Déterminismes |
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Mise
à jour : 14/08/2001
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Rédigé par Françoise Jauzein,
Différentes modalités de détermination du sexe chez les reptiles Comme les poissons et les amphibiens, les reptiles présentent
différents types de déterminisme du sexe.
Chez ces espèces il existe des températures masculinisantes (TM) donnant 100% ou une majorité de mâles, des températures féminisantes (TF) donnant 100% ou une majorité de femelles et une gamme de températures de transition (TRT pour "transition range of température") qui fournit des mâles, des femelles et quelquefois des intersexués.Trois mécanismes de détermination thermique du sexe sont connus. Chez de nombreuses tortues, les températures d'incubation inférieures à la TRT fournissent des mâles et celles qui sont supérieures à cette TRT donnent des femelles. Chez quelques lézards et les Sphenodon, c'est l'inverse. Cependant, chez d'autres espèces de tortues, de lézard et chez les crocodiles, il existe deux TRT. Les températures situées entre ces deux TRT fournissent des mâles, alors que les températures situées en dehors de cette gamme intermédiaire, plus basses ou plus hautes, donnent des femelles. Au sein d'une TRT, la température "pivot" est celle qui détermine un sex-ratio de 1 (50% de mâles et 50% de femelles). Les deux types de détermination du sexe présentant une seule gamme de températures de transition pourraient correspondre à une évolution à partir d'un modèle ancestral comportant deux gammes transitionnelles (modèle qui se retrouve dans les trois groupes de reptiles présentant un déterminisme du sexe par la température), le modèle que l'on rencontre chez la plupart des tortues correspondant à une conservation de la gamme TRT2 seulement et celui, inverse, que l'on rencontre chez les lézards et les Sphenodon, correspondant à la conservation de la gamme TRT1. Période de sensibilité à
la température
La période thermosensible du développement embryonnaire
est connue pour quelques espèces de crocodile, de tortue et un lézard.
Elle représente 18 à 30% de la durée du développement
embryonnaire et correspond aux premiers stades de la différenciation
des gonades.
Les pourcentages de mâles et de femelles observés au moment de l'éclosion dépendent, au cours de la période de thermosensibilité, des fractions du développement passées en dessous ou au dessus de la TRT. La différenciation et la croissance des gonades dépend de la température Les modifications morphologiques majeures qui apparaissent pendant la période de différenciation des gonades sont assez semblables chez toutes les espèces de reptiles. Comme chez les autres vertébrés, la crête génitale
se développe par épaississement de l'épithélium
coelomique, sur la face ventro-médiane du mésonephros. Les
cellules germinales primordiales sont dispersées dans cet épithélium
(épithélium germinatif). Au cours du développement
de ces crêtes génitales, des cellules épithéliales
s'ajoutent au mésenchyme initial au centre de la gonade (medulla).
Certaines de ces cellules (provenant de corpuscules de Malpighi ou de l'épithélium
coelomique) formeront les cordons du rete. D'autres (provenant de l'épithélium
germinatif lui-même) donnent des cordons épithéliaux
qui pénètrent dans le mésenchyme sous-jacent. Ces
cordons médullaires (ou cordons sexuels) s'entourent rapidement
d'une membrane basale. Les cordons sexuels et ceux du rete entrent en contact
dans la partie dorsale de la gonade. Cette structure de la gonade est observable
dans les deux sexes avant la période thermosensible et à
ce stade, la gonade est considérée comme indifférenciée.
La différenciation sexuelle gonadique se fera pendant la période
thermosensible.
La différenciation dans le sens mâle commence par un amincissement de l'épithélium germinatif. Les cellules germinales le quittent et migrent jusqu'à s'insérer entre les cellules épithéliales des cordons médullaires. Dans ces cordons un nombre de cellules épithéliales de plus en plus important acquiert les caractéristiques "Sertoliennes". Les cordons médullaires forment ainsi les ébauches des cordons séminifères. Pendant la période thermosensible, sous l'effet du développement de ces cordons séminifères dans la medulla, la croissance des testicules est régulière. Les cellules de Leydig ne se différencient, dans le tissu interstitiel, qu'après la période thermosensible. Dans les ovaires en cours de différenciation, l'épithelium germinatif s'épaissit sous l'effet de la prolifération, in situ, de cellules épithéliales et germinales qui donneront naissance aux follicules. Ainsi, dans l'ovaire, c'est essentiellement le cortex qui se développe. Durant la période thermosensible, l'ovaire grossit moins que le testicule, sa medulla étant plus réduite. A la fin de la période thermosensible, certaines cellules germinales sont entrées en méiose et à l'éclosion, on observe généralement quelques follicules primordiaux avec leurs ovocytes en croissance, dans la zone interne du cortex ovarien. Les stéroïdes interviennent dans la différenciation gonadique Au début des années 70, lorsqu'on découvrit le
déterminisme du sexe par la température chez les tortues,
il était bien établi que des traitements d'embryons ou de
larves par des oestrogènes de synthèse pouvaient féminiser
des mâles génétiques, chez les oiseaux, les reptiles
(lézards), les amphibiens et les poissons. Chez les marsupiaux,
on avait obtenu le développement d'ovotestes par un traitement précoce
aux oestrogènes de jeunes mâles encore dans la poche; cependant
, chez les euthériens, le traitement de femelles gravides par les
oestrogènes ou les androgènes ne modifiait pas la différenciation
sexuelle des gonades des foetus.
