7. L'évolution hormonale durant la puberté
La puberté dans l'espèce humaine
L'évolution hormonale durant la puberté
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Le contrôle hormonal de la croissance
Croissance somatique
La période pubertaire est précédée d'une période de croissance minimale (ralentissement pubertaire) à laquelle fait suite une augmentation de la vitesse de croissance. Chez la fille, la poussée de croissance est un événement précoce qui précède, chez certaines, le développement des seins (thélarche). L'apparition des règles (ménarche) se produit en phase de décélération, 6 à 12 mois après le pic de croissance. Chez le garçon, c'est au contraire un événement tardif, se situant vers 15 ans (deux ans plus tard que chez la fille), parallèlement à l'augmentation rapide de la sécrétion de testostérone.
La croissance somatique s'accompagne de changements osseux (apparition et ossification des points épiphysaires). Cette maturation osseuse s'apprécie par comparaison à des atlas de référence radiographiques concernant le plus souvent la main et le poignet, le genou, les épaules ou les hanches. L'âge osseux présente une meilleure corrélation que l'âge réel avec les premiers signes de puberté, surtout en cas de puberté précoce ou différée.
Relation entre l'âge (état civil), la vitesse de croissance dans les deux sexes
et les taux d'oestradiol chez la fille ou de testostérone chez le garçon
Age en années |
Vitesse de croissance chez la fille en cm/an |
Vitesse de croissance chez le garçon en cm/an |
Taux moyen d'oestradiol plasmatique en pg/ml |
Taux moyen de testostérone plasmatique en ng/dl |
avant 1 an |
25 |
25 |
15 |
280 |
5 ans |
7 |
7 |
8 |
traces |
8 ans |
6 |
6 |
10 |
traces |
10 ans |
5 |
5 |
15 |
traces |
12 ans |
8 |
4 |
30 |
10 |
13 ans |
7 |
5 |
60 |
120 |
14 ans |
3 |
9 |
75 |
220 |
15 ans |
2 |
8 |
65 |
380 |
16 ans |
0 |
5 |
65 |
480 |
18 ans |
0 |
1 |
65 |
520 |
La poussée de croissance pubertaire au niveau des os longs et des vertèbres s'effectue grâce à un processus de maturation des chondrocytes du cartilage de croissance épiphysaire. Plusieurs hormones et facteurs de croissance interviennent dans l'évolution des chondrocytes au cours de la puberté: l'hormone de croissance (GH), les facteurs de croissance insulino-mimétiques (IGF-1) , le fibroblast growth factor (FGF-2), et les stéroïdes sexuels.
La GH, dont la sécrétion s'élève au cours de la puberté, stimule la production de facteur IGF-1 par le foie, elle stimule également la sécrétion d'IGF-1 et de FGF-2 par le chondrocyte lui-même. Le FGF-2 stimule la multiplication des chondrocytes alors que l'IGF-1 entraîne leur différenciation (augmentation de la synthèse des protéines). La hausse de la sécrétion de GH résulte d'une augmentation de l'amplitude de ses pulses sécrétoires sous l'effet du taux croissant de stéroïdes sexuels au cours de la période pubertaire.
Les oestrogènes jouent également un rôle direct sur la minéralisation des épiphyses. Ils stimulent, dans les deux sexes, la différenciation des chondrocytes des cartilages de croissance et entraînent la soudure, par calcification, des cartilages de croissance.
Dans les cas d'une extrême faiblesse des taux d'oestrogènes (par déficit de l'enzyme de conversion des androgènes en oestrogènes, l'aromatase) ou par déficit du récepteur de l'oestradiol lui-même, la croissance continue après la puberté. Deux individus de sexe masculin, ont ainsi atteint des tailles supérieures à 2 mètres après une puberté et une virilisation normale, leur âge osseux étant alors estimé à 13-14 ans.
Le blocage de l'action des oestrogènes sur le cartilage de croissance conduit ainsi à une augmentation de la taille adulte.
Les androgènes combineraient deux effets sur la croissance pubertaire: d'une part, un effet indirect grâce à leur transformation (via l'aromatase) en oestrogènes dans les tissus périphériques, d'autre part, un effet direct sur le complexe hypothalamo-hypophysaire en augmentant la réponse de la cellule somatotrope hypophysaire (sécrétrice de GH) à la neuro-hormone hypothalamique GH-RH.
Croissance du pénis et taux de testostérone
Il existe une bonne corrélation entre la maturation d'un organe génital externe comme le pénis et le taux d'une hormone gonadique: la téstostérone. Les deux phases de croissance rapide du pénis, postnatale et pubertaire, sont contemporaines des phases d'activation de la fonction testiculaire.
