Modalités d'élaboration des scénarios du RSSE
Les scénarios d'émission présentés dans le RSSE (Raport Spécial du GIEC sur les Scénarios d'Emission) donnent les évolutions possibles des émissions de gaz à effet de serre et des aérosols jusqu'en 2100. Ce sont des hypothèses concernant les évolutions démographiques, socio-économiques et les progrès technologiques qui ont permis de les élaborer. Leurs interactions respectives ont également été prises en compte.
Un processus complet et ouvert
L'élaboration des scénarios a impliqué un grand nombre de scientifiques de disciplines variées (50 personnes dans l'équipe de rédaction) provenant de 18 pays. Certains experts avaient déjà participé aux travaux précédents du GIEC. L'équipe était dirigé par Nabojka Nakicenovic de l'Institut International d'Analyse des Systèmes Appliqués (IIASA) en Autriche. Elle comportait des scientifiques travaillant sur 6 grands groupes de modélisation des scénarios qui sont présentés sur le site du SRES.
Le processus d'élaboration de ces scénarios a été ouvert: il n'était pas limité à une équipe de recherche. La communauté scientifique internationale a ainsi pu apporter sa contribution, en particulier grâce à l'existence du site du SRES.
La méthode employée
Après analyse des scénarios qui existaient déjà, quatre canevas différents ont été créés. Ils décrivent:
- les principales caractéristiques des scénarios,
- les relations entre les "forces motrices" qui conditionnent les émissions de gaz à effet de serre et leur évolution jusqu'en 2100.
Ils ont permis d'obtenir les valeurs des 40 scénarios. Celles ci différent d'un scénario à un autre. Toutefois les scénarios peuvent être regroupés en familles lorsqu'ils ont été établi sur le même canevas.
A noter que les scénarios ne comportent pas d'initiatives d'adaptation ou d'atténuation des changements climatiques. La convention cadre des nations unies sur les changements climatiques n'y est donc pas prise en compte). Le texte de cette convention est accessible en français sur le site de la convention cadre. Dans aucun des scénarios, le protocole de Kyoto (accessible également sur le même site) n'est respecté. Les émissions des gaz à effet de serre sont conditionnées par d'autres décisions en matière d'environnement, de démographie, d'économie, de social et de progrès technologique. Ce type de données a été pris en compte lors de l'élaboration des scénarios. Aucun effet rétroactif des changements climatiques à venir sur les émissions de la biosphère et de l'énergie n'a été intégré.
Les zone géographiques concernées
Les scénarios donnent des résultats pour quatre régions, construites sur des données économiques, ainsi que pour l'ensemble de la planète :
- OECD90 region (Organisation for Economic Co-operation and Development region), soit les pays de l'OCDE (organisation de coopération et de développement économiques) en 1990 ,
- REF region (countries undergoing economic reform), soit les pays soumis à des réformes économiques,
- ASIA region,
- ALM region (Africa and Latin America).
L'ensemble des pays constitutifs de ces différentes régions sont indiqués sur le SRES. La carte ci-dessous est extraite du cdrom Image2.2 développé par RIVM (Pays Bas): http://www.rivm.nl/
Une approche multimodèles permettant une évaluation des incertitudes
Dans le cas de chaque canevas, différents scénarios ont été obtenus avec plusieurs modèles et avec des hypothèses semblables constituant ainsi les 4 familles de scénarios. Cette "approche multimodèles" a permis d'obtenir une évaluation des incertitudes concernant les émissions futures de gaz à effet de serre liées aux spécificités des modèles et en relation avec les connaissances du moment concernant les "forces motrices". Différentes hypothèses ont également été étudiées. Dans chacune des familles, deux grands types de scénarios ont été élaborés:
- les uns basés sur des hypothèses semblables au niveau de l'évolution de la population mondiale, la croissance économique et l'utilisation finale de l'énergie. Ce sont les scénarios harmonisés (26 sur les 40). Ils sont dépendants les uns des autres et permettent d'étudier les incertitudes entres autres au niveau des modèles employés.
- les autres (les 14 restant) ont été créés sur des hypothèses différentes même s'ils appartiennent pour certains aux mêmes canevas et permettent ainsi d'étudier des incertitudes supplémentaires au niveau des "forces motrices" impliquées dans les émissions de gaz à effet de serre.
Les scénarios d'une même famille (A1, A2, B1 et B2) sont donc liés à des tendances générales au niveau démographique, social, économique et technologique qui sont semblables.
Dans la famille A1, la croissance est la plus rapide engendrant une rotation importante des capitaux. Avec des différences minimes dans les scénarios, cela peut engendrer des différences importantes en 2100. C'est également dans cette famille que l'évolution technologique est la plus forte. C'est pour ces raisons que c'est dans celle ci qu'ont été créés les 3 groupes différents sur l'utilisation de l'énergie: A1T, A1F1 et A1B. Les autres forces motrices ont alors été maintenues constantes.
Chacune des familles de scénarios comporte un scénario marqueur illustrant pour le mieux les canevas (4 au total). Ce sont nécessairement des scénarios harmonisés. Dans la famille A1, c'est un scénario du groupe A1B. Des scénarios A1T et A1F1 ont été choisis ensuite portant à 6 les scénarios de référence (un pour chaque groupe).
La figure ci-dessous présente la répartition des scénarios dans les différentes familles: scénarios harmonisés (SH) ou non (SO) et les scénarios de référence. Elle est extraite rapport SRES (résumé à l'intention des décideurs).
Conclusion
Les scénarios RSSE (ou SRES) tentent donc d'explorer les différentes voies possibles pour l'Homme avec éventuellement une diminution de l'écart des revenus entre pays développés et en voie de développement.
Le GIEC considère très improbable qu'un des scénarios corresponde un jour à la réalité, mais ils contribuent à évaluer les "forces" impliquées dans les émissions de gaz à effet de serre et les incertitudes fortes associées. Ils sont néanmoins subjectifs et critiquables, puisqu'un scénario peut être considéré de manière positive ou négative selon les points de vue. Ils ne sont pas à prendre comme des "recommandations de politique générale" et le GIEC ne leur attibue pas de probabitité.
Les scénarios du RSSE permettent également d'étudier au travers de modèles, l'évolution du climat et ses conséquences environnementales. Ils interviennent également dans l'expertise en terme d'atténuation et d'adaptation aux changements climatiques.