Accord de Paris sur le climat : décryptage
Depot des engagements nationaux de chaque pays sur le site de l'UNFCC
Quelques semaines avant la COP21 à Paris, l'ONU a publié un bilan des engagements des États qui évalue l’effet agrégé des contributions nationales (INDCs = Intended Nationaly Determined Contributions). L’analyse, comme d’autres avant elle, confirme que ces contributions sont un premier pas très important, mais insuffisant pour respecter les engagements du Traité de Paris de limiter le réchauffement planétaire à moins 2°C d’ici la fin du 21e siècle. Au regard de l’urgence climatique, tous les États devront revoir leur copie avant 2018 et de préférence dès la Cop22 en novembre 2016 à Marrakech pour traiter les questions d'économie, d'emplois, de santé des populations. L'ONU, relayé par les médias et les analystes de la Cop appellent toutes les parties à prendre des mesures concrètes pour respecter le Traité de Paris les fondations d’un cadre international durable, qui permette de faire évoluer ces contributions nationales pour atteindre l'objectif climat tracé par Kyoto.
Les pays doivent placer 3 ingrédients absolument indispensables dans l’accord de Paris :
- un cap mondial sur la sortie des énergies fossiles d’ici à 2050, comme l’indiquent les données scientifiques
- un mécanisme de fonctionnement solide pour s’assurer que les Etats revoient leurs engagements et les augmentent tous les 5 ans jusqu’à atteindre les objectifs de limiter à 2°C le réchauffement de la planète
- la garantie d’un soutien financier et technologique international accru, notamment pour financer la part des engagements des pays en développement qui est dépendante d’une aide extérieure.
Les éléments de l'accord de Paris
A l'issue des négociations de Paris, et des intersessions qui les ont précédées, tous les analystes sont d'accord pour dire que l’enjeu est de construire les fondations d’un cadre international durable qui permette d'ajuster régulièrement les contributions nationales, aujourd'hui insuffisantes, pour éviter le pire de l'emballement climatique.
Au total, 162 INDCs ont été soumis représentant 189 pays dont l'Union européenne. Ces derniers ont élaboré un traité censé empêcher notre planète de se réchauffer de plus de 2°C. C'est l'objectif numéro un partagé par les signataires, avec un idéal à 1,5°C qui préserverait les États insulaires et les pays déjà très impactés par les aléas climatiques. La société civile peut aujourd'hui exiger que cet objectif soit tenu. Le traité de Paris vise la neutralité carbone en 2050. Cela veut dire qu'après cette date, tous les pays devront stocker ou compenser leurs émissions réchauffantes, par exemple en plantant des arbres. Tous les cinq ans, les pays signataires devront revoir leurs promesses, à chaque fois plus ambitieuses que les précédentes. Ces promesses sont contraignantes sur le papier. En réalité, la communauté internationale n'a pas les moyens d'obliger tel ou tel pays à respecter ses engagements. Elle doit donc se doter d'instances indépendantes, de mesures et d'actions pour vérifier que les promesses de réduction des GES sont bien mises en œuvre. Le traité de Paris ne parle pas clairement des énergies renouvelables. Or les énergies carbonées sont au cœur de notre civilisation et les premières responsables des émissions des GES. Réduire les émissions de GES, c'est utiliser moins d'énergies carbonées et aller vers une transition énergétique qui parie sur les renouvelables. Le traité stipule que l'aide au financement des pays du Sud par les pays du Nord (100 milliards de dollars par an) sera respectée jusqu'en 2025. L'enjeu est aujourd'hui de garantir la poursuite de cet effort.
"Les pays doivent donc placer 3 ingrédients absolument indispensables pour ratifier l’accord de Paris : Un cap mondial sur la sortie des énergies fossiles d’ici à 2050, comme l’indiquent les données scientifiques; Un mécanisme solide pour s’assurer que les Etats revoient leurs engagements et les augmentent tous les 5 ans jusqu’à atteindre les objectifs de limiter à 2°C le réchauffement de la planète; La garantie d’un soutien financier et technologique international accru, notamment pour financer la part des engagements des pays en développement qui est dépendante d’une aide extérieure."
