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Modélisation analogique de l'isostasie

Par Vutheany LOCH Dernière modification 18/07/2017 16:57
Réflexions sur la notion de modèle en géologie et quelques propositions pour concevoir des modèles utilisables par les élèves sur l'isostasie.


Modélisation analogique de l’isostasie

Jean-Marc Vallée

Professeur associé à Ifé-ENS Lycée Dessaignes


                  12 rue Dessaignes
                  Blois
                  41000
               

Publié par

Thierry Lhuillier

Professeur associé à Ifé-ENS

Publié par

Gérard Vidal

ENS de Lyon
Résumé

Réflexions sur la notion de modèle en géologie et quelques propositions pour concevoir des modèles utilisables par les élèves sur l'isostasie.


Table des matières

Modélisation analogique de l’isostasie


Table des matières

Réflexions préliminaires

Dans le nouveau programme de TS ( Bulletin officiel spécial n° 8 du 13 octobre 2011 ), il est noté :

«  Réaliser et exploiter une modélisation analogique ou numérique pour comprendre la notion d'isostasie.  »

C'est une nouvelle occasion de travailler sur la modélisation en géologie. Cependant déjà dans le BOEN Hors série, n°6, août 1999 – p5 L'enseignement des sciences au Lycée, il était noté : « L'exercice de modélisation du réel est sans doute la démarche la plus importante et aussi la plus difficile dans la démarche scientifique. Passer du concret à l'abstrait, de l'observation à sa traduction formalisée demande que l'on soit capable d'extraire du monde réel une représentation simplifiée … »

Cet exercice est effectivement difficile car il s'agit d'aller au-delà de la description pour aller vers l'explication en simplifiant la réalité. Cette démarche qui consiste donc à réduire la complexité du réel doit aussi s'inscrire dans la démarche scientifique et ne pas apparaître aux yeux des élèves comme une démarche peu rigoureuse.

Afin d'expliquer le réel, le modèle diminue la complexité de la réalité, dans l'Encyclopédia Universalis – J. Goguel définit le modèle ainsi : « … Le modèle est une représentation schématique d'un objet ou d'un processus qui permet de substituer un système plus simple au système naturel ».

«  Un modèle, pour le scientifique, est une construction intellectuelle qui va servir d'outil de raisonnement en vue de la compréhension d'un phénomène qui aura été repéré  ». Jacques TOUSSAINT université de Lyon.

Le modèle est donc par définition faux. Pour lui donner une certaine validation, il est nécessaire de le confronter à la réalité, de le critiquer d'en définir les limites. De cette confrontation et de ces critiques un nouveau modèle peut émerger, évolution du précédent. Un bon modèle possède aussi la dimension de prospective, via la simulation.

En précisant bien cette définition et en ayant une attitude critique vis-à-vis du modèle utilisé, nous atténuons la difficulté de l'utilisation de celui-ci dans notre enseignement : le modèle n'est pas la connaissance, il est faux mais permet d'interroger le réel pour «  apporter une réponse satisfaisante aux questions que l'on se pose  ». Le modèle dans l'enseignement d'après C. Orange (1997), est l'outil intellectuel permettant d'accéder à une explication d'un problème scientifique. La construction du modèle comme système explicatif d'un problème, doit faciliter l'élaboration d'un modèle rigoureux au regard d'un problème adapté au niveau des élèves.

Le modèle analogique est un modèle physique, il s'agit le plus souvent d'une maquette qui ressemble à l'objet étudié et qui possède des propriétés de cet objet.

«  Ces maquettes sont des modèles, ce sont des objets concrets, construits en fonction de leur ressemblance analogique avec l'objet étudié, qui permettent ainsi de travailler sur autre chose que le réel  » (Drouin, 1988).

En géologie, ces maquettes sont évidemment construites avec des échelles spatiales très éloignées de la réalité et utilisent le plus souvent aussi des échelles temporelles également très éloignées de cette réalité.

Les modèles analogiques d'isostasie proposés ici n'échapperont pas à ces limites, certains sont sans doute trop simplificateurs, mais ils ont tous le double statut :

  • d'outil didactique d'étude de l'isostasie et de mise en activité des élèves
  • d'outil de lien avec le réel et de prospective.

Ces modèles peuvent être présentés aux élèves par l'enseignant. Une autre démarche pourrait être, sous la conduite de l'enseignant, de faire élaborer par les élèves certains de ces modèles.

