Les peuples autochtones
"En 2017, le nombre d'assassinats de leaders indigènes défenseurs des ressources, ainsi que les obstacles auxquels se heurtent les autochtones pour accéder à la justice sont en hausse : au moins 207 défenseurs de l'environnement, dont la moitié issus de tribus indigènes des forêts tropicales, ont été assassinés."... "Ils sont considérés comme anti-développement parce qu'ils protègent leur territoire. C'est un paradoxe".
Victoria Tauli-Corpuz, rapporteure spéciale auprès des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, et ONG Global Witness.
Les peuples indigènes ou autochtones en première ligne de la lutte contre le changement climatique
En première ligne de la lutte contre les changements climatiques, auxquels ils sont particulièrement vulnérables, les peuples indigènes ont été jusqu’à présent les grands laissés pour compte des négociations internationales qui décident de notre avenir à tous. De plus en plus présents sur la scène internationale, ils souhaitent reprendre leur destin en main et ouvrir de nouvelles perspectives au nôtre, par la même occasion.
Les "peuples indigènes" ou "autochtones" regroupent des populations qui vivent sur leurs terres ancestrales sans avoir été colonisés ou assimilés. Ils suivent leurs propres lois, partagent une culture commune et souvent une langue. Ces peuples représentent environ 400 millions de personnes, dont 200 millions en Asie, et 50 millions en Inde, soit environ 6% de la population mondiale. Regroupés dans plus de 70 pays sur les cinq continents. les peuples autochtones forment plus de 5.000 groupes différents, parlent plus de 4.000 langues dont la plupart risquent de disparaître d'ici à la fin du XXIème siècle. Ils occupent 22% des terres de la planète et vivent sur des territoires qui couvrent la plupart des forêts primaires où se trouvent 80% de la biodiversité de notre planète. Plus de 500 millions d’hectares de forêts et écosystèmes sont gérés par des communautés locales (1/8ème de la forêt mondiale). Dans ces arbres sont stockées 37,8 milliards de tonnes de carbone, (soit 11 fois ce qu’émet l’industrie du transport dans le monde) grâce à l'action et au soin des populations qui empêchent son relachement dans l’atmosphère. Pourtant, les peuples autochtones sont aujourd'hui considérés "à l’extérieur du système Monde". Les peuples autochtones sont présents aux COP pour expliquer pourquoi les communautés locales sont un rempart contre le changement climatique. Solidaires, ils forment un mouvement planétaire qui parle d'une seule voix pour faire reconnaître leurs droits. Ils se battent pour protéger leur environnement, pour être consultés avant que les décisions soient prises par les gouvernements, pour garder la possibilité de s’occuper eux-mêmes de la préservation de leurs territoires comme ils le font depuis toujours, et pour arrêter d'être criminalisés lorsqu'ils s'opposent à la destruction de leurs territoires à la déforestation , à la construction de barrages hydroélectriques ou à l’exploitation des sous-sols. Le texte de l’accord de Paris fait référence aux droits des peuples indigènes, à l’importance de leur expertise en termes d’adaptation et de réduction des changements climatiques. Mais, il n’est pas vraiment mentionné de moyens d’action et de décision. De L'amazonie à l'Océanie, les peuples autochtones ont réussi par leurs savoirs ancestraux à freiner le déclin des écosystèmes, mais la pression extérieure sur ces gardiens de la nature sont de plus en plus difficle