Pour aller plus loin
- Première ébauche du nouvel accord sur les changements climatiques présenté aux gouvernements à Bonn le 5 octobre 2015.
- Le brouillon de l'accord de Paris commenté par le Réseau Action climat France.
- Le financement climat de Lima.
- Accord de Paris et actualités 2016 : cet espace commente le texte signé à Paris le 12 décembre 2015 et renferme des informations et des données qui sont produites depuis la tenue de la Cop21 à Paris . Elles peuvent servir de mise en contexte pour le travail pédagogique de la classe qui souhaite organiser une simulation.
- Mediaterre : pour suivre les événements internationaux en temps réel et en français et les actualités du monde sur le climat.
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Le contexte des négociations en 2015 et les enjeux majeurs de la COP21... Cop22... et après
La France a accueilli, du 30 novembre au 11 décembre 2015, la 21ème Conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). La COP21 s'est tenue à Paris et au Bourget. Plus de 40 000 participants sont venus, dont les délégations des 195 États, la société civile – les entreprises, les ONG, les scientifiques, les collectivités territoriales, les populations autochtones, les syndicats – et les médias du monde entier.
Cette convention universelle, principal traité international sur le climat, reconnaît l’existence d’un changement climatique d’origine humaine et donne aux pays industrialisés le primat de la responsabilité pour lutter contre ce phénomène. Elle a été adoptée au cours du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro le 9 mai 1992, avant d’entrer en vigueur le 21 mars 1994. Elle a été ratifiée par 195 États (auxquels il faut ajouter l’Union européenne), parties prenantes à la Convention.
La 3ème COP a permis l’adoption du Protocole de Kyoto, le premier traité international juridiquement contraignant visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Signé en 1997 et entré en vigueur en 2005, ce traité ne concerne que 55 pays industrialisés, représentant 55 % des émissions globales de CO2 en 1990. Le protocole visait alors à réduire d’au moins 5 % leurs émissions de six gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane, protoxyde d’azote et trois substituts des chlorofluorocarbures), entre 2008 et 2012, par rapport au niveau de 1990. Si certains États ont respecté leurs engagements (comme l’Union européenne), les gros pollueurs n’ont pas rempli leurs objectifs : les États-Unis ne l’ont jamais ratifié, le Canada et la Russie se sont retirés et la Chine, devenue le premier émetteur mondial de gaz à effet de serre, n’est pas concernée par Kyoto. Pour toutes ces raisons, le protocole de Kyoto est obsolète. Il expire en 2020 et doit être remplacé par un nouveau texte : enjeu majeur de la COP21.
En effet, depuis 2009, les COP (Copenhague, Durban, Doha, Varsovie et Lima) ont toutes échoué à renégocier cet accord international sur le climat qui engage tous les pays signataires.
L’objectif principal de la COP21, appelé objectif d’atténuation, est donc celui de conclure le premier accord universel et contraignant, applicable à partir de 2020 aux 195 pays pour limiter la hausse des températures à 2°C par rapport à l’ère pré-industrielle. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estime que la température à la surface de la Terre a déjà augmenté de 0,85 °C en moyenne depuis 1880 et devrait continuer à croître de 0,3 à 4,8 °C d’ici à 2100 si l’évolution des émissions de gaz à effet de serre reste sur la même trajectoire. Pour rester dans le scénario d’un réchauffement à 2°C, il faut atteindre, selon le GIEC, la neutralité carbone au plus tard à la fin du siècle. Il faut également que la quantité accumulée d’émissions de CO2 d’origine humaine n’excède pas 800 gigatonnes de carbone. Or, depuis 1870, les hommes ont déjà relâché 531 gigatonnes de carbone dans l’atmosphère.
Fin octobre 2015, date limite des dépôts, 160 États ont envoyé à la CCNUCC leurs promesses d'engagement en matière de réduction d’émissions de GES (soit environ 90% des émissions globale de GES), ce qui est un premier plébiscite de la Cop21. La plupart des contributions semblent sérieuses selon les analystes, même si les intentions des États sont globalement insuffisantes pour atteindre l'objectif de +2°C. Les niveaux d'ambition sont très divers et les États gardent toute latitude pour fixer les moyens d'y parvenir et pour déterminer une année de référence (2025 ou 2030) (voir le paragraphe ci-dessous sur l'analyse des contributions des pays).
