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Cas n°3 : héminégligence

Par jauzein — Dernière modification 15/04/2019 14:46

Auteur :: Françoise Jauzein

Bibliographie utilisée :
Thèse de Sonia Crottaz-Herbette, "Attention spatiale auditive et visuelle chez des patients héminégligents et des sujets normaux : étude clinique, comportementale et électrophysiologique", présentée en 2001 à la Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation de Genève.

Données biographiques

Symptômes ayant amené à consulter

La patiente dit se cogner parfois dans des objets et avoir de la difficulté à réaliser certains mouvements. A table on lui fait remarquer qu'elle ne mange qu'une partie de ce qui est dans son assiette.

Données personnelles

  1. Age: 43 ans

  2. Sexe: Féminin

  3. Poids et taille

Antécédents

  1. Médicaux: La patiente a eu un accident vasculaire cérébral il y a 30 semaines.

Données cliniques

Données macroscopiques

  1. Physiologie générale

    La patiente est droitière, son oeil directeur est l'oeil droit, elle a une acuité visuelle normale.

  2. Données comportementales

    Cette femme ne se maquille pas le côté gauche. Quand elle écrit, elle entasse les lignes dans le côté droit de la page. Par ailleurs, elle ne cherche pas l'information située sur sa gauche. Si on demande à cette patiente de poser sur l'image d'une horloge "vide" les chiffres qui lui sont fournis, elle ne positionne que ceux correspondant à la partie droite de l'horloge.

    HeminegDessin.gif

    Figure 1. Dessin de la patiente d'après modèle

    Dessin de la patiente d'après modèle

    Le dessin effectué par la patiente est incomplet. Il manque toute la partie gauche de la maison.

  3. Les hypothèses possibles du déficit sont la perte de perception d'une partie du champ visuel (hémianopsie), ici le champ visuel gauche, ou encore la perte de la capacité d'identifier les objets (agnosie).

    Le test suivant a permis de réaliser qu'il n'y a pas cécité d'une partie du champ visuel ni impossibilité à identifier une catégorie de stimulus. Deux images d'une même maison dont une était en feu, ont été présentées à la patiente, à qui on a demandé dans laquelle elle préfèrerait vivre. La patiente a toujours désigné la maison intacte, quelle que soit la disposition des images dans son champ visuel, et a également toujours soutenu que les deux maisons étaient identiques.

  4. Imagerie

    Une IRM a été faite, elle a permis de localiser la lésion cérébrale consécutive à l'accident vasculaire.

    IRMhemineg.jpg

    Figure 2. IRM de la patiente

    IRM de la patiente

    L'IRM de la patiente montre une lésion de l'hémisphère droit, localisée dans la région temporo-pariétale de cet hémisphère. Il s'agit d'un accident vasculaire cérébral ischémique sylvien droit.

Données cellulaires

Une étude électrophysiologique a été pratiquée. Elle a consisté à enregistrer les potentiels évoqués visuels de cette patiente lors de stimulations visuelles.

DisposStimuVisuel.jpg

Figure 3. Dispositif de stimulation visuelle

Dispositif de stimulation visuelle

Une diode électroluminescente rouge, de faible intensité, est placée face au sujet et lui sert de point de fixation. Quatre diodes de forte intensité (distantes du sujet de 80 cm) s'allument successivement au hasard pendant 80 ms, à un intervalle de temps variant entre 1000 et 2000 ms.

Les potentiels évoqués visuels obtenus chez cette patiente ont été comparés avec ceux d'un témoin.

HeminegPotEvoq.gif

Figure 4. PEV d'un témoin et de la patiente au cours de la tâche d'attention visuelle

PEV d'un témoin et de la patiente au cours de la tâche d'attention visuelle

La composante P300 (apparaissant environ 300 ms après la stimulation) décelable dans la région pariéto-centrale est négative chez la patiente comme chez le témoin.
Cependant, elle présente une très forte diminution de son amplitude chez la patiente.

Cette étude électrophysiologique montre que l'atteinte de la patiente correspond à la perte d'une fonction physiologique cérébrale, et non d'une fonction purement sensorielle. Le côté de l'espace négligé par la patiente est opposé à celui de la lésion.

La localisation de cette atteinte au cortex pariétal droit, peut être confrontée à la localisation par une IRMf des zones activées dans deux types de tâches de détection visuo-spatiale, active, comme une recherche de cible (vb), ou passive, comme un simple comptage des stimulations (vc).

 

TachVisuG.jpg

Figure 5. Zones anatomiques activées (hémisphère gauche) dans une tâche de repérage visuo-spatial

Zones anatomiques activées (hémisphère gauche) dans une tache de repérage visuo-spatial

Cartes en 3D du signal Bold pour des taches visuelles impliquant une recherche de cible (vb = visual stimulation button-press) ou un simple comptage des stimulations (vc = visual counting). Etude sur un seul individu.


TachVisuD.jpg

Figure 6. Zones anatomiques activées (hémisphère droit) dans une tâche de repérage visuo-spatial

Zones anatomiques activées (hémisphère droite) dans une tache de repérage visuo-spatial

On note une activation du cortex pariétal dans les deux tâches visuelles, avec une augmentation du signal pour les conditions de recherche de cible (par rapport aux conditions passives de détection visuelle) au niveau du cortex pariétal droit (gyrus supra-marginal en particulier)

Cette patiente souffre d'une héminégligence, c'est à dire d'un déficit latéralisé de la connaissance de l'espace qui entraîne une difficulté à rendre compte, à réagir et à s'orienter vers des stimulis présentés dans l'espace controlatéral à la lésion.

Le trouble fondamental de cette pathologie est un déficit de l'exploration visuelle. La zone pariétale droite du cortex est impliquée dans l'attention visuelle contrôlée, c'est cette zone qui est lésée chez cette patiente, et ceci, à la suite d'un accident vasculaire cérébral.

Evolution

La rééducation classique tente de compenser ce déficit en "rééduquant" les mécanismes d'orientation volontaire et contrôlée de l'attention.

La généralisation des progrès observés en situation de rééducation est faible et problématique. Le diagnostic actuel est encore varisemblablement incomplet, ce qui justifie les études menées sur ce type de pathologies.