Deux vaccins anti-HPV
- Video Interview du Docteur Giuseppe Pollini gynécologue à l'Instiut Alfred Fournier (Paris) sur le vaccin contre le cancer du col de l'utérus (Magazine de la santé, France 5, du 15 mars 2007 http://www.france5.fr/magazinesante/008140/139/141879.cfm)
Chaque jour, en Europe, 40 femmes meurent d'un cancer du col de l'utérus. Malgré les progrès médicaux réalisés ces dernières années et les programmes de dépistage mis en place, le cancer du col de l'utérus demeure la deuxième cause de mortalité par cancer (après le cancer du sein) chez les femmes âgées de 15 à 44 ans en Europe. En Europe, le cancer du col est, pour les femmes entre 15 et 44 ans, la deuxième cause de mortalité due aux cancers, derrière le cancer du poumon.
Communiqué de presse des AGF: Paris le 27/10/06...
...la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles et le cancer du col de l'utérus va gagner notablement en efficacité avec la diffusion prochaine de 2 vaccins contre les papillomavirus. Le GARDASIL et le CERVARIX contribueront ainsi à diminuer l'exposition au risque, IST et cancer des jeunes femmes.
Fidèle à sa pratique constante en faveur de la prévention et de l'innovation, AGF a décidé de faciliter sans délai l'accés des femmes à ce progrès médical en prenant en charge à 100% sur la base de 100€ l'injection, le Gardasil et le Cervarix dès leur mise sur le marché.
Cette prise en charge deviendra naturellement complémentaire à celle de la Sécurité Sociale le jour où interviendra cette dernière.
Présentation des deux vaccins disponibles
(Biofutur, 274, février 2007).
Contrer le HPV avant qu'il n'infecte les cellules, c'est l'approche retenue par les groupes Merck-Sanofi Pasteur MSD et GlaxoSmithKline, qui ont chacun développé un vaccin préventif contre les types de HPV oncogènes les plus agressifs."le but du vaccin est d'éliminer les lésions graves en passant par une prévention de l'infection" Dc Leomach pour Gardasil.
Il faut retenir que l'un est bivalent et l'autre est tétravalent:
Cervarix, bivalent, ne cible que les types 16 et 18 du HPV; Gardasil est tétravalent, il cible les HPV 16 et 18 en cause dans les cancers mais aussi HPV 6 et 11 responsables des verrues génitales.
Gardasil et Cervarix sont conçus sur le même modèle, ils utilisent comme antigène la protéine L1, protéine principale de la capside du virus, pour constituer une VLP (Virus Like Particle) très immunogène et non pathogène.
Un vaccin tétravalent comme Gardasil contient 4 VLP différentes et un vaccin comme Cervarix, divalent, n'utilise que 2 types de VLP seulement.
- Fiche technique de GARDASIL (source principale: dictionnaire Vidal 2007)
Fabricant: sanofi-Pasteur MSD
Principe actif essentiel: protéine L1 de Papillomavirus humain(HPV) de type 6, 11, 16 et 18. vaccin quadrivalent recombinant adsorbé.
Indication: prévention des dysplasies (CIN = Néoplasie Cervicales Intraépithéliales) de haut-grade et des cancers du col de l'utérus, des dysplasies de haut-grade de la vulve et des verrues génitales externes (condylomes acuminés) dus à l'HPV de type 6.11.16 et 18 ; efficacité démontrée chez les femmes de 16 à 26 ans, et immunogénicité chez les enfants et les adolescentes de 9 à 15 ans.
Posologie et mode d'administration: voie intramusculaire, seringue préremplie de 0.5 mL. La primovaccination comprend 3 doses de 0.5 mL admnistrées à 0, 2 et 6 mois. Les 3 doses doivent être administrées en moins d'un an. La nécessité d'une dose de rappel n'a pas été établie.
Précautions d'emploi: le vaccin n'est pas efficace à 100% et il protège uiniquement contre l'HPV de type 6.11.16 et 18. La vaccination ne dispense pas des tests de dépistage de routine du cancer du col de l'utérus, ainsi que des mesures de précautions appropriées vis-à-vis des IST. la durée de protection n'est actuellement pas connue; une efficacité protectrice persistante a été observée pendant 4. 5 ans après une vaccination complète de 3 doses.
Pharmacodynamie: De la classe pharmacothérapeutique "vaccin viral", Gardasil est un vaccin tétravalent préparé à partir de VLP, les VLP ne contiennent pas d'ADN viral, leur efficacité résulte d'une réponse immunitaire à médiation humorale. L'efficacité de Gardasil a été évaluée au cours de 4 études cliniques contre placebo, en double aveugle, randomisées incluant au total 20541 femmes de 16 à 26 ans. L'immunogénicité a été évaluée chez 8915 femmes agées de 18 à 26 ans et 3400 garçons et filles agés de 9 à 17 ans.
AMM: EU/1/06/357/015; Code CIP. 377 133.0.
