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Les phénotypes de l’alphaantitrypsine

Par Naoum Salamé Dernière modification 31/10/2017 09:38

Les phénotypes de l’alphaantitrypsine

 

Informations scientifiques

 

Phénotype moléculaire et phénotype clinique

 

L’alpha AT est une protéine plasmatique constituée d’une chaîne protéique de 394 acides aminés et de trois chaînes latérales glucidiques. Ces chaînes latérales se branchent sur la chaîne peptidique au niveau de trois résidus asparagine (asn 46, 83 et 247). C’est une glycoprotéine globulaire d’une masse de 52 kdaltons. Si l’on réalise une électrophorèse des protéines plasmatiques, elle fait partie du pic des alpha1 globulines, d’où le début de son nom.

 

La concentration plasmatique d’alpha AT est généralement comprise entre 1,5 et 3,5 g/l. Elle diffuse dans le liquide interstitiel où sa concentration est toutefois beaucoup plus faible (environ 1/10e de celle du plasma).

 

La demi-vie de l’alpha AT est de 4 à 5 jours.

 

L’alpha AT est produite et sécrétée par les cellules hépatiques. Elle est synthétisée au niveau du REG sous forme d’un précurseur de 418 acides aminés ; le peptide signal, de 24 acides aminés, est éliminé durant le passage dans les cavités du reticulum ; c’est aussi lors de ce passage que la protéine prend sa conformation spatiale et que les trois chaînes glucidiques sont ajoutées. La protéine ainsi glycosylée est transférée dans les saccules golgiens, puis sécrétée par exocytose. On estime à 34 mg par kilogramme de masse corporelle la production journalière d’alpha AT.

 

L’alpha AT est un inhibiteur des protéases à sérine, protéases dont le site actif comprend la triade d’acides aminés catalytiques : acide aspartique, histidine, sérine. La trypsine, la chymotrypsine et l’élastase produite par les granulocytes sont des protéases de ce type. L’action inhibitrice de l’alpha AT sur ces protéases à sérine a été mise en évidence pour la première fois sur la trypsine, d’où son nom. In vivo, le seul substrat réel pour l’alpha AT est l’élastase, une endopeptidase puissante capable de cliver la plupart des protéines de la matrice extracellulaire, notamment l’élastine et les divers collagènes. Cette élastase est libérée par les granulocytes à leur mort. Au niveau du conjonctif des alvéoles pulmonaires, cette élastase est libérée en permanence à des taux très bas.

 

L’alpha AT protège donc la matrice extracellulaire de divers organes, et notamment au niveau pulmonaire.

 

Les études épidémiologiques montrent que les concentrations plasmatiques d’alpha AT inférieures à 0,8 g/l sont associées à un risque d’emphysème pulmonaire. En effet, à ces concentrations, l’inhibition de l’élastase par l’alpha AT est insuffisante. L’élastase détruit donc peu à peu le tissu conjonctif, en particulier au niveau des alvéoles pulmonaires, ce qui perturbe les échanges gazeux et entraîne l’emphysème.

 

L’alpha AT exerce son action protectrice en se liant fortement, de façon quasi irréversible, au site actif de l’élastase. Le site de liaison de l’alpha AT est localisé au niveau des résidus Met382 et Ser383. La méthionine peut être facilement oxydée, ce qui réduit fortement l’affinité de l’alpha AT pour l’élastase. Il semble que la fumée de cigarette entraîne l’oxydation de la méthionine ce qui expliquerait, au moins en partie, l’aggravation des symptômes chez le fumeur en cas de déficience en alpha AT.

 

Le déterminisme génétique de l’alpha AT

 

L’alpha AT est codée par un gène situé sur le chromosome 14, et pour lequel on connaît de très nombreux allèles dans l’espèce humaine (75 allèles dont plusieurs avec une fréquence supérieure à 1 %). Ce gène est composé de 7 exons et 6 introns et comprend 12 200 paires de bases ; la région strictement codante se trouve au niveau des 4 derniers exons. Les séquences fournies ici sont des séquences nucléiques strictement codantes, incluant la région correspondante au peptide signal (24 acides aminés), qui sera excisée dans la protéine mature.