Quelle que soit la démarche choisie Pour chaque modèle il s'agira de s'interroger :

  • sur les limites de celui-ci ;
  • sur les différences entre le modèle et le réel.

Modéliser l'isostasie :

Le terme « isostasie » (du grec isos, égal, et stasis, arrêt) traduit l'état d'équilibre hydrostatique de la lithosphère par rapport à l'asthénosphère sous-jacente. Cet équilibre est réalisé à une certaine profondeur dit «  profondeur de compensation ». Tous les modèles reposent donc sur cet équilibre hydrostatique.

Modèle d'Airy sur de l'eau.

Le modèle d'Airy

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 1. Le modèle d'Airy


Il s'agit de faire flotter de petits éléments de bois dans de l'eau. Comme la volonté ici était de pouvoir faire manipuler tous les élèves, nous avons choisi du matériel présent dans tous les laboratoires de lycée.

Matériel :

  • Portoir avec tubes à essai
  • Chevilles en bois de 10 mm de diamètre
  • Punaises
  • Aimant sur tige

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 2. Le modèle le plus simple


Ce modèle est très très éloigné de la réalité, les élèves en seront conscient, ils le critiqueront facilement, deux critiques importantes doivent être débattues avec les élèves : le rapprochement entre viscosité de l'eau et celle de la péridotite, et liée à cette notion, la question du temps : temps du modèle et temps géologique de la réalité.

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 3. Petit plus ! A quoi servent les punaises ?


Modèle de Pratt sur de l'eau

Le modèle de Pratt

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 4. Le modèle de Pratt


Dans le programme de terminale scientifique, chapitre sur la caractérisation du domaine continentale, on peut modifier légèrement le modèle précédent en modifiant les densités.

Matériel :

  • Portoir avec tubes à essai
  • Chevilles en bois de 10 mm de diamètre
  • Punaises
  • Aimant sur tige
  • Clous coupés de diverses tailles

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 5. Le modèle de Pratt


Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 6. Petits plus : Comment faire varier la densité ?


Amélioration du modèle d'Airy

Le modèle d'Airy avec le slime

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 7. Le modèle d'Airy avec le slime


Utiliser directement ou en évolution par rapport au premier modèle, ce modèle utilise un milieu plus visqueux, le Slim.

Matériel :

  • Pot à confiture
  • Tringle à rideau en bois sectionnée par tronçons percé au centre.
  • Baguettes à brochettes
  • Slime

Comment fabriquer le slime ?

Les molécules du Slime

Le PVA (polyalcool vinylique) est constitué de très longues chaînes d'atomes :

Le borax crée des liaisons entre les longues chaînes de PVA

Figure 8. Les molécules du Slime

Les liaisons hydrogène sont faibles. Si on déforme lentement, les liaisons faibles ont le temps de se déplacer et on conserve la cohésion du gel.

Si on déforme violemment, le gel se casse.

Le comportement mécanique du Slime® est particulièrement intéressant. Ce n'est pas un solide car il s'adapte à la forme du récipient dans lequel on le place. C'est donc un liquide très visqueux. Cependant, lorsqu'on tire dessus d'un coup sec il se coupe net, comme un solide, car les liaisons hydrogène ne sont pas très fortes. Cependant une fois cassé on peut le reformer en un seul morceau car la cassure des liaisons hydrogène est réversible. Lorsqu'on laisse évoluer le Slime® sous son propre poids ou lorsqu'on l'étire doucement il flue (coule) sans se rompre. Il n'adhère pas aux parois lisses.

Pour fabriquer du Slime®: prépareraire deux solutions :

  • L'une d'alcool polyvinylique (PolyVinyl alcool, PVOH ou PVA, la masse molaire moyenne (MW) doit être d'environ 100 000 g/mol (au minimum 80 000 g/mol). Pour cette expérience,  je préfère à 70 000 g/mol car le polymère est alors plus fluide et le modèle analogique « fonctionne » plus rapidement.

  • L'autre de Tétraborate de sodium décahydraté  Na2B4O7,10H2O aussi appelé borax

Préparation des solutions

Solution de borax à 4% , La solution peut se conserver plusieurs mois.

Solution de PVOH à 4% : Celui-ci se dissout très lentement dans l'eau, il faut utiliser 900 mL d'eau distillée chaude. Pour réaliser cette dissolution, placer le récipient sur un agitateur magnétique chauffant  (entre 70 et 80°C). Cette étape peut demander quelques heures, mais la solution peut se conserver plusieurs mois dans un endroit frais (réfrigérateur par exemple).