Liste 1
Prix public conseillé: 135.51 €
remboursé par la Sécurité Sociale 65% et compléments par la mutuelle de santé
- Fiche technique de CERVARIX ( source principale: dictionnaire Vidal 2008)
Fabricant: GSK GlaxoSmithKline
Principe actif: vaccin recombinant bivalent contre HPV16 et 18 avec adjuvant, adsorbé. Cervarix est donc dirigé seulement contre HPV 16 et 18; il se singularise également par son adjuvant novateur breveté ASO4. L'adjuvant ASO4 contient du 3-0-desacyl-4'-monophosphoryl lipide A (MPL)3, adsorbé sur de l'hydroxyde d'aluminium hydraté Al(OH)3.
Les protéines L1 se présentent sous forme de VLP non infectieuses produites par la technique de l'ADN recombinant avec un système d'expression utilisant le baculovirus et des cellules dérivées de Trichoplusia ni. (insecte également nommé "la fausse arpenteuse du chou").
Remarque: avec l'adjuvant ASO4, à 45 mois, le taux des anticorps se maintient à un niveau supérieur à celui utilisant uniquement l'aluminium, l'adjuvant naturel des vaccins.
Indication: Cervarix est indiqué pour la prévention des CIN de haut grade et du cancer du col de l'utérus dus aux HPV de types 16 et 18.
Remarque: en outre, le vaccin de GSK confère une nette protection contre l’infection par le HPV des types 45 et 31, qui viennent au troisième et au quatrième rang des principales souches cancérogènes de HPV
Posologie et mode d'administration: Le schéma de vaccination est de 3 doses selon le schéma 0, 1 et 6 mois. La necessité d'une dose de rappel n'a pas été établie.
Précautions d'emploi: La vaccination ne remplace pas le dépistage régulier du cancer du col ni les précautions à prendre contre les HPV et les autres IST. Comme pour tout vaccin, une réponse immunitaire protectrice peut ne pas être obtenue chez tous les sujets vaccinés. cervarix protège contre la maladie due aux HPV 16 et 18 mais pas contre les autres types d'HPV oncogènes. cervarix n'a pas démontré d'effet thérapeutique.
Pharmacodynamie: De la classe pharmacothérapeutique "vaccin viral", Cervarix est un vaccin recombinant préparé à partir de VLP de protéine de capside L1 des HPV oncogènes 16 et 18; les VLP ne contiennent pas d'ADN viral et entraine principalement une réponse immunitaire à médiation humorale. Les HPV 16 et 18 sont responsables d'environ 70% des cancers du col de l'utérus dans le monde. l'efficacité de Cervarix a été évaluée par des études randomisées en double aveugle incluant un total de 19778 femmes âgées de 15 à 25 ans.
AMM: EU/1/07/419/004 et code CIP 381 642.3
- Caractéristiques comparées des vaccins anti-papillomavirus GARDASIL® et CERVARIX®
Caractéristiques | Gardasil® | Cervarix® |
Vaccin quadrivalent | Vaccin bivalent | |
HPV 6, 11, 16 et 18 | HPV 16 et 18 | |
Système d’expression | Levures (S. cerevisiae) par la technologie de l'ADN recombinant. | Cellules d’insecte /baculovirus |
Composition, teneur en VLP L1 | 20 μg HPV6 |
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40 μg HPV11 |
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40 μg HPV16 | 20 µg HPV 16 | |
20 μg HPV18 | 20 µg HPV 18 | |
Adjuvant | Sulfate d’hydroxyphosphate d’aluminium amorphe(225 μg) | ASO4 (500 μg d’hydroxyde d’aluminium + 50 μg de lipide A détoxifié) |
Dose et voie d’administration |
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Calendrier, schéma vaccinal | 0, 2 et 6 mois | 0, 1 et 6 mois |
d'après http://www.john-libbey-eurotext.fr/fr/print/e-docs/00/04/26/62/article.md?fichier=images.htm
P. Coursaget, A. Touzé, Inserm U618, équipe “vectorisation, virus, vaccins”, laboratoire membre de l’IFR136
Agents transmissibles et infectiologie, Faculté de Pharmacie, 31 avenue Monge, 37200 Tours <coursaget@univ-tours.fr>
Un enjeu économique
GSK a annoncé le 17.01.07 qu'il allait comparer l'efficacité de Cervarix et de Gardasil, une première mondiale....