Mais le plus dur reste à faire pour que ces promesses se traduisent par des faits : l'accord de Paris doit définir une politique climatique équitable qui repose sur la recherche d’une convergence mondiale vers des émissions compatibles avec la stabilisation du climat, soit 2 tonnes de gaz à effet de serre par habitant et par an. En 2015, les États-Unis d’Amérique en sont à 16 tonnes, la Chine à 5, l’Inde à 1,7, l’Éthiopie à 0,1. Les instruments de politique économique – taxes, marchés – comme les outils réglementaires ne peuvent donc être identiques partout, puisque les situations sont radicalement différentes entre les pays. Notons que les pays producteurs de pétrole et gros émetteurs (Arabie saoudite, Qatar, Venezuela, Iran, Oman, Nigeria, EAU) n'ont pas rendu de contribution. Ces derniers maintiennent un prix bas des hydrocarbures, ce qui n'engage pas à la sobriété et à la transition énergétique.
L'accord de Paris fixe un second objectif : celui du financement de l'adaptation aux conséquences du changement climatique. Là encore, c'est un bon point pour Paris, car ce thème présent dans le Protocole de Kyoto avait disparu des débats ces dernières années. Ce sont des ambitions en termes de transition vers les énergies renouvelables et des promesses d'aide au développement des pays du Sud pour lutter contre les effets du changement climatique (adaptation). En 2010 à Cancun, dans le cadre de la CCNUCC et lors de la COP17 à Durban en 2011, les pays développés s’étaient engagés à mobiliser ensemble 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 sur fonds publics et privés en faveur des pays en développement pour lutter contre le dérèglement climatique et s’engager dans un développement durable. Le nouveau rapport rendu début octobre 2015 par l'OCDE et Climate Policy Initiative donne une estimation actualisée de ces financements publics et privés. Selon le rapport, ils affichent une moyenne de 57 milliards de dollars (environ 50 milliards d’euros) par an sur la période 2013-2014. A Lima, seuls 10 milliards de dollars ont été garantis entre 2015 et 2018. Une partie de ces montants promis par les États donateurs doit transiter par le Fonds vert pour le climat, un mécanisme financier créé par l’ONU.
Un autre enjeu de la COP21 : le thème de la réduction des subventions aux énergies fossiles ré-émerge. L’AIE (Agence internationale pour l’Énergie) estime qu’en 2013 les subventions aux fossiles représentaient dans le monde plus de 500 milliards de dollars. La réduction de ces subventions favoriserait l’efficacité énergétique et permettrait de financer les investissements nécessaires au développement des énergies décarbonées.
- Le rapport du New Climate economy du 9 octobre 2015 met la tarification carbone sur la table des négociations...
- Rapport accompagnant l'inventaire OCDE des mesures de soutien pour les combustibles fossiles
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Enfin, pour espérer conclure un accord solide, au delà des négociations de Paris 2015, les négociateurs devront également convaincre les États réticents à Kyoto de dépasser la question de la responsabilité historique des États industrialisés dans le réchauffement de la planète et de revoir la répartition des efforts à accomplir entre pays industrialisés et émergents car la classification des pays de la CCNUCC n’est plus opérante.
Les analystes (Novethic, World Research Institute, Climate interactive, Fondation Nicolas Hulot, Climate Action Tracker, voir ci-après) étudient la hauteur des engagements déclarés pour déterminer si l’éventuel accord permettra de rester sous les 2°C d’augmentation moyenne de la température à la surface du globe d’ici à 2100. Pour ces analystes, la tâche est complexe. Il est en effet difficile de comparer les engagements de réduction de GES entre eux car, avant une éventuelle uniformisation lors de la COP21, chaque État détermine une « date référence » à partir de laquelle il met en place ses mesures de réduction et la compare avec une date BAU (= business as usual). Or, ces dates devraient être 2030 par rapport à 1990, selon Kyoto. Certains pays chiffrent leurs émissions par habitants plutôt qu'en données globales, d'autres comptabilisent les forêts (puits de carbone) et/ou ont recours au marché carbone pour compenser les hausses d’émissions domestiques.
