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Présentation polydactylie

Par salame — Dernière modification 25/11/2018 16:12

 

La polydactylie

Extension  de l’expression d’un gène en jeu au cours du  développement des membres des vertébrés tétrapodes et conséquences morphologiques

La polydactylie, marquée par la possession d'un ou de plusieurs doigts supplémentaires, est une anomalie morphologique relativement fréquente chez les vertébrés pentadactyles. On distingue classiquement deux formes, la polydactylie pré axiale et la polydactylie post axiale. La polydactylie pré axiale, où le doigt surnuméraire est du côté du pouce, est celle dont le déterminisme génétique est le mieux connu ;  sa fréquence est de l’ordre de 1 pour 2000 naissances. L’analyse génétique classique, à partir d’arbres généalogiques, montre que c’est un phénotype héréditaire, dû à une mutation d’un seul gène. Le phénotype se transmet suivant le mode de l’hérédité autosomale dominante. Les individus atteints sont le plus souvent hétérozygotes.

Le modèle murin (souris) de la polydactylie a permis de préciser les mécanismes moléculaires en jeu. Au cours du développement du bourgeon du membre, avant que n’apparaissent les doigts, un gène, le gène sonic hedgehog (Shh) s’exprime dans une zone précise de la région postérieure du bourgeon. La protéine codée par ce gène est une molécule de signalisation qui en agissant sur les autres cellules de l’extrémité du bourgeon, déclenche un programme de genèse des doigts suivant un ordre précis. Chez l’embryon de souris polydactyle, on a établi qu’au cours du développement du bourgeon du membre, le gène Shh s’exprime non seulement dans la région postérieure du bourgeon mais aussi dans la région antérieure (on parle d’expression ectopique). Il y a donc une corrélation entre la variation d’expression du gène et l’anomalie morphologique. Cette corrélation traduit une relation de causalité. C’est l’expression ectopique de Shh dans la région antérieure qui déclenche la formation d’un doigt supplémentaire

Le gène Shh a été séquencé chez les polydactyles et non polydactyles : il n’existe aucune différence entre les séquences codantes des allèles de ce gène. Autrement dit, la protéine Shh est la même chez les polydactyles et non polydactyles. Il en est de même dans les modèles animaux de la polydactylie. C’est donc uniquement l’extension d’expression du gène au cours du développement du membre qui est à l’origine de la polydactylie.

Il existe en amont de la séquence transcrite du gène Shh, une séquence non codante de plusieurs centaines de paires de nucléotides, dite ZRS , qui contrôle l’expression du gène Shh. La délétion expérimentale de cette région engendre l’absence d’expression de Shh dans le bourgeon du membre, ce qui se traduit sur le plan morphologique par la suppression des doigts 2 à 5 (donc main ou pied réduit à un seul doigt).

Des mutations ponctuelles de ZRS sont corrélées tant dans l’espèce humaine que chez la souris avec le phénotype .polydactyle. Des expériences de transgénèse avec un gène rapporteur chez la souris ont montré que la séquence ZRS mutée entraînait une expression ectopique du gène SHH dans la région antérieure du bourgeon, donc une polydactylie.

Cet exemple montre donc que des mutations dans une séquence régulatrice d’un gène peuvent entraîner un changement dans le territoire d’expression de ce gène au cours du développement, lequel est à l’origine d’une modification morphologique. En outre les mutations de la séquence codante du gène Shh ont des conséquences non seulement au niveau des membres, mais aussi d’autres régions du corps, notamment du crâne et du système nerveux. Cela les différencie des mutations d’une séquence régulatrice du gène spécifiques au membre, et permet d’introduire l’idée que des séquences régulatrices différentes contrôlent l’expression du gène dans les diverses régions où il s’exprime.