Pour exemple, 2 articles de presse:
GSK crée 600 emplois à Saint Amand |
Le laboratoire britannique GlaxoSmithKline a annoncé qu’il allait investir 500 millions d’euros pour agrandir son usine de saint Amand les eaux qui produira notamment son vaccin contre la cancer du col de l’utérus : le Cervarix. Le groupe anglais construira de nouvelles infrastructures sur le site de sa filiale Stérilyo qui emploie déjà 125 salariés. “Plus de 300 emplois devraient être créés d’ici à 2009” a annoncé la direction. Un chiffre qui sera doublé à l’horizon 2011. Outre le Cervarix, GsK produira ses futurs vaccins contre la méningite et contre la grippe. D’ici cinq ans, plus de 300 millions de doses de vaccins seront produites chaque année à Saint Amand. Comme l’explique Christophe Weber, président de GSK France : “Le site nordiste sera l’une des unités de productions de vaccins les plus importantes pour GSK, avec Rixensart et Wavre en Belgique”. Cet investissement industriel est le plus gros réalisé dans la région depuis l’implantation de Toyota . www.lille-entreprise.com |
La future usine de vaccins sera notamment chargée de produire le Cervarix®, contre le cancer du col de l'utérus. Un produit presque unique en son genre puisqu'il est en concurrence directe avec le Gardasil® de Merck&Co. La bataille s'annonce rude entre les deux géants pharmaceutiques pour leurs probables blockbusters respectifs. Pourtant, GSK se montre serein. Le marché est malheureusement étendu : 200 millions de femmes en Europe et aux Etats-Unis sont concernées par la prévention de cette pathologie, qui est le 2e cancer le plus fréquent chez la femme et la 3e cause de mortalité des femmes par cancer. On compte 500 000 nouveaux cas chaque année, dont près de 3 400 en France et 1 000 décès. Face à ce fléau, GSK et Merck&Co « ne seront pas trop de deux, d'autant que nos produits sont différents », selon Jean-Pierre Garnier. « Nous prenons un risque industriel en construisant ce site mais c'est notre pain quotidien et nous verrons dans quelques années si nous avions raison ou tort. Cependant, rien n'a été décidé à la légère et je crains davantage le risque inverse, à savoir que la demande de Cervarix® ne soit pas maîtrisée. Et dans le scénario du pire, il reste un cran de sûreté ».http://www.pharmaceutiques.com/archive/une/art_987.html
Les objectifs des deux vaccins anti HPV
Le vaccin divalent de GSK arrivera en pharmacie courant 2008, alors que le vaccin tétravalent de Merck est déjà en vente depuis plusieurs mois: on peut légitimement se demander l'intérêt d'un vaccin divalent face à un vaccin tétravalent, mais l'efficacité du divalent est supérieure à celle du tétravalent selon certaines études, contre les sérotypes ciblés seulement.
Une quinzaine de génotypes HPV ont été mis en cause et un ou plusieurs de ces types viraux sont présents dans plus de 99% des cancers du col de l'utérus. Un vaccin monovalent est à rejeter.
Près de 50 à 60% de ces lésions contiennent le type 16 et 10 à 20% le type 18. C'est sur ces deux types que les recherches vaccinales ont porté. Les HPV 16 et 18 sont dits à haut risque.
Avec le vaccin bivalent 16-18, dont l'adjuvant est différent, après 3 injections selon un schéma 0-1-6 et au 7° mois, les anticorps sont 1000 fois supérieurs à ceux des sujets naïfs et 100 fois supérieurs à ceux de l'infection naturelle.
Avec le vaccin tétravalent 16-18-6-11, après 3 injections selon le schéma 0-2-6, le taux des anticorps, sur 45 mois de suivi, reste à un taux 8 fois supérieur à ceux de l'infection naturelle.
Le problème est déplacé: pourquoi un tétravalent au lieu d'un bivalent ?
Le vaccin tétravalent protège également contre les infections vaginales ou externes non cancéreuses: les types 6 et 11 sont impliqués dans le développement des condylomes génitaux. Les HPV 6 et 11 sont dits HPV à bas risque.
Remarque: la protection par des vaccins à base de VLP serait essentiellement spécifique d'un type viral donné mais certains auteurs rapportent, en particulier avec le vaccin bivalent, une immunisation croisée possibles avec les types viraux phylogénétiquement dépendants des types 16 et 18, que sont les HPV 45 et HPV 31. Si ces résultats sont confirmés, il est possible que l'efficacité du vaccin 16/18 atteigne 80% de l'ensemble des infections par des HPV à haut risque.
Les vaccins doivent être considérés comme permettant de réduire le risque de développement d'un cancer du col et non comme un vaccin anti-cancer du col.
Même dans l'hypothèse de l'immunisation de la totalité de la population, il est évident que la vaccination contre les 2 types à haut risque les plus fréquents ne peut remplacer le dépistage des lésions puisqu'un 1/4 des cancers environ seront toujours observés: c'est la combinaison vaccination-dépistage qui permettra un meilleur contrôle de ce cancer.
"En terme de santé publique, le succés d'un programme vaccinal sera perceptible à son acceptabilité, au degré d'implication des professionnels et au remboursement par l'Assurance Maladie.
Il n'y a pas d'informations à l'heure actuelle sur la persistance des anticorps au-delà de 5 ans. Un vaste programme d'éducation des patientes et de formation des soignants sera nécessaire.
La vaccination contre HPV 16 et 18 trouvera sa place comme complément au dépistage du cancer du col; la vaccination est un volet de sécurité supplémentaire en complément du dépistage traditionnel."
J MONSONEGO,
Institut Alfred Fournier, Paris
Réalités en gynécologie-Obstétrique, N°114, Octobre 2006
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