La glucose 6 phosphate déshydrogénase (G6PD)

Rôle de l'enzyme G6PD

C'est une enzyme cytoplasmique présente dans toutes les cellules. Elle catalyse la première réaction de la voie des pentoses phosphates. Cette autre voie du catabolisme glucidique produit du ribose 5 phosphate (qui servira ultérieurement à la synthèse des nucléotides) et du NADPH, coenzyme qui est le principal donneur d'hydrogène dans de nombreuses réactions de biosynthèse. NADPH est aussi indispensable pour que se réalise la destruction du peroxyde d'hydrogène hautement toxique pour la cellule. La chaîne de réaction est la suivante :

G6PD

¯

         glucose-6-phosphate + NADP+ ® 6-phosphogluconate + NADPH, H+

 

Glutathion réductase

             NADPH, H+  + glutathion oxydé ® glutathion réduit + NADP+

 

Glutathion peroxydase

                          Glutathion réduit + H2O2 ® glutathion oxydé + H2O

 

La catalase catalyse la réaction : H2O2 H2O + 1/2 O2

Ces quelques réactions nous montrent que pour la destruction du peroxyde d'hydrogène (H2O2), la catalase et le glutathion sont indispensables. Avec une G6PD inactive ou de très peu active, il y a un arrêt de production de NADPH par la voie des pentoses phosphates. Cela empêche la réduction du glutathion et par là la destruction de H2O2. On sait d'autre part que le NADPH « stabilise » la catalase. Donc sans NADPH, H2O2 ne sera pas détruit et la cellule sera tuée. Dans les globules rouges cette situation est d'autant plus dramatique que d'autres enzymes permettant la production de NADPH manquent.

Le polymorphisme du gène G6PD

Le gène codant pour la G6PD est situé dans la partie télomérique du bras long du chromosome X ; il est formé par 13 exons et mesure 18 kilo paires de bases environ. Toutefois, sa région codante ne comprend que 1545 paires de bases ce qui correspond à une protéine enzymatique formée par 515 acides aminés. On connaît de très nombreux allèles (plus d'une centaine), dont certains ont une fréquence supérieure à 1%.

 

 

Allèles

 

Fréquence

 

Activité enzymatique (% par rapport au normal)

 

Manifestations cliniques

 

Afrique

Europe

Méditerranée

 

 

G6pdb

65 %

99,7 %

90-99 %

100

Aucune

G6pda

20 %

 

< 1 %

85

Aucune

 

G6pda-1

 

-

 

-

 

-

 

12

Jaunisse néo-natale ; anémie hémolytique aiguë (médicaments, infection)

 

G6pda-2

 

15 %

 

-

 

< 12 %

 

12

Jaunisse néo-natale ; anémie hémolytique aiguë (médicaments, infection)

 

G6pda-3

 

-

 

-

 

-

 

12

Jaunisse néo-natale ; anémie hémolytique aiguë (médicaments, infection)

 

G6pdm

 

< 0,1 %

 

-

 

1 - 8 %

 

3

Jaunisse néo-natale ; anémie hémolytique aiguë (médicaments, ingestion de fèves, infection)

G6pdseat

-

-

-

25

Rares

Fréquence de quelques allèles de la G6PD contenus dans la banque.

 

Séquence nucléique

Polypeptide

 

Noms des allèles

Nucléotides changés

Nature - Position

Codons changés

Nature - Position

A.A. changés

Nature - Position

Type de mutation

G6pdb

 

(Référence)

(Référence)

(Référence)

 

G6pda

A376 G

AAT126 GAT

Asn126Asp

Substitution

 faux sens

G6pda-1

A376 G

AAT126 GAT

Asn126Asp

Substitution

 faux sens

 

G202 A

GTG68 ATG

Val68Met

Substitution

 faux sens

G6pda-2

A376 G

AAT GAT

Asn126Asp

Substitution

 faux sens

 

G680 T

CGC227 CTC

Arg227Leu

Substitution

 faux sens

G6pda-3

A376 G

AAT126 GAT

Asn126Asp

Substitution

 faux sens

 

T968 C

CTG323 CCG

Leu323Pro

Substitution

 faux sens

G6pdm

C563 T

TCC188 TTC

Ser188Phe

Substitution

 faux sens

G6pdseat

G844 C

GAT282 CAT

Asp282His

Substitution

 faux sens

Caractéristiques de quelques allèles du gène de la G6PD.

La déficience en G6PD

La déficience en G6PD est l'enzymopathie la plus répandue : elle affecterait 400 millions de personnes dans le monde. Les régions les plus touchées sont l'Afrique tropicale, le moyen Orient, l'Asie tropicale et subtropicale. Un certain nombre d'allèles codent pour une enzyme G6PD déficiente. La déficience n'est jamais totale : l'absence d'enzyme G6PD est sans doute incompatible avec la vie. Les manifestations cliniques sont la jaunisse néonatale, une anémie hémolytique, et dans des cas sévères des séquelles neurologiques. Des crises aigües d'anémie hémolytique peuvent être déclenchées par des infections, des ingestions de fèves et divers médicaments (comme la primaquine). Heureusement, seule une faible proportion des malades déficients en G6PD présentent une anémie hémolytique chronique et pour les autres, en dehors des crises hémolytiques, il n'y a aucun symptôme particulier. L'action favorisante de l'ingestion de fèves sur le déclenchement des crises hémolytiques est surtout nette chez les personnes possédant l'allèle G6pdm.

Le phénotype des femmes hétérozygotes possédant un allèle « normal » et un allèle « déficient »

Il est classique de considérer comme récessif le phénotype G6PD déficient et c'est ce que traduit l'arbre généalogique soumis à l'analyse. En réalité, la situation est plus complexe et le phénotype des femmes hétérozygotes variable, certaines pouvant manifester des signes cliniques de déficience. Cela est en relation avec l'inactivation au hasard d'un des chromosomes X dans chacune des cellules de l'organisme, inactivation qui peut atteindre l'un ou l'autre des chromosomes X. La femme hétérozygote possède deux populations d'hématies, l'une G6PD déficiente, l'autre avec une enzyme G6PD efficace. L'importance relative de ces deux populations varie d'une femme à l'autre.