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Mise
à jour 14/08/2001
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Hervé Le Guyader, Professeur au Laboratoire de Biologie moléculaire et cellulaire du Développement de l'Université Pierre et Marie Curie, répond à nos questions. Qu’est-ce qu’un gène homéotique ? Un gène homéotique est, par définition, un gène
dont la mutation produit une homéose, c’est-à-dire l’apparition
d’un organe bien formé, mais à un mauvais emplacement du
corps. Un gène homéotique est donc défini par rapport
au phénotype qu’il entraîne lorsqu’il est muté, et
non par sa séquence nucléotidique. Les premières observations
de phénotypes homéotiques remontent à 1894, bien avant
la découverte des gènes et la définition du mot phénotype
!
Les gènes homéotiques ne possèdent donc pas nécessairement la fameuse séquence appelée « homéoboîte » ? Non, et la confusion est fréquente : en 1983, deux équipes
de recherche distinctes, celle de Walter J. Gehring et celle de Thomes
C. Kaufman , découvrent que tous les gènes homéotiques
connus chez la drosophile possèdent une séquence commune
de 180 paires de bases, qu’on nomme « homéboîte »
(en anglais homeobox). La tentation est grande d’appeler alors «
gène homéotique » tout gène à homéoboîte…Cette
définition s’applique effectivement chez la drosophile , et chez
tous les animaux, mais il faut bien préciser deux points.
Quel rôle jouent les gènes homéotiques chez les différents organismes ? Chez les arthropodes comme la drosophile, animal modèle des laboratoires,
les gènes homéotiques déterminent l’identité
de chaque segment de l’animal : ils dirigent ainsi l’apparition de pattes,
d’antennes, ou de balanciers suivant les segments. Le phénotype
« pattes à la place des antennes », décrit par
Bateson, est dû chez la drosophile à une mutation dans le
complexe de gènes homéotiques Antennapedia (4). Cette spécification
des segments se fait suivant un axe antéro-postérieur, et
il est fortement corrélé à l’ordre des gènes
sur les chromosomes : c’est la règle de colinéarité.
En parcourant l’ADN de 3’ vers 5’, on trouve des gènes dont les
lieux d’action s’échelonnent de l’avant vers l’arrière de
l’animal.
Quel est le mode d’action des gènes à homéoboîte ? Les gènes à homéoboîte sont des régulateurs de transcription, activateurs ou inhibiteurs suivant les cas : ils sont en quelque sorte des gènes « maîtres », qui dirigent l’expression d’autres gènes. Prenons l’exemple des gènes homéotiques animaux, qui possèdent tous l’homéoboîte : cette séquence code un peptide de 60 acides aminés, appelé homéodomaine, qui possède dans sa structure secondaire trois hélices a lui permettant de se fixer à l’ADN. L’homéodomaine régule ainsi la transcription d’autres gènes. Chez les végétaux, la MADSbox joue un rôle similaire : elle code un peptide possédant un site de fixation à l’ADN. Les gènes homéotiques sont très conservés au sein du monde vivant. En quoi ont-ils pu participer à la diversité des êtres vivants ? Lorsqu’en 1983, Gehring et Kaufman découvrent « l’homéoboîte
», on crible des banques connues de séquences de gènes
pour savoir si cette séquence est présente chez d’autres
organismes que la drosophile : on trouve d’abord des gènes
à homéoboîte chez la souris, chez l’homme, puis chez
tous les vertébrés. La plupart de ces gènes s’avèrent
homologues chez les arthropodes et chez les vertébrés. De
plus, ils sont regroupés en complexes dans les deux cas. Or les
paléontologues nous disent que les arthropodes et les cordés
se sont séparés il y a 540 millions d’années ! L’ancêtre
commun à ces deux embranchements possédait donc déjà
des gènes à homéoboîte, qui se sont probablement
dupliqués au sein d’un complexe, qui se scindera plus tard en deux
sous-complexes chez la drosophile, et se dupliquera pour en donner 4 chez
les vertébrés, créant de la diversité.
Propos recueillis par
Anne-Laure Monnier
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