La vision des couleurs
Nommer la couleur perçue
Si, pour Paul Eluard, "la Terre est bleue comme une orange", nous avons dans la vie courante une caractérisation commune des couleurs des objets qui nous environnent, une orange est orange, et ces couleurs sont autant de codes communs (nous passons au vert, freinons au orange et stoppons au rouge.
D'un point de vue anthropologique, linguistique ou psychophysique, il est tout à fait possible de traiter la couleur d'une façon purement catégorielle, en assignant à chaque région de l'espace un des onze noms de couleur de base -rouge-jaune-vert-bleu-orange-brun-pourpre-rose-noir-blanc-gris, permettant de simplifier la dénomination dans la mesure ou un oeil humain entraîné est capable de distinguer environ 10 millions de couleurs de surfaces différentes dans la lumière du jour.
Cependant la question de savoir si cette terminologie est d'ordre culturelle et linguistique ou correspond à des caractéristiques physiologiques reste posée. En effet certains exemples tendent à montrer que le nom donné à une couleur perçue dépend du vocabulaire acquis pendant l'enfance.
Lorsqu'une équipe britannique a présenté à une tribu de chasseurs-cueilleurs de Papouasie Nouvelle-Guinée un nuancier de160 couleurs que nous classons en huit catégories (le marron, le rouge, le rose, l'orange, le jaune, le vert, le bleu et le violet) ceux-ci ont réparti ces couleurs selon cinq termes (map, mehi, kel, nol, wor). Après analyse du contenu sémentique, les chercheurs ont constaté que les frontières des couleurs des deux cultures ne se superposaient pas et, qu'en particulier, une couleur unique (le nol) aux yeux des Berinmos est perçue comme deux couleurs différentes par les Européens.
Percevoir la couleur : un processus en trois étapes
La perception des couleurs n'est pas qu'un problème de physique, outre les différences culturelles qui peuvent exister dans cette perception, il existe un deuxième phénomène qui va faire que le cerveau humain prendra pour identiques deux couleurs spectralement différentes (deux couleurs différentes physiquement mais donnant la même sensation visuelle sont dites métamères).
La perception de la couleur va, grossièrement, nécessiter trois phases successives, de natures différentes:
- une phase purement physique au cours de laquelle le rayonnement lumineux qui atteint notre oeil est produit
- une phase neurophysiologique de traitement du signal lumineux au niveau de la rétine et qui va faire intervenir deux étages, celui des photorécepteurs et celui des circuits rétiniens (c'est ici que deux spectres différents pourront être codés en deux messages identiques)
- une phase neurocognitive de transmission et d'analyse par le cerveau des signaux issus des cellules ganglionnaires de la rétine (c'est à ce niveau que la part culturelle sera importante dans cette interprétation)
Restituer la couleur dans une image
La perception humaine de la couleur est une réaction subjective qui peut être caractérisée en terme de luminosité, de teinte et de saturation. C'est ce que l'on nomme le codage HSL: pour Hue (teinte), Saturation et Luminance.
Ce type de codage est utilisé pour déterminer la couleur des pixels d'un écran au même titre que le codage R,V,B (rouge, vert, bleu).
La luminosité correspond à une sensation traduite par les vocables comme clair, foncé, lumineux, sombre, et représente le niveau lumineux d'un stimulus de couleur. Elle peut se caractériser par différentes grandeurs physiques: intensité, éclairement, luminance.
La teinte ou tonalité chromatique correspond aux dénominations telles que rouge, vert, bleu. Elle correspond à la longueur d'onde dominante d'une couleur, c'est à dire celle pour laquelle l'énergie correspondante est la plus élevée (le blanc, le noir ou les gris sont des teintes dites neutres ou achromatiques).
La saturation est une grandeur estimant le niveau de coloration d'une teinte, indépendamment de la luminosité. Elle représente la pureté de la couleur perçue comme vive, pâle ou terne.