Synthèse sur l'accord de Paris
L’accord de Paris et la décision qui le précède ont été adoptés samedi 12 décembre 2015 vers 19h30 au Bourget par les délégués des 196 parties à la convention climat présentes, selon le principe du consensus. Le document final contient une décision, contraignante, qui décide d’adopter l’accord de Paris juridiquement contraignant et universel. L’accord de Paris devrait entrer en vigueur en 2020 et prendre la suite du protocole de Kyoto.
Le texte de l'accord de Paris du 12 décembre 2015 (version française).
De nombreuses analyses ont été produites depuis les accords de Paris. Ci-après, vous trouverez quelques unes d'entre elles :
- Un dossier Spécial Cop21 par The Conversation, un media universitaire en ligne
- Le détail des dispositions de l’accord et de la décision de Paris sur le climat est proposé par l'Aef. Claire Avignon, Aline Brachet pointent les principaux éléments du texte sur l’objectif mondial de réchauffement, les moyens d’atténuation, d’adaptation, le financement, la transparence, la différenciation et l’entrée en vigueur de l’accord.
Préambule. Le préambule, non contraignant, rappelle les objectifs de la convention et notamment "le principe de l’équité et des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives, eu égard aux contextes nationaux différents". Il reconnaît "les besoins spécifiques et la situation particulière des pays en développement", notamment "particulièrement vulnérables" et "les besoins spécifiques" et la "situation particulière" des pays les moins avancés en matière de financements et de transfert de technologies. Plusieurs références, réclamées par certains pays, les associations environnementales et les syndicats, y sont mentionnées : la "justice climatique", "l’élimination de la pauvreté", la protection de la "sécurité alimentaire", "la transition juste pour la population active" et la "création d’emplois décents et de qualité". Il reconnaît "les droits de l’homme, le droit à la santé, les droits des peuples autochtones, des communautés locales, des migrants, des enfants" mais aussi "l’égalité des sexes". Il fait une place à "l’intégrité de tous les écosystèmes, y compris les océans, et à la protection de la biodiversité".
Objectif (article 2). L’accord inscrit le fait de "conten[ir] l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et en poursuivant l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels", une cible souhaitée par les petits États insulaires et pays les moins avancés, les plus vulnérables.
Réduction des émissions (article 4). Les parties s’engagent à un "plafonnement mondial des émissions de gaz à effet de serre dans les meilleurs délais, étant entendu que le plafonnement prendra davantage de temps pour les pays en développement parties, et à opérer des réductions rapidement par la suite conformément aux meilleures données scientifiques disponibles de façon à parvenir à un équilibre entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre au cours de la deuxième moitié du siècle". La référence à une "neutralité en gaz à effet de serre" ou à un objectif chiffré, présente dans les versions précédentes de l’accord, a disparu. L'article 4 souligne qu’il faudra «parvenir à un équilibre entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre au cours de la seconde moitié du siècle». Dit autrement, la décarbonation massive de notre système énergétique ne suffira pas pour stabiliser le réchauffement. L’humanité devra aussi recourir à des moyens (la forêt) et des techniques (à développer) pour réduire sensiblement la concentration de gaz carbonique dans l’atmosphère en quelques décennies. Concernant les contributions nationales, chaque pays "établit, communique et actualise les contributions déterminées au niveau national successives qu’elle prévoit de réaliser", "tous les 5 ans", et prend "des mesures internes pour l’atténuation en vue de réaliser les objectifs desdites contributions", soit un objectif de mise en œuvre et de résultat. Chaque contribution "représente une progression" par rapport à la précédente et "correspondra à son niveau d’ambition le plus élevé possible", selon le principe de l’équité. Les modalités précises sur les contributions nationales sont précisées dans la décision (voir l’encadré ci-dessous). Les pays développés "devraient continuer" de "montrer la voie en assumant des objectifs de réduction des émissions en chiffres absolus à l’échelle de l’économie". Les pays en développement "devraient continuer d’accroître leurs efforts d’atténuation, et sont encouragés à passer progressivement à des objectifs de réduction ou de limitation des émissions à l’échelle de l’économie eu égard aux contextes nationaux différents". Dans la version présentée mais modifiée juste avant l'adoption, le terme "shall" avait été utilisé pour les pays développés, plus fort que "should" pour les pays en développement, mais les États-Unis ont refusé cette différenciation par crainte que cela n'oblige à faire ratifier l'accord par le Congrès.
