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Les espoirs déçus de la thérapie génique

Par Naoum Salamé Dernière modification 29/10/2024 10:05

Les espoirs déçus de la thérapie génique

La découverte du gène CFTR en 1989 et son clonage ont déclenché de grands espoirs chez les chercheurs et cliniciens visant à concevoir des thérapies n’ayant pas pour seul objectif de limiter les symptômes de la maladie, mais l’origine même d la maladie, c’est-à-dire l’anomalie génétique. Il s’agit de concevoir un traitement par thérapie génique. Celle-ci se définit alors comme le transfert d’un gène thérapeutique dans les cellules cibles d’un patient au moyen d’un vecteur et cela à des fins thérapeutiques. C’est une thérapie qui vise l’appareil respiratoire. L’objectif est de délivrer au sein des cellules épithéliales des bronches et bronchioles, un gène CFTR fonctionnel (donc un transgène) qui compense celui défectueux à l’origine de la mucoviscidose.

C’est une thérapie génétique somatique in vivo où les vecteurs utilisés sont des vecteurs viraux (adénovirus, virus AAV, rétrovirus) recombinants. Ces virus possèdent des protéines qui leur permettent de se lier à des récepteurs des cellules cibles, préalable indispensable à leur entrée dans leurs cibles. Le génome du vecteur ne possède pas le gènes de virulence du virus et, très schématiquement, on peut dire que ceux-ci sont remplacés par le transgène. Dans le dossier sur la thérapie génique du DISC-X, on trouve des précisions sur les vecteurs.

La mucoviscidose est apparue comme très propice à la thérapie génique du fait de la possibilité d’amener par aérolisation ou nébulisation les vecteurs viraux thérapeutiques au contact des cellules épithéliales pulmonaires. Durant la décennie 1990, la thérapie génique prend son essor avec les premiers essais sur la mucoviscidose et surtout la réussite de la thérapie génique in vivo du DISC-X (1999-2000).

En septembre 1990, la revue « CELL » publie un article : « Correction  of the Cystic Fibrosis defect in vitro by retrovirus-mediated gene transfer ». C’est une thérapie génique in vitro qui montre que le transfert du gène CFTR normal  dans des cellules issues de patients atteints de mucoviscidose corrige les anomalies de transport ionique suite à la production de protéines CFTR fonctionnelles (canaux ioniques) dans les membranes apicales des cellules.

Ce succès de thérapie génique in vitro encourage de nombreuses équipes de cliniciens d’entreprendre des essais cliniques de thérapie génique in vivo .

Le VEMS  (Volume expiratoire maximal par seconde) est un indicateur de l’efficacité de la fonction respiratoire. Le VEMS en cas de mucoviscidose est inférieur à celui des personnes en bonne santé, la réduction pouvant dépasser 50% dans les cas les plus sévères. Les essais cliniques de thérapie génique se sont révélés décevants avec une très faible amélioration du VEMS qui, en outre, diminuait par la suite. Cela indiquait que des obstacles, des difficultés affectaient le transfert du gène thérapeutique.

A l’intérieur des voies respiratoires, les vecteurs rétroviraux peuvent être piégés par la couche de mucus qui les tapisse et peuvent être ainsi éliminés par le mécanisme de clairance muco-ciliaire. Les voies respiratoires sont riches de cellules du système immunitaire qui peuvent déclencher des réactions immunitaires contre les vecteurs, entraînant leur élimination et affectant par là la capacité de réaliser un transfert génique. En outre l’épaisseur de la couche de mucus est un obstacle à la réalisation d’une liaison des vecteurs aux récepteurs situés sur les faces apicales des cellules épithéliales respiratoires.

Les cellules des épithéliums des bronches et bronchioles ont une faible longévité et sont donc constamment renouvelés à partir de cellules souches. A moins d’atteindre ces derniers, il faut donc administrer à plusieurs reprises la thérapie génique. Cette ré-administration des vecteurs thérapeutiques peut devenir inefficace à cause de l’augmentation des réactions immunitaires.

Une autre explication à la faible efficacité de la thérapie génique de la mucoviscidose, est la diminution de l’expression du gène thérapeutique CFTR causée notamment par sa dégradation au sein de la cellule transductée.