Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

Plateforme - ACCES
Navigation

Origine génétique de cette variabilité

Par Naoum Salamé Dernière modification 30/03/2024 12:30

2 - Origine génétique de cette variabilité

Hypothèses

L’amylase salivaire est une protéine constituée par une seule chaîne polypeptidique de 511 acides aminés et codée par un gène AMY1 situé sur le chromosome 1. La séquence de ce gène a été établie. L’amylase résultant directement de l’expression de ce gène, les variations interindividuelles doivent provenir de différences dans l’expression de ce gène.

Deux grands types d’explication peuvent rendre compte de ces variations d’expression :

- Suivant le premier, il existe des différences dans les mécanismes de régulation de l’expression du gène entre les individus.

- Suivant le second, il existe un nombre variable de copies du gène dans les génomes des individus ; la quantité d’amylase étant d’autant plus forte que le nombre de copies est grand.

Bien entendu, cela n’exclut nullement l’intervention de facteurs non génétiques dans la variabilité du phénotype. Les travaux de Perry et de son équipe ont eu pour but de tester ce second type d’explication en identifiant le nombre de copies du gène présentes dans le génome des 50 individus de leur étude.

Recherche du nombre de copies du gène

Les chercheurs ont déterminé le nombre de copies du gène présentes dans le génome de chaque individu en utilisant la technique de réaction de polymérisation en chaîne (PCR).

On dispose maintenant des génomes complets de nombreux organismes et d'outils adaptés pour explorer ces génomes. L'un de ces outils est le UCSC qui contient le génome de référence pour chaque organisme. Ces génomes peuvent être explorés par chromosome ou directement par la recherche d'un gène particulier.

L'interrogation de cette banque de données sur le gène de l'amylase salivaire chez l'homme (en tapant AMY1) conduit à la détection de 3 gènes de cette amylase notés AMY1A, B et C dans le génome de référence.

AMY1-Gene-List.jpg

  On peut comparer les structures des 3 gènes avec le même outil :

Alignement-AMY1.jpg

On constate que l'organisation en exons et introns des 3 gènes est la même ce qui laisse penser qu'ils sont homologues, paralogues donc font partie d'une même famille multigénique.

La comparaison des séquences codantes des 3 gènes (Fichier AMY1ABC.edi) révèle qu'elles sont identiques. On peut considérer qu'il s'agit de 3 copies du même gène et donc le génome haploïde de référence contient 3 copies du gène AMY1. Par la suite on ne distinguera plus les séquences AMY1A, AMY1B et AMY1C ; on parlera seulement de la séquence AMY1.

Cette étude montre qu'il existe bien dans le génome de référence plusieurs copies du gène de l'amylase. Il reste à envisager s'il existe bien une variabilité du nombre de copies entre individus.

Visualisation du nombre de copies

Les chercheurs ont utilisé la technique d’hybridation in situ. Ils ont obtenu des fibres d’ADN à partir de lyse des noyaux des cellules. Par traitement thermique, ils ont réalisé une dénaturation des molécules d’ADN c’est à dire la séparation des deux brins de chaque molécule. Ils ont utilisé des sondes spécifiques du gène qu’on essaie de détecter associées à un marqueur fluorescent.

Par suite de la complémentarité des bases de ces sondes avec celles du gène, elles s’hybrident avec un brin d’ADN d’un chromosome au site du gène AMY1. L’observation de l’ADN hybridé permet donc de révéler les séquences AMY1 présentes dans les cellules.

Dans l’expérience visualisée ci-dessous, on a utilisé deux sondes, l’une associée à un marqueur rouge, l’autre à un marqueur vert

Nb copies Amylase méthode Fish..jpg

D'après Perry et al. Nature Genetics 39, 1256 - 1260 (2007).

Chaque cliché a, b, c correspond à un individu.

Pour interpréter ces clichés, les élèves doivent bien sûr se rappeler que dans chaque cellule il y a n paires de chromosomes homologues, en particulier deux chromosomes 1. Les deux parties de chaque cliché correspondent donc chacune à un chromosome 1. Pour le cliché a, on voit qu’un chromosome possède 10 copies du gène AMY1 et l’autre 4 copies ce qui fait 14 copies en tout. L’individu b a 3 copies sur chacun des chromosomes soit 6 copies en tout. Enfin, l’individu c ne possède que deux copies du gène. 

Cette visualisation du gène AMY1 dans les génomes confirme qu’il existe une grande variation interindividuelle dans le nombre de copies ce qui est en accord avec l’explication proposée. Encore faut-il qu’il existe une corrélation entre la quantité d’amylase salivaire et le nombre de copies du gène.

Corrélation entre le nombre de copies du gène et la quantité d’amylase dans la salive

Pour chaque individu de leur cohorte de 50 personnes, les chercheurs ont déterminé le nombre de copies du gène et la quantité d’amylase dans la salive. Le graphique suivant illustre les résultats obtenus. Il faut bien voir que c’est le nombre total de copies du gène présentes dans chaque cellule qui est indiquée en abscisse.

Amylase salivaire et nombre de copies.jpg

D'après Perry et al. Nature Genetics 39, 1256 - 1260 (2007).

On constate qu’il y a une corrélation positive entre les deux paramètres, la quantité minimale d’amylase étant trouvée chez les individus ne possédant que 2 ou 3 copies et les quantités les plus fortes chez ceux qui possèdent 10 copies ou plus.

On peut donc conclure qu’une variation dans le nombre de copies du gène AMY1 détermine la quantité d’amylase présente dans la salive.

Il faut noter cependant que pour le même nombre de copies, il existe des variations notables de la quantité d’amylase. Cela signifie que d’autres mécanismes génétiques actuellement non identifiés peuvent agir, notamment ceux liés à la régulation de l’expression de chaque copie. Enfin, il est certain que des facteurs non génétiques, tels que l’état d’hydratation de l’organisme, le stress, les aliments consommés peu avant les mesures, peuvent aussi intervenir.