 

Les allèles peuvent être regroupés en trois catégories :

 

Les « variants normaux » (M’1, M1, M2, M3) : ils codent pour des molécules d’alpha AT fonctionnelles. Les mutations apparues dans les allèles M1, M2 et M3 entraînent donc des modifications de séquences d’acides aminés sans conséquences pour les propriétés de la molécule d’alpha AT (mutations neutres). Il existe de nombreux autres allèles « variants normaux », mais leur fréquence est plus faible (l’allèle M4 ayant toutefois une fréquence de 1 à 5 % dans les populations européennes).

 

 

 

 

83

 

ANAGÈNE

 

Les « variants déficients » (S et Z) :

 

L’allèle S code pour une molécule d’alpha AT fonctionnelle, mais sécrétée en plus faible quantité que les molécules codées par les variants normaux. La mutation (codon 288) entraîne un changement d’acide aminé qui semble entraîner une relative instabilité de la molécule d’alpha AT, cause d’une destruction précoce à l’intérieur même des cellules hépatiques. Ce phénomène serait à l’origine de la déficience de sécrétion, la molécule d’alpha AT ayant une durée de vie normale une fois sécrétée.

 

L’allèle Z code pour une molécule d’alpha AT ayant une activité réduite, et sécrétée en plus faible quantité. Chez les homozygotes Z // Z, les niveaux d’ARNm sont normaux, ainsi que la traduction, mais après leur mise en forme dans le REG, les molécules d’alpha AT s’agrègent ce qui limite leur transfert vers l’appareil de Golgi et donc leur sécrétion. La structure tridimensionnelle de l’alpha AT est affectée par cette substitution.

 

Les « variants Null » : ces allèles sont toujours rares, avec une fréquence inférieure à 0,1 % . Les mutations apparues dans ces allèles font apparaître un codon stop précoce. Les protéines codées par ces allèles sont raccourcies, très instables et rapidement détruites.

 

L’évolution du gène de l’apha AT

 

Bien que l’allèle M1 soit le plus fréquent aujourd’hui, les généticiens estiment que l’allèle M’1 est l’allèle présent dans les premières populations humaines. Ils s’appuient pour cela sur la séquence codante du gène connue chez le chimpanzé : cette séquence est identique à celle de M’1, sauf à un site.

 

Si M’1 est l’allèle initial, tous les autres en dérivent par mutations. En admettant que si deux allèles possèdent la même mutation ils ont une parenté plus grande, on peut établir une filiation entre les allèles de ce gène.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Filiation des allèles de l’alpha AT

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

84

 

SUGGESTIONS PÉDAGOGIQUES : CLASSE DE PREMIÈRE, SÉRIES S, L ET ES

 

Pistes d’exploitation pédagogique des données fournies

 

Les relations génotype/phénotype/environnement

 

Séquences et documents

 

Fichiers des séquences

 

La commande Les phénotypes de l'alphaantitrypsine de la banque de thèmes d’étude permet, par le développement de l’arborescence, d’accéder à :

 

Allèles du gène AT qui charge le fichier allAT.edi affichant les séquences nucléiques strictement codantes de quelques allèles du gène de l’alpha AT – allèles M’1, M1, M2, M3, Z , S, NULL 1 et NULL 2 ;

 

Génotypes famille1 qui charge le fichier allATfamille1.edi affichant les séquences des allèles du gène de l’alpha antitrypsine des membres d’une famille dans laquelle existent des cas d’emphysème pulmonaire. Les allèles présents dans cette famille sont M’1, M1, NULL 1 et Z. Un frère et une sœur de cette famille ont la même concentration plasmatique en alpha AT, mais seul le frère est atteint d’emphysème pulmonaire ; il est précisé sur l’arbre que cet homme est fumeur.

 

Documents fournis

 

La commande Les phénotypes de l'alphaantitrypsine de la banque de documents permet d’accéder aux fichiers :

 

InfoAlphaAT.bmp pour afficher des informations scientifiques, sous forme d’un petit texte, concernant l’alpha ATet la relation entre le déficit en alpha AT fonctionnelle et l’emphysème pulmonaire ;

 

familleAlphaAT.bmp qui présente l’arbre généalogique d’une famille présentant des cas d’emphysème pulmonaire. Les phénotypes cliniques et biochimiques (concentrations plasmatiques en alpha AT) sont indiquées pour chaque individu. Les individus fumeurs sont indiqués ;

 

AllellesAlphaAT.bmp qui présente, sous la forme d’un tableau, la fréquence estimée de chaque allèle dans la population blanche des États-unis d’Amérique, et pour chacun de ces allèles indique la concentration d’alpha AT dans le sang et le risque de maladie chez l’homozygote ;

 

GenoPhenoAlphaAT.bmp qui affiche un tableau indiquant les phénotypes biochimiques (concentration en alpha AT) et clinique en fonction des différents génotypes ;

 

repartitionSZ.bmp qui affiche les cartes de distribution de fréquence de l’allèle S et de l’allèle Z en Europe.