Croissance du pénis et taux moyens de testostérone plasmatique totale (liée à un transporteur et libre) en fonction de l'âge chronologique. Il existe deux phases de croissance rapide du pénis, une juste après la naissance et une au moment de la puberté (attention aux changements d'échelle temporelle). |
Contrôle de l'évolution gonadique au cours de la puberté
Chez le garçon
C'est sous l'influence des sécrétions pulsatiles de FSH et de LH que les testicules se développent de façon spectaculaire. Vers l'âge de 11-12 ans la sécrétion de FSH est nettement augmentée et entraîne le développement des tubes séminifères. La sécrétion de LH augmente plus tardivement, vers 12-13 ans, et provoque le différenciation des cellules de Leydig et la sécrétion de quantités rapidement croissantes de testostérone. C'est cette testostérone qui est responsable de l'acquisition progressive des caractères sexuels secondaires décrits dans le tableau de Tanner.
Les cellules de Sertoli, différenciées sous l'influence de la FSH, deviennent capables d'aromatiser la testostérone en oestrogène et de produire de l'inhibine (une protéine, responsable, avec la testostérone, du rétrocontrôle négatif des testicules sur l'axe hypothalamo-hypophysaire).
Les sécrétions testiculaires exercent un rétro-contrôle sur la sécrétion de LH et de FSH; ce rétro-contrôle est positif pour FSH et LH par l'oestradiol, négatif pour LH et FSH par la testostérone et négatif pour FSH par l'inhibine.
Chez la fille
Sous l'influence des sécrétions pulsatiles de FSH et de LH, la maturation des follicules ovariens est accélérée avec production de quantités croissantes d'oestrogènes, en particulier d'oestradiol, à partir de l'âge de 10 ans. Ce sont ces oestrogènes qui sont responsables des transformations anatomiques pubertaires (croissance de l'utérus, acquisition des caractères sexuels secondaires décrits dans le tableau de Tanner).
Progressivement, les cycles ovariens se constituent. Les premiers, bien que marqués par des menstruations, sont, le plus souvent, anovulatoires.
Les sécrétions ovariennes exercent un rétrocontrôle sur la sécrétion de LH et FSH; globalement positif durant la première partie du cycle (effet de l'oestrogène), il est négatif durant la seconde (effets de l'oestrogènes et de la progestérone).
Evolution des hormones du complexe hypothalamo-hypophysaire au cours de la puberté
Pendant l'enfance, la synthèse des gonadotropines est très faible et leur taux plasmatique est bas, alors que la synthèse de la GnRH hypothalamique apparaît normale. La libération de GnRH n'est donc pas suffisante pour stimuler l'hypophyse. Deux hypothèses sont envisageables: soit les neurones hypothalamiques ne sont pas synchronisés et leurs sécrétions de GnRH ne provoquent pas de pulses, soit le GnRH est rapidement dégradé (hyperactivité des peptidases hypothalamiques). C'est l'apparition progressive de la pulsatilité de la GnRH à la puberté qui entraîne la reprise de la synthèse et de la sécrétion des gonadotropines (cette sécrétion n'étant pas nulle à la naissance).
Taux de GnRh et de LH chez des macaques castrés à la naissance |
Jeune enfant de 1 à 2 mois |
Enfant de 12 à 15 mois |
Adulte |
Taux moyen de GnRH en ng/hypothalamus |
55 |
80 |
30 |
Taux moyen de LH en ng/hypophyse |
32 |
2 |
32 |
Chez l'enfant humain, on peut déceler le métabolite urinaire de la GnRH (le nonapeptide 2-10) dès l'âge de 8 à 9 ans. Parallèlement les concentrations de FSH et de LH augmentent dans le sang et l'urine.
Taux de LH plasmatique |
Taux de FSH plasmatique |
|
Début de puberté chez la fille |
1 |
1.5 |
Fin de puberté chez la fille |
4.5 |
3 |
Début de puberté chez le garçon |
0.8 |
1 |
Fin de puberté chez le garçon |
4 |
3.5 |
Leur sécrétion est pulsatile, mais c'est d'abord la nuit que l'on observe l'augmentation de la fréquence de ces pulses, la sécrétion nocturne étant maximale à la puberté. Ensuite la sécrétion diurne devient équivalente à la sécrétion nocturne et l'on ne trouve plus de différence jour/nuit chez l'adulte.
Profil des taux hormonaux chez une fille au stade P3 (à gauche) et chez un garçon en début de puberté, stade P2-P3 (à droite). Oestradiol et testostérone sont respectivement dosés en pmol/L et nmol/L, LH et FSH sont dosées en UI/L. |