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Rhynie : la première communauté végétale.

Par jfcarion — Dernière modification 19/09/2017 09:51
par Patrick Ferreira

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Ce site écossais d’une richesse paléontologique exceptionnelle a été décrit et cartographié en 1878.

La finesse de ses cherts (roche siliceuse produite par des sources chaudes, nombreuses en raison du volcanisme régional) datés de la fin du Dévonien inférieur (396 +/- 8 millions d’années) explique la qualité de la fossilisation des végétaux et des animaux (jusque dans leurs ultrastructures cellulaires pour certains !) et donc la reconstitution très précise de l’écosystème qui a été faite.

On retrouve sept genres d’Embryophytes, essentiellement des Trachéophytes déjà bien adaptés au milieu terrestre (trachéides, rhyzoïdes sur les rhizomes, stomates) comme Rhynia (Rhyniophyte) et Asteroxylon (Lycophyte) mais aussi des formes plus primitives, présentant encore des caractères de Bryophytes (Aglaophyton).

On trouve aussi à Rhynie des algues d’eau douce (Charophytes), des champignons (dont les premiers Ascomycètes identifiés avec certitude) et même le premier « lichen » connu (le « pseudo-lichen » Winfrenatia reticulata, dans lequel le photobionte est une cyanobactérie mais dont l’organisation est inconnue dans les lichens actuels).

L’écosystème de Rhynie est, comme les sites contemporains, installé en milieu marécageux.

La répartition des végétaux en « îlots » monospécifiques, due à la croissance de nombre d’espèces à l’aide de rhizomes (parfois fossilisés) peut s’expliquer grâce au principe d’actualisme : ces îlots sont construits par des clones et ce mode de développement est typique des organismes dont les capacités d’exploitation du milieu sont limitées, tant pour l’approvisionnement en eau et sels minéraux (pas encore de racines vraies) que pour la capture de lumière (certaines espèces possèdent seulement des microphylles, les axes des autres sont nus).

Ce mode de croissance des organismes permet une occupation rapide de l’espace disponible, rapidité imposée par une compétition interspécifique importante. On peut donc supposer que le début de la colonisation du milieu terrestre s’est fait « rapidement », sous l’effet d’une importante compétition entre les espèces végétales peu nombreuses (un peu suivant un modèle « tête de pont »), la diversification ne s’étant réalisée qu’après, dans des milieux déjà modifiés .

La répartition des fossiles dans les dépôts montre qu’ils peuvent se succéder sur un site lorsque celui-ci est modifié .

Ainsi, le genre Rhynia semble être un colonisateur précoce de sols drainés à litière végétale pauvre, que l’on trouve d’ailleurs plutôt en dépôts monospécifiques.

Par contre, les genres Asteroxylon et Aglaophyton seraient plutôt associés à des sols assez secs, riches en matières organiques et présents en groupements diversifiés.

Cette succession écologique probable montre l’impact des végétaux sur l’évolution des sols qu’ils stabilisent et enrichissent (formation d’une litière même si la production de biomasse végétale est faible). Les végétaux vont également modifier la configuration du réseau hydrographique et en limiter les débordements tout en drainant des surfaces toujours plus importantes, qui offriront ainsi de nouvelles niches écologiques.

Rhynie montre donc des végétaux qui se partagent l’espace et ses ressources, qui se répartissent (dans le temps et dans l’espace) en fonction des conditions du milieu et de la compétition interspécifique, qui modifient le milieu dans lequel ils se développent, de la colonisation de domaines marécageux originels à la structuration de véritables sols et la modification de l’environnement physico-chimique (réseau hydrographique, échanges gazeux et minéraux) : Rhynie présente une véritable communauté végétale en pleine évolution !

L’exceptionnelle qualité de la fossilisation à Rhynie a permis d’identifier différentes espèces de champignons engagés dans des interactions écologiques variées, comme le parasitisme sur une charophyte, Palaeonitella cranii qui montre des réactions d’hypertrophie tissulaire dans les secteurs où les hyphes sont présentes, mais aussi le mycoparasitisme d’un chytridiomycète sur un autre champignon.

Autre type d’interaction écologique identifié à Rhynie, la symbiose avec le premier exemple d’endomycorhize connu !

Les photos ci-dessous montrent la présence, dans le parenchyme cortical d’un rhizome d’Aglaophyton major d’hyphes d’un Zygomycète de l’ordre des Glomales .

La qualité de la conservation permet d’identifier le champignon par comparaison avec les formes actuelles.