Exploitation pédagogique. Septième partie
Introduction
Le dossier sur les stratégies thérapeutiques vis-à-vis de la DM1 rapporte des recherches récentes (entre 2010 et 2020) ayant pour objectif d’établir des protocoles de thérapie génique de cette maladie.
Deux thérapies ont été conçues par les chercheurs, l’une repose sur l’introduction dans les cellules d’une construction génique codant pour des protéines leurres MBNL1d, l’autre sur l’injection dans les cellules des composants du système d’édition génique CRISPR-Cas9.
Rappel : Données et questionnements. Septième partie.
Septième partie : Thérapie génique de la DM1 par CRISPR-Cas9 |
Exploitation pédagogique
Thérapie génique de la DM1 par CRISPR-Cas9
Les caractères communs aux recherches sur ces deux thérapies et à leur mode d’action.
Ces deux thérapies ont pour objectif de rétablir la fonction normale des protéines MBNL1. Les chercheurs, dans les deux cas, ont commencé par travailler sur des modèles cellulaires de la DM1. Pour cela ils ont réalisé des cultures de cellules musculaires à partir de cellules prélevées chez les patients DM1. Ces cellules présentaient les caractéristiques moléculaires pathologiques de la DM1, à savoir l’anomalie génétique du gène DMPK : l’expansion des répétitions du triplet CTG dans la région 3’ UTR de la séquence du gène. Les ARN messagers issus de l’expression d’un tel allèle muté forment au sein du noyau des agrégats séquestrant les protéines nucléaires MBNL1. Ces protéines assurant l’épissage des ARN pré-messagers de nombreux gènes, il en résulte des anomalies dans la séquence des ARNm des gènes concernés, donc des protéines qu’ils codent.
Les différences entre les deux thérapies géniques
- La thérapie leurre n’agit pas sur l’allèle DMPK muté dont l’expression aboutit à la production d’ARNm anormaux toxiques. Elle contribue à la production de protéines MBNL1Δ qui se fixent sur les expansions CUG des ARM messagers anormaux du gène DMPK. Ce faisant, ces protéines exogènes provoquent la libération dans le nucléoplasme des protéines MBLN1 endogènes en quantité suffisante pour assurer un épissage normal des gènes. Du fait qu’elles ne sont plus séquestrées, leur fonction est rétablie.
- La thérapie assurée par le système CRISPR–Cas9 agit sur la séquence de l’allèle muté en entraînant l’excision de la région formée par l’expansion des répétitions CTG. Les ARNm produits après correction sont normaux. Ils ne forment pas d’agrégats et ne séquestrent pas les protéines MBLN1 endogènes. Celles-ci réalisent un épissage normal des ARNm.
Les deux thérapies visent donc à rétablir la fonction des protéines MBLN1 mais par des mécanismes différents.
A - Protocole expérimental de la thérapie génique de la DM1 utilisant CRISPR–Cas9
Le document sur la comparaison globale des deux éditions géniques par CRISPR–Cas9 permet d’illustrer les changements dans la séquence d’un gène, via ce système d’édition génique.
L’exemple sur le changement dans la séquence d’un gène par insertion d’une séquence montre qu’à la suite de la coupure réalisée par l’enzyme Cas9, on peut insérer entre les deux fragments séparés une courte séquence d’intérêt. Cela sensibilise à l’idée qu’avec ce système d’édition, on dispose d’un outil de modification de toute séquence.
Le protocole relatif à la DM1 montre d’abord l’utilisation d’un vecteur viral aussi bien sur un modèle cellulaire que sur un modèle animal (souris) pour introduire dans les cellules DM1 la construction génétique contenant les composants du système CRISPR–Cas9. La thérapie de la DM1 nécessite deux coupures de la séquence de l’allèle muté, situées de part et d’autre de la région formée par l’expansion des répétitions CTG. Cela nécessite deux ARN guides. L’un doit s’hybrider avec une séquence de l’allèle DMPK située en amont de la zone (CTG), l’autre avec une séquence située en aval. Les cellules sont ensuite capables de rétablir la continuité de la séquence de l’allèle, suite à l’élimination de l’expansion des triplets CTG.
B - Résultats de la thérapie de la DM1 par CRISPR-Cas9
Les chercheurs ont d’abord constaté une réduction importante du nombre d’agrégats (foci) nucléaires et même leur disparition. Cela traduit la quasi disparition des ARN anormaux du gène DMPK et par suite de l’expansion des triplets CTG des allèles mutés des cellules DM1.
La figure indique les profils d’épissage d’un exon de 4 gènes dans trois types de cellules musculaires (myoblastes) : myoblastes sains, myoblastes DM1, myoblastes DM1 traités par CRISPR–Cas9.
Remarque : Les résultats ont été obtenus en utilisant 4 couples d’ARN guides différents.
Pour les 4 gènes, le profil d’épissage des cellules DM1 est très différent de celui des cellules saines, ce qui caractérise la pathologie de la DM1. En revanche l’épissage des gènes dans les cellules traitées par CRISPR–Cas9 se rapproche de celui des cellules saines.
L’exemple de l’épissage de l’exon 78 du gène DMD est démonstratif de l’efficacité de la thérapie CRISPR–Cas9. Alors que l’inclusion de l’exon 78 dans les ARNm du gène DMD est quasiment nulle dans les cellules DM1, elle est de 100% dans les cellules DM1 traitées par CRISPR-Cas9, identique à celle des cellules saines.
A la suite des résultats positifs obtenus in vitro avec le modèle cellulaire, les chercheurs ont expérimenté in vivo sur des souris de phénotype DM1. Ils ont injecté le virus AAV9 dans le muscle tibial antérieur de souris DM1. Quatre semaines après cette injection intramusculaire, ils ont constaté une réduction de 25% des noyaux présentant des agrégats (foci) dans les cellules musculaires traitées, par rapport aux cellules musculaires DM1 non traitées.
Ces résultats laissent espérer que la thérapie par CRISPR–Cas9 in vivo soit efficace pour traiter la DM1 dans l’espèce humaine.