Par ailleurs, un "appui" aux pays en développement dans ce but est inscrit à cet article. Les spécificités des pays les moins développés et des petits États insulaires sont reconnues.
Des éléments sur l’action pour préserver les puits d’émissions, dont les forêts sont précisés à l’article 5.
Selon l’article 6, une partie des réductions d’émissions peut être réalisée via "des démarches concertées, incluant "l’utilisation de résultats d’atténuation transférés au niveau international", tout en "garantiss[a]nt l’intégrité environnementale et la transparence". Un mécanisme est créé "pour contribuer à l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre et promouvoir le développement durable", ouvrant la voie à des mécanismes de flexibilité ultérieurement.
Les INDCs et l’atténuation dans la décision La seconde partie de la décision porte sur les INDC. Il est noté "avec préoccupation" que les niveaux d’émission de gaz à effet de serre résultant de ces contributions nationales (au nombre de 187 à ce jour) ne permet pas d’atteindre l’objectif de limiter le réchauffement sous les 2 °C. Le niveau projeté est de "55 gigatonnes" en 2030. "Des efforts de réduction des émissions beaucoup plus importants que ceux associés aux [INDC] seront nécessaires pour contenir l’élévation de la température de la planète en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels en ramenant les émissions à 40 gigatonnes ou en dessous de 1,5 °C".
La décision propose également d' "organiser un dialogue de facilitation entre les parties pour faire le point en 2018 des efforts collectifs déployés par les parties en vue d’atteindre l’objectif à long terme". Le volet sur les INDC invite enfin le Giec à fournir un rapport spécial en 2018 "pour faire le point en 2018 sur les conséquences d’un réchauffement planétaire supérieur à 1,5 °C" et sur "les profils connexes d’évolution des émissions mondiales de gaz à effet de serre". Les parties qui n’ont pas encore communiqué leur INDC sont invitées à le faire au plus tard au moment où elles présentent leur instrument de ratification. La décision "engage" les parties qui ont déjà présenté un INDC (à horizon 2025 ou 2030) à communiquer une nouvelle contribution "d’ici à 2020", puis "tous les 5 ans".
Le groupe de travail spécial de l’accord de Paris développera des "directives" sur les INDC, qui seront adoptées à la première session de la réunion des parties à l’accord de Paris. Les INDC présentés cette année n’ont répondu à aucun formalisme, ce qui a empêché, en partie, de les comparer. Pour faciliter la "clarté", la "transparence" et la "compréhension", les informations "peuvent inclure" un "point de référence" ("y compris s’il y a lieu une année de référence"), des calendriers, etc. Les directives devront notamment faire en sorte d’éviter le "double comptage" des émissions.
La décision "invite" en outre les parties à communiquer d’ici 2020 une "stratégie de développement à faible émission de gaz à effet de serre à long terme pour le milieu du siècle". Il "recommande" d’adopter des règles pour les différents mécanismes et programme de travail de l’article 6 de l’accord sur l’atténuation.
Adaptation (article 7). Les pays "établissent l’objectif mondial en matière d’adaptation consistant à renforcer les capacités d’adaptation, à accroître la résilience aux changements climatiques et à réduire la vulnérabilité à ces changements" et "reconnaissent que l’adaptation est un problème mondial qui se pose à tous". Ils "reconnaissent que l’adaptation, à l’heure actuelle et dans une large mesure, est une nécessité, que des niveaux d’atténuation plus élevés peuvent rendre moins nécessaires des efforts supplémentaires dans le domaine de l’adaptation, et que des niveaux d’adaptation plus élevés peuvent supposer des coûts d’adaptation plus importants". Chaque partie "entreprend, selon qu’il convient, des processus de planification de l’adaptation et met en œuvre des mesures qui consistent notamment à mettre en place ou à renforcer des plans, politiques et/ou contributions utiles". L’adaptation dans la décision : Il est demandé au comité de l’adaptation d’examiner en 2017 les "activités des dispositifs institutionnels" relatifs à ce sujet afin d’améliorer leur "cohérence" et "d’étudier des méthodes pour évaluer les besoins d’adaptation en vue d’aider les pays en développement sans leur imposer une charge excessive".
