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Les fonctions des gènes EPAS1 et EGLN1

Par salame — Dernière modification 31/12/2021 10:34

Génétique de l’adaptation à l’altitude des Tibétains

Les fonctions des gènes EPAS1 et EGLN1

1 - L’expression du gène EPAS1 entraîne la synthèse d’un polypeptide désigné par HIF2A qui est un facteur de transcription. Comme tous les facteurs de transcription, il contrôle l’expression d’autres gènes parmi lesquels se trouvent des gènes impliqués dans le métabolisme énergétique des cellules et le gène EPO. Ce dernier s'exprime dans le rein et  code pour un polypeptide hormonal qui stimule la prolifération des cellules souches d’hématies dans la moelle osseuse, et donc la production de ces cellules sanguines.

On connaît des mutations familiales du gène EPAS1 qui entraînent un gain de fonction du polypeptide HIF2A, ce qui provoque une maladie appelée polyglobulie caractérisée par un taux élevé d’hématies (hématocrite supérieur à 50%) et un fort taux d’hémoglobine.

2 - L’expression du gène EGLN1 entraîne la synthèse d’une protéine PHD2 qui est une enzyme. Cette enzyme agit sur le facteur de transcription HIF2A en entraînant sa dégradation.

On connaît des mutations familiales du gène EGLN1 qui se traduisent par une moindre efficacité de l’enzyme PHD2, une moindre dégradation de HIF2A , une augmentation de la production d'EPO et, au niveau phénotypique, une polyglobulie.

3 - L’action de l’enzyme PHD2 sur le facteur de transcription HIF2A est influencée par l’oxygénation des cellules où s’exprime le gène EGLN1. Si l’oxygénation est normale, l’enzyme dégrade HIF2A. Cette dégradation n'est jamais complète ce qui fait qu'il y a une production de base d'EPO. Mais si la teneur en oxygène est basse, l'action de l'enzyme PHD2 est réduite. Le schéma ci-dessous illustre de façon très simplifiée, les relations entre l’oxygénation des cellules, notamment des cellules rénales qui synthétisent l’EPO, la richesse en HIF2A des cellules, l’activité de l’enzyme PHD2 et la concentration d’EPO sanguine.

Contrôle EPO.jpg

En situation d'oxygénation normale des cellules, l'activité enzymatique de PHD2 est élevée ce qui entraîne une dégradation importante de HIF2A (corbeille) ; toutefois, il reste une concentration suffisante de HIF2A pour stimuler le gène EPO et en assurer une production basale.

En situation d'hypoxie, l'activité de l'enzyme PHD2 est diminuée avec pour conséquence une moindre dégradation de HIF2A et finalement une plus grande production d'EPO.

L'acclimatation à l'altitude

Avec les informations extraites de ce document, on peut proposer une explication à l’augmentation du nombre d’hématies chez les personnes qui vivent habituellement à basse altitude lorsqu’elles séjournent à des altitudes élevées. Dans ce cas, il y a chez ces personnes une augmentation de la concentration sanguine d’EPO. Cela est dû aux propriétés de l’enzyme PHD2. Par suite de la diminution d’oxygénation des cellules, l’activité de cette enzyme est diminuée ce qui provoque une diminution de la dégradation du facteur de transcription HIF2A. En conséquence la concentration cellulaire de ce facteur augmente ce qui stimule l’expression de nombreux gènes, dont celui qui code pour l’EPO. La concentration sanguine d’EPO augmente ce qui active la multiplication des cellules souches d’hématies et entraîne donc une polyglobulie.

EPAS1, EGLN1 et l'adaptation à l'altitude des Tibétains

Les chercheurs ont démontré expérimentalement que l’enzyme PHD2 (Asp4Glu ; Cys127Ser), caractéristique des Tibétains, a une activité plus importante que l’enzyme PHD2 très majoritaire dans les populations mondiales, lorsque l’oxygénation des cellules est basse. Cela permet de proposer une explication aux caractéristiques phénotypiques des Tibétains, notamment à leur nombre d’hématies du même ordre que celui des personnes vivant à des altitudes basses, alors qu’ils vivent à 4000 m et plus d'altitude : chez les Tibétains, l’enzyme PHD2 reste active en faible oxygénation, ce qui permet la dégradation de HIF2A et entrave son augmentation.et donc celle de la concentration d’EPO, d'où l'absence de polyglobulie chez les Tibétains.

Cette explication ne prend pas en compte la spécificité du gène EPAS1 chez les Tibétains, gène dont on sait qu'il contribue à l'adaptation à l'altitude chez cette population. On peut a priori formuler plusieurs hypothèses :

- Le gène EPAS1 est moins exprimé chez les Tibétains que dans les autres populations.

- Le facteur de transcription HIF2A est moins efficace chez les Tibétains et stimule moins la production d'EPO.

- Le facteur de transcription HIF2A chez les Tibétains est plus facilement dégradé par l'enzyme PHD2.

On n'a pas mis en évidence de mutation dans la séquence codante du gène EPAS1 des Tibétains ce qui semble infirmer les deux dernières hypothèses. En revanche, on a mis en évidence des mutations dans les introns et il est possible mais non démontré que l'épissage du gène soit différent chez les Tibétains de ce qu'il est dans les autres populations. Cet épissage différentiel serait à l'origine d'une action particulière du facteur de transcription HIF2A chez les Tibétains.