A une température déterminant le sexe femelle, la testostérone
n'inverse pas le phénotype sexuel de la gonade. Mais à une
température déterminant le sexe mâle, elle induit la
formation d'un cortex de type ovarien, à la surface du testicule
(effet féminisant dit "paradoxal").
Des expériences sur les tortues (notamment Emys orbicularis)
utilisant des oestrogènes, des antioestrogènes ou des
inhibiteurs de l'aromatase (l'aromatase permet la transformation des androgènes
en oestrogènes) ont donnés des résultats qui prouvent
l'intervention précoce des oestrogènes dans la différenciation
de l'ovaire.
Les cas où la gonade présente une intersexualité (ovotestis) peuvent se rencontrer dans la nature: des testicules fertiles présentent alors à leurs suface des ovocytes immatures. L'obtention de ce genre de gonades, naturellement, à la température pivot, ou sous l'effet de traitements est expliquée par une légère croissance du taux d'oestrogènes qui est alors suffisant pour induire la formation d'un cortex de type ovarien mais insuffisant pour inhiber le développement de cordons testiculaires. En général, après l'éclosion les taux d'oestrogènes sont insuffisants pour maintenir le cortex ovarien mais parfois quelques cellules germinales peuvent exister encore dans les vestiges du cortex de l'ovotestis. L'aromatase est le complexe enzymatique qui convertit les androgènes
en oestrogènes (l'androstènedione en oestrone et la testostérone
en oestradiol). Dans les gonades d'embryons de tortue incubés à
25°C (TM), elle présente une activité très faible
durant la période thermosensible et jusqu'à l'éclosion.
Alors que dans les gonades d'embryons incubés à 30°C
(TF) l'activité de l'aromatase est également très
faible au début de la période thermosensible mais augmente
de façon exponentielle durant cette période; elle présente
une légère diminution au moment de l'éclosion. L'augmentation
de l'activité de l'aromatase peut donc être mise en relation
avec la féminisation de la gonade.
Une autre enzyme, la 3bêtaHSD (3bêta-hydroxystéroide-déshydrogénase-5ène-4ène-isomérase)
qui permet la synthèse de progestérone et d'androgènes
à partir du cholestérol, pourrait être impliquée
dans le déterminisme thermique du sexe.
Ainsi chez cette tortue, et d'autres espèces présentant un déterminisme thermique du sexe, deux enzymes clé de la stéroidogénèse présentent une activité qui dépend de la température, durant la période de sensibilité à ce facteur. Si l'implication de la 3bêtaHSD dans le déterminisme thermique du sexe demeure inconnue, en revanche, celle de l'aromatase dans la féminisation de la gonade, via les oestrogènes, est démontrée. Contrôle génétique du sexe et influence de la température La recherche, chez les espèces présentant un déterminisme thermique du sexe, de gènes homologues à ceux impliqués dans le déterminisme du sexe chez les mammifères a montré de nombreuses ressemblances. Deux gènes; WT1 et SF1, sont impliqués dans la formation des crêtes génitales (et la stéroïdogénèse pour SF1) chez les mammifères. Des homologues de ces deux gènes ont été trouvés chez les reptiles. Chez les mammifères, la différenciation testiculaire est
gouvernée par le gène SRY. Plusieurs autres gènes
sont associés à la différenciation des cellules de
Sertoli; en particulier les gènes SOX9 (de la même famille
que SRY) et DMRT1 ainsi que le gène de l'AMH (hormone anti-Müllérienne).
DMRT1 pourrait jouer un rôle clé dans la différenciation testiculaire des reptiles présentant un déterminisme thermique du sexe. En effet, s'il est exprimé dans les gonades indifférenciées (avant la période thermosensible), à température féminisante comme à température masculinisante, il ne l'est plus dans les ovaires en cours de différenciation (pendant la période thermosensible) alors que son expression augmente dans les testicules pendant la même période. Le gène de l'AMH a été également trouvé, il présente de nombreuses similitudes avec celui des mammifères, mais contrairement à ces derniers, chez l'alligator, son expression dans les testicules précède celle de SOX9. Récemment, l'homologue du gène DAX1 des mammifères a été également mis en évidence chez l'alligator. Ainsi, il apparaît, qu'à l'exception du gène SRY, tous les gènes intervenant dans la détermination du sexe chez les mamifères ont leurs homologues chez les reptiles dont le sexe est déterminé par la température. Mais plusieurs questions restent posées:
Interactions entre ces différents gènes Chez les mammifères, SF1 agit comme activateur de la transcription
de certains gènes codant pour les enzymes de la stéroïdogénèse,
comme l'aromatase. Ce gène SF1 est également impliqué
dans l'activation des gènes SOX9 et AMH, tous deux spécifiques
de la différenciation testiculaire, avec une amplification de cette
transcription quand WT1 interagit avec SF1.
Le modèle proposé ici suppose que la transcription des gènes masculinisant et féminisant est sous le contrôle des oestrogènes, les gènes masculinisants étant inhibés par ces oestrogènes et les gènes féminisants étant activés. Cependant la cible précise de la température dans ce processus n'est pas réellement connue. En effet, la température peut inhiber ou activer les gènes de facteurs féminisant ou masculinisant, par exemple en agissant sur SOX9, ou sur les protéines de choc thermique (heat-shock protéin, hsp) impliquées dans la liaison des oestrogènes à leur(s) récepteur(s). Elle peut être impliquée dans la dissociation de la protéine de choc thermique du complexe oestrogène-récepteur qui sera alors activé.
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