Pertes et préjudices (article 8). "Les parties reconnaissent la nécessité d’éviter et de réduire au minimum les pertes et préjudices liés aux effets néfastes des changements climatiques, notamment les phénomènes météorologiques extrêmes et les phénomènes qui se manifestent lentement, et d’y remédier." Il est fait référence au mécanisme de Varsovie, créé à la COP 2013, qui rendra ses travaux à la COP 22 de Marrakech. Les parties "devraient améliorer la compréhension, l’action et l’appui, notamment par le biais du mécanisme international de Varsovie, selon que de besoin, dans le cadre de la coopération et de la facilitation, eu égard aux pertes et préjudices liés aux effets néfastes des changements climatiques". L’article cite une liste d’actions dans ce but : la mise en place de "systèmes d’alerte précoce", "la préparation aux situations d’urgence", des "dispositifs d’assurance dommages, la mutualisation des risques climatiques et les autres solutions en matière d’assurance"… Les pertes et préjudices dans la décision : Le texte décide de poursuivre le mécanisme de Varsovie sur les pertes et préjudices après l’examen déjà décidé de 2016. Il demande que soit établi un "centre d’échange d’informations sur le transfert de risque", "qui puisse servir de source centrale de données sur l’assurance et le transfert des risques de façon à faciliter les efforts déployés par les parties pour mettre au point et appliquer des stratégies globales de gestion des risques" ; ainsi qu’une "équipe spéciale" pour élaborer des recommandations pour des "démarches intégrées propres à prévenir et réduire les déplacements de population liés aux effets néfastes des changements climatiques et à y faire face". Il est précisé dans le dernier paragraphe : "L’article 8 de l’accord ne peut donner lieu ni servir de fondement à aucune responsabilité ni indemnisation." Et ce pour répondre aux craintes de plusieurs délégations de pays riches, notamment l’américaine.
Financements (article 9). Cet article contient les grands principes concernant les financements climat, qui sont précisés dans la décision (paragraphe 54) et détaille le principe de différenciation sur ce sujet. Ainsi, "les pays développés fournissent des ressources financières pour venir en aide aux pays en développement parties aux fins tant de l’atténuation que de l’adaptation". "Les autres parties sont invitées à fournir ou à continuer de fournir ce type d’appui à titre volontaire". "Dans le cadre d’un effort mondial, les pays développés parties devraient continuer de montrer la voie en mobilisant des moyens de financement de l’action climatique provenant d’un large éventail de sources, d’instruments et de filière", sachant que "cette mobilisation de moyens de financement de l’action climatique devrait représenter une progression par rapport aux efforts antérieurs". Les paragraphes suivants précisent que les fonds mobilisés doivent parvenir à un "équilibre entre l’adaptation et l’atténuation", et soulignent "la nécessité de prévoir des ressources d’origine publique et sous forme de dons pour l’adaptation". Les pays développés "communiquent tous les deux ans des informations quantitatives et qualitatives à caractère incitatif" notamment "sur les niveaux de ressources publiques prévues" ; les pays en développement sont "invités" à communiquer ces informations sur ce sujet "à titre volontaire". Aucun objectif chiffré n’est présent dans l’accord mais dans la décision (lire l’encadré ci-dessous). Les financements dans la décision : Selon la décision, les pays développés "entendent poursuivre leur objectif collectif de mobilisation jusqu’en 2025", et qu’avant cette date soit fixé un "un nouvel objectif chiffré collectif à partir d’un niveau plancher de 100 milliards de dollars par an, en tenant compte des besoins et des priorités des pays en développement". Plusieurs acteurs des négociations ont indiqué ces derniers jours que les États-Unis refusaient que le montant de 100 milliards, très important pour les pays en développement, soient dans l’accord de Paris, car cela signifierait une ratification par le Congrès, hautement improbable. Les paragraphes de la décision sur les financements évoquent également l’importance d’avoir des "ressources financières adéquates et prévisibles", et la création à la COP 22 d’un processus pour identifier les informations que devront fournir les parties afin d’aboutir à une "recommandation" à adopter à la première réunion des parties à l’accord de Paris. Il est demandé à l’Organe subsidiaire de conseil scientifique et technologique de la Ccnucc (SBSTA) d’élaborer des modalités de comptabilisation des ressources financières fournies et mobilisées au travers d’interventions publiques. L’objectif est d’adopter une recommandation à la première réunion des parties à l’accord de Paris. Ce travail fait récemment par l’OCDE a été critiqué par les pays en développement qui lui reprochent une méthodologie trop favorable aux pays développés (lire sur AEF).