Ensuite, il s'agit de mélanger ces deux solutions en parts égales.

A l'aide de la baguette en verre, agiter continuellement la solution de PVA tout en ajoutant la solution de borax.

Un gel se dépose instantanément sur la baguette en verre. Continuez à homogénéiser jusqu'à l'obtention d'une pâte gluante mais non collante.

Sortir le slime et le pétrir jusqu'à homogénéité parfaite.

Source :  http://wiki.scienceamusante.net/index.php?title=Le_Slime

Toxicité du slime

Le Slime® n'est pas une matière dangereuse mais il peut contenir du borax libre, il ne faut donc pas en avaler et ne pas le laisser manipuler à des enfants en bas âge.

Il est classé Toxicité pour la reproduction depuis la directive européenne du 6 novembre 2008, catégorie 1B.  Il faut donc bien se laver les mains après manipulation.

  • R60: Peut altérer la fertilité.
  • R61: Risque pendant la grossesse d'effets néfastes pour l'enfant.
  • S45: En cas d'accident ou de malaise, consulter immédiatement un médecin (si possible lui montrer l'étiquette).
  • S53: Éviter l'exposition – se procurer des instructions spéciales avant utilisation.

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 9. Le modèle avec le slime


L'enfoncement des éléments se fera de façon beaucoup plus lente, de même que l'allègement d'un élément conduira à une remontée ou un rebond « isostatique » beaucoup plus lent qu'avec de l'eau.

Le modèle en ce sens se rapproche légèrement de la réalité.

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 10. Petit plus : Dosage du slime

Modèle sur de la maïzena, avantage et inconvénients

Le modèle avec la maïzena

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 11. Le modèle avec la maïzena

Moins facilement utilisable que les deux précédents, car le compartiment sous-jacent n'est plus transparent


Matériel :

  • Pot à confiture
  • Tringle à rideau en bois sectionnée par tronçons percé au centre.
  • Baguettes à brochettes
  • Suspension de maïzena

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 12. Le modèle avec la maïzean


Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 13. Petit plus: Mélanger la maîzena


Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 14. Petit plus: Faire un pré-trou


Ce modèle présente cependant des caractéristiques proches du Slime et la possibilité de se placer dans l'histoire des sciences :

Référence à l'histoire de la théorie

En effet : Wegener souligne que si des mouvements verticaux étaient possible pour expliquer l'isostasie pourquoi ne pas imaginer des mouvements horizontaux indispensables à son hypothèse de dérive des continents. Il affirme :« De toute façon, l'isostasie se base sur l'idée que le support de la croûte est à un certain degré fluide ou presque liquide. S'il en est ainsi, c'est-à-dire si les socles continentaux flottent réellement dans un fluide, fût-il même très visqueux, il n'y a aucun motif d'admettre qu'ils ne puissent se mouvoir verticalement, les mouvements horizontaux étant exclus. » (Wegener, op. cit., p.43).

En 1912, Wegener avait imaginé qu'en profondeur le milieu qui se laissait traverser par les ondes sismiques était rigide pour des forces de courtes périodes, mais pouvait se comporter comme un corps élastique pour des forces à périodes beaucoup plus longues. Pour se faire comprendre, il utilisait une analogie avec un morceau de poix qui se brise comme un solide sous l'effet d'un coup de marteau, mais se déforme sous l'effet de son propre poids. La maïzena possède ce même comportement : elle se déforme lentement sous le poids des éléments de bois que l'on pose à sa surface mais elle peut avoir un comportement de solide sous l'effet d'un coup de marteau permettant alors d'enfoncer un clou dans l'élément de bois.

A ces modèles analogiques peuvent s'en ajouter d'autres en jouant sur la viscosité du milieu sous-jacent notamment : eau sucrée, gélose, miel…

Mais quel que soit le modèle, l'essentiel est d'en définir les limites

En effet, simplifier la réalité revient à introduire des erreurs et discuter sur les limites du modèle permet de mettre le doigt sur les représentations initiales des élèves qui sont le plus souvent erronées.

Deux notions sont à faire surgir :

  • la viscosité du manteau
  • la durée des temps géologiques.

Cette illustration est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Figure 15. Notion de temps: Etalement lent du slime


Quelques liens :

Définition d'un modèle scientifique :

Définition de l'isostasie

Activité sur l'isostasie (GPS)