 

Résultats obtenus par l’exploitation des séquences nucléiques fournies

 

 

 

Différence par rapport à l’allèle de référence (M’1)

Différence entre la

Allèle

 

 

 

protéine codée par M’1

 

 

 

 

Nucléotide

Codon

et la protéine codée par

 

 

 

 

 

 

cet allèle

 

 

 

 

 

M1

 

710 : C Æ T

Codon 237 : GCG Æ GTG

A Æ V

 

 

 

 

 

 

 

374 : G Æ A

Codon 125 : CGT Æ CAT

R Æ H

M2

 

710 : C Æ T

Codon 237 : GCG Æ GTG

A Æ V

 

 

1200 : A Æ C

Codon 400 :GAA Æ GAC

E Æ D

 

 

 

 

 

M3

 

710 : C Æ T

Codon 237 : GCG Æ GTG

A Æ V

 

1200 : A Æ C

Codon 400 : GAA Æ GAC

E Æ D

 

 

 

 

 

 

 

S

 

710 : C Æ T

Codon 237 : GCG Æ GTG

A Æ V

 

863 : A Æ T

Codon 288 : GAA Æ GTA

E Æ V

 

 

 

 

 

 

 

Z

 

1096 : G Æ A

Codon 366 : GAG Æ AAG

E Æ K

 

 

 

 

 

Null 1

 

552 : délétion de C

Codon 184 : TAC Æ TAG

183 acides aminés au

 

lieu de 418

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

710 : C Æ T

Codon 237 : GCG Æ GTG

A Æ V

Null 2

 

240 acides aminés au

 

721 : A Æ T

Codon 241 : AAG Æ TAG

 

 

lieu de 418

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tableau de comparaison des allèles de l’alpha AT et des protéines correspondantes

 

La comparaison des allèles des membres de cette famille aux différents allèles du gène de l’alpha AT permet de déterminer le génotype de chaque individu de la famille. L’arbre généalogique fourni précisant les taux d’alpha AT plasmatique des différents membres de la famille ainsi que leur phénotype clinique, on pourra ainsi discuter de la relation génotype/phénotype.

 

85

 

ANAGÈNE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Génotypes des individus de la famille

 

 

Individu

Génotype

 

 

I 1

M’1 // Null 1

 

 

I 2

M1 // Null 1

 

 

II 1

Z // Z

 

 

II 2

M’1 // Null 1

 

 

II 3

M’1 // Null 1

 

 

II 4

M’1 // M1

 

 

II 5

Null 1 // Null 1

 

 

II 6

M1 // M1

 

 

III 1

M’1 // Z

 

 

III 2

M1 // Null 1

 

 

III 3

M1 // Null 1

 

 

 

Les deux allèles présents chez un individu s’expriment indépendamment l’un de l’autre. On trouve donc dans le sang, en cas d’hétérozygotie, les deux types d’alpha AT. On peut donc parler de codominance à ce niveau. Cependant, au niveau clinique, on peut parler de phénotype normal dominant sur les phénotypes S, Z, Null 1 et Null 2. Ainsi :

 

les personnes qui possèdent deux allèles Null présentent les symptômes d’emphysème avant l’âge de 30 ans et vivent rarement au-delà de 40 ans ;

 

les individus de génotype Z//Z, donc qui possèdent des concentrations plasmatiques variant entre 0,15 et 0,5 g/l d’alpha AT souffrent aussi d’emphysème, mais plus tardivement et leur espérance de vie peut atteindre 60 ans ;

 

pour les individus ayant une concentration en alpha AT à la limite du risque d’emphysème (0,9 à 1,2 g/l), le risque peut être fortement aggravé par des facteurs de l’environnement comme la fumée du tabac.

 

La possession d’un seul allèle normal suffit pour avoir une concentration suffisante d’alpha AT protectrice vis à vis de l’élastase.