils permettent de déterminer les soins ou la thérapie à mettre en œuvre à la naissance. Le diagnostic du retard de croissance fœtal à l’origine de la mort de 10 % des naissances, rentre tout à fait dans ce cadre.

 

Dans le cas de la T21, ils sont aussi jugés utiles puisqu’ils permettent de préparer des parents à la venue d’un enfant handicapé. Mais en aucun cas il n’est acceptable pour les théologiens catholiques comme Fabienne Daull, que ce dépistage soit l’occasion de proposer un avortement.

 

De son point de vue, la vie et l’être humain tout entier doivent être respectés. Et ceci dès la conception. Tout être humain est aimé de Dieu et promis au bonheur car il est aimé de Dieu et des autres humains, même si cet amour n’est pas toujours spontané et relève parfois seulement du commandement divin. Fabienne Daull ne nie pas la responsabilité ni l’autorité des parents mais elle rappelle que si cet enfant résulte du désir parental il n’est pas leur « objet ».

 

Le catholicisme condamne donc le dépistage et le diagnostic de la T21 s’ils conduisent à un avortement et à la négation de la dignité humaine du fœtus.

 
 
  • Un point de vue philosophique
 

Aujourd'hui, il est irresponsable pour un couple, quel que soit l'âge de la mère, de ne pas demander une amniocentèse ou prélèvement des villosités choriales ou cordocentèse, et de ne pas éliminer un foetus anormal pour le nombre de chromosomes, sauf si ce couple a une foi religieuse.

Une personne trisomique est une personne non autonome au sens de la loi (elle n’obtient pas le droit de vote dans la majorité des cas) et au sens philosophique par voie de conséquence. Dans ce sens on ne peut donner la vie à une personne non autonome, sauf si l’on adhère à l’idée que cette personne est un don de Dieu.

Le dépistage par les marqueurs sériques maternels ne donnant lieu qu’à un dépistage et non pas à un diagnostic, est une technique coûteuse et dépourvue d’intérêt quand on aborde la réflexion sous cet angle.

Notre société judéo-chrétienne ne peut pas encore aborder ce sujet avec suffisamment de recul car le lien avec les religions est encore très puissant.

 
  • Un point de vue de personne trisomique
 
 




    
« Je suis née trisomique 21. Moi, je dis que c'est une étiquette que les non-handicapés m'ont donnée.
 Et puis d'abord qu'est-ce que ça peut leur faire à eux si je le suis ? Ils nous ont attribué des noms : handicapés légers, profonds, débiles, arriérés et des tas d'autres préjugés. Moi, je me suis battue de toutes mes forces pour essayer de leur prouver qu'ils peuvent se tromper. Je n'ai jamais eu envie d'être un échec pour la société. J'ai envie de vivre comme tous les autres. Parfois, je trouve les soi-disant normaux biens plus handicapés que moi... » . http://maxime.nec.free.fr/index.html

 

Voir les sites internet relatifs à l’éthique de ce dépistage et des IMG qu’il entraîne.