Plasticité cérébrale
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Mise à jour : 14/08/2001

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Les mécanismes de la plasticité cérébrale
dans le cas de lésions périphériques

Rédigé par M-C. Garnier et M. Ternaux, Lycée Joliot Curie, Aubagne

A partir d'un article de Xerri C. "Plasticité post-lésionnelle des cartes corticales somatosensorielles : une revue". Compte rendu de l'Académie des Sciences, Paris 1998, 321, 135-151.
 
Les aires corticales primaires sensorielles et motrices constituent des représentations des organes sensoriels périphériques organisées selon un principe de correspondance topologique. 

L'expérimentation les révèle sous forme de mosaïques fonctionnelles, véritables cartes qui permettent un décodage des propriétés spécifiques des stimuli transcodés par des capteurs périphériques, pour les cartes sensorielles, ou un adressage précis des commandes envoyées vers les effecteurs musculaires, pour les cartes motrices.

Traditionnellement conçues comme des structures statiques, rigidifiées une fois achevées les périodes critiques de la maturation des fonctions nerveuses, les cartes corticales sont actuellement envisagées comme des entités dynamiques dont l'état d'équilibre est susceptible de changements permanents induits par l'expérience. 

Les détails de l'organisation de ces cartes en font de véritables empreintes individuelles, témoins d'une certaine engrammation neurobiologique de l'expérience sensorielle et des habilités sensorimotrices qui se manifestent tout au long de la vie de l'individu. 
Ces aires se reconfigurent donc en fonction de l'expérience et à la suite de lésions périphériques ou centrales. Ces changements sont principalement imputés à des modifications de l'excitabilité des neurones corticaux. C'est du changement des poids synaptiques et de modifications morphologiques que dépend le remodelage des aires corticales.
 

Figure : diagramme schématique illustrant les mécanismes de remodelage des cartes du cortex somesthésique primaire (S1) après désafférentation induite par lésion périphérique
Schéma modifié d'après Snow et Wilson

Cas n°1 : le fonctionnement normal des neurones au niveau du cortex

(explication de la figure )


Partie A de la figure : La stimulation des neurones des champs récepteurs cutanés (CRC) active les neurones corticaux après un relais synaptique dans le thalamus.
Les neurones corticaux de l'aire rouge sur la figure sont en connexion synaptique : 

* forte et excitatrice avec les afférences issues du CRC rouge. (des PPSE sont générés au niveau des corps cellulaires des neurones corticaux de l'aire rouge)

* faible et excitatrice avec les afférences des champs récepteurs voisins comme par exemple , ici le CRC vert. Cette connexion se fait par l'intermédiaire des interneurones connectés avec les afférences issues du CRC vert.

Suite à leur stimulation des PPSE sont donc générés au niveau du corps cellulaire des neurones corticaux de l'aire rouge mais ils seront décalés dans le temps du fait du délai synaptique (1 synapse supplémentaire). 

* inhibitrice avec les interneurones noirs (interneurones à GABA) qui génèrent des PPSI au niveau du corps cellulaire des neurones corticaux de l'aire rouge. Ces PPSI ont eux aussi un temps de retard. Ces neurones sont excités de façon tonique par l'activité afférente spontanée. 
 

Bilan : les afférences issues du CRC rouge provoquent une excitation efficace des neurones cibles de l'aire corticale rouge.
L'excitation est dite supraliminaire. Les afférences sont dominantes, mais elles provoquent également une excitation (PPSE) des neurones corticaux de l'aire verte avec un temps de retard. Ces PPSE sont sommés (sommation spatiale) avec les PPSI générés par l'interneurone inhibiteur. L'excitation est ainsi infraliminaire.
 
Ainsi les entrées issues du CRC rouge sont efficaces uniquement au niveau de l'aire corticale rouge.


Cas n°2 : remodelage fonctionnelle des aires corticales après une lésion périphérique

Envisageons le cas d'une lésion localisée au niveau de la peau : les champs récepteurs vert et rouge.

Partie B de la figure : la réorganisation immédiate 

La désafférentation par anesthésie locale, section ou ligature de nerfs cutanés, ligature d'un doigt ou amputation digitale induit une réorganisation immédiate des zones corticale primaires de projection des afférences cutanées.

On enregistre un remodelage rapide des cartes de représentation cutanées qui est lié à l'expression de nouvelles entrées sensorielles dans le cortex désafférenté.

L'aire corticale rouge et une partie de l'aire verte restent silencieuses puisqu'elles ne reçoivent plus d'informations afférentes (synapses inactives).Elles sont massivement désafférentées.

Au niveau des afférences issues du CRC vert et rouge il y a disparition de l'activité spontanée ou provoquée par des stimuli.
Les neurones inhibiteurs toniques à GABA ne sont plus activés au niveau des afférences rouges et vertes; Mais les neurones afférents issus du CRC bleu, connectée indirectement aux neurones corticaux de l'aire verte activent ces neurones (liaison faibles). Ces PPSE ne sont plus contrebalancés par les PPSI. Ainsi, certains neurones de l'aire verte répondent alors aux entrées du CRC bleu.

Il y a "démasquage" de certaines connexions préexistantes. L'excitation est devenue, au niveau de ces neurones, supraliminaire.

Par la levée d'inhibition, les zones de représentations corticales évacuées constituent un territoire potentiel d'expansion immédiate de la représentation ses surfaces cutanées voisines.

Ce phénomène de réoccupation immédiate des zones corticales évacuées révèle l'existence d'une superposition spatiale des entrées originaires de zones cutanées adjacentes sur les neurones corticaux.
Ce démasquage suggère qu'en condition normale, l'état des cartes dépend d'un processus de "compétition pour l'espace cortical" antre afférences partiellement superposées sur leurs cibles neuronales.



Partie C de la figure : réorganisation à long terme 

L'expansion de l'aire bleue s'accentue au cours des semaines probablement en raison de 2 mécanismes :

* Renforcement de connexions synaptiques faibles préexistantes (connections fortes : triangles pleins)

* bourgeonnement de terminales d'axones suivi d'une synaptogenèse.

Parallèlement, il y a diminution de la taille des champs récepteurs proches de la région cutanée dénervée (division du CRC bleu initial en 2 CRC plus petits).

La réorganisation corticale se limite à une distance de 1 à quelques mm.

les zones corticales en expansion sont donc dotées d'une organisation somatotopique plus fine et d'une meilleure résolution spatiale qu'avant la lésion, de sorte que les carte remodelées font apparaitre comme distinctes des zones de représentation cutanées antérieurement confondue en un secteur de représentation unique.
 


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