Moyens de mise en œuvre. Les articles 10, 11, 12 de l’accord traitent des transferts de technologies, de renforcement de compétences et d’éducation. Les pays "partagent une vision à long terme de l’importance qu’il y a à donner pleinement effet à la mise au point et au transfert de technologies", à la fois sur la résilience et l’atténuation. "Un appui, financier notamment, est fourni aux pays en développement parties aux fins de l’application du présent article." Les moyens de mise en œuvre dans la décision :
Transfert de technologies. La décision décide de "renforcer le mécanisme technologique" et de demander au SBSTA d’élaborer un "cadre technologique" établi à l’article 10 de l’accord.
Renforcement de capacité. La décision crée le "comité de Paris sur le renforcement des capacités", "qui sera chargé de remédier aux lacunes et de répondre aux besoins, actuels et nouveaux, liés à l’exécution d’activités de renforcement des capacités dans les pays en développement parties et d’intensifier encore les efforts de renforcement des capacités". Ce comité devra établir un "plan de travail pour la période 2016-2020". Il devra en outre se concentrer chaque année sur un sujet particulier "afin de mettre à jour les connaissances sur les succès obtenus et les problèmes rencontrés dans le développement efficace des capacités dans un domaine particulier". Un premier bilan du comité de Paris aura lieu à la COP 25, en novembre 2019.
Transparence (article 13). Un cadre de transparence est créé, "afin de renforcer la confiance mutuelle et de promouvoir une mise en œuvre efficace", notamment sur la mise en œuvre des contributions nationales et sur les financements. Ainsi, "chaque partie fournit régulièrement" un "rapport national d’inventaires des émissions" et "les informations nécessaires au suivi des progrès accomplis" dans la réalisation des contributions nationales, ce qui revêt un caractère obligatoire. Par ailleurs, les pays sont simplement encouragés ("devraient communiquer") à donner des informations sur "les impacts du changement climatique et sur l’adaptation." Les informations précédentes seront soumises à "une examen technique par des experts". Pour les pays en développement, cette revue "devra inclure une assistance en identifiant les renforcements de capacités nécessaires". Le processus d’examen "les aide à définir leurs besoins en matière de renforcement des capacités". Cette revue devra se faire selon le principe de la "flexibilité" et en tenant compte des "capacités et situations nationales respectives des pays en développement parties". La transparence dans la décision La décision établit une "initiative de renforcement des capacités pour la transparence" dans le but de "développer les capacités institutionnelles et techniques avant 2020 et après cette date" à la fois avant et après 2020 dans les pays en développement. Cette initiative sera soutenue par le Fonds pour l’environnement mondial. La décision précise que dans le cadre de la mise en œuvre de l’article 13, il est fait preuve de "flexibilité" pour les pays en développement, notamment en ce qui concerne le champ, la fréquence et le niveau de détail de notification et dans l’étendue de la révision. Les informations requises à l’article 13 devront être présentées au moins tous les deux ans, excepté pour les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement qui le feront "comme ils le jugent bon".
Bilan mondial (article 14). Un premier "bilan mondial" aura lieu en 2023 puis "tous les 5 ans par la suite sauf si [la COP] adopte une décision contraire". Il s’agit d’un "bilan de la mise en œuvre du présent accord afin d’évaluer les progrès collectifs accomplis dans la réalisation de l’objet du présent accord et de ses buts à long terme". Le bilan mondial dans la décision
La première session de la réunion des parties à l’accord de Paris devra notamment se prononcer sur "l’effet global" des INDC et les rapports les plus récents du Giec. Le SBSTA devra fournir des conseils sur la manière dont les évaluations du Giec peuvent informer le bilan mondial des émissions sur la mise en œuvre de l’accord. Le groupe de travail spécial sur l’accord de Paris devra développer des modalités pour ce bilan mondial.
Conformité. Un mécanisme "pour faciliter la mise en œuvre et promouvoir le respect des dispositions du présent accord et en promouvoir le respect" est créé à l’article 15. Ce mécanisme est constitué d’un "comité d’experts" qui "fonctionne d’une manière qui est transparente, non accusatoire et non punitive". La conformité dans la décision Le comité en question est composé de 12 membres avec des compétences reconnues dans les domaines scientifiques, techniques, socio-économiques et juridiques, élus à la réunion des parties à l’accord de Paris, "sur la base d’une représentation géographique équitable", avec deux membres pour chacune des 5 groupes régionaux de l’ONU (1), un membre des petites îles en développement, un membre des pays les moins développés, en prenant en compte l’objectif d’égalité des sexes.
Entrée en vigueur. L’accord sera ouvert à signature à compter du 22 avril 2016, pour une durée d’un an. Il entrera en vigueur après que 55 pays représentant au moins 55 % des émissions mondiales l’auront ratifié. La décision invite Ban Ki-moon à organiser une "cérémonie de signature de haut niveau" le 22 avril 2017. Elle crée un "groupe de travail ad hoc" sur l’accord de Paris dont la première session se tiendra en 2016. L’accord n’entrera en vigueur qu’en 2020 et remplacera le protocole de Kyoto. L’avant-2020, seulement présent dans la décision La décision est la seule à évoquer l’avant-2020, puisque cela concerne la période avant l’application de l’accord de Paris. Ce volet est extrêmement important selon les ONG, car sans efforts supplémentaires de 2016 à 2020, il sera extrêmement difficile pour les parties de satisfaire à la trajectoire limitant le réchauffement à 2°C (encore plus pour l’objectif de 1,5°C). La COP "décide de faire en sorte que les efforts d’atténuation soient portés au plus haut niveau possible avant 2020". Pour cela, notamment, les parties au protocole de Kyoto qui ne l’ont pas fait sont exhortées à ratifier et mettre en œuvre l’amendement de Doha sur la période 2013-2020 et les parties à la COP qui ne l’ont pas fait de prendre et mettre en œuvre un engagement d’atténuation, en application des accords de Cancun. La COP décide de renforcer la mise à disposition par les pays développés de finances, de technologies et de renforcement de capacité. Elle "demande fermement aux pays développés d’amplifier leur aide financière, en suivant une feuille de route concrète afin d’atteindre l’objectif consistant à dégager ensemble 100 milliards de dollars". Un "dialogue de facilitation" sera organisé conjointement à la COP 22 pour identifier les opportunités permettant de renforcer ces ressources financières.
Ce volet de la décision évoque aussi l’agenda des solutions, ou l’agenda Lima-Paris pour le climat, en saluant les efforts des acteurs non-étatiques et en encourageant les parties à "œuvrer étroitement" avec eux pour "catalyser les efforts" afin de renforcer l’atténuation et l’adaptation. Un "événement de haut niveau" sera organisé chaque année de 2016 à 2020 à l’occasion des COP pour mettre en valeur les annonces de ces acteurs. Deux "champions de haut niveau" seront également nommés pour deux ans pour agir au nom du président de la COP. Le président de la COP 21 nommera un premier champion jusqu’au dernier jour de la COP 22 ; celui de la COP 22 nommera un deuxième champion pour deux ans jusqu’à la COP 23, en novembre 2017 ; puis chaque président des COP suivantes nommera un champion pour une durée de deux ans. Entre 2016 et 2020, un processus "d’examen technique" sur l’adaptation sera lancé. La cinquième partie de la décision porte sur les acteurs non-étatiques, qui sont invités à renforcer leurs efforts pour réduire leurs émissions, construire de la résilience, abaisser la vulnérabilité, et manifester ces efforts à travers la plateforme Nazca. Il est aussi reconnu "combien il importe de fournir des incitations aux activités de réduction des émissions, s’agissant notamment d’outils tels que les politiques nationales et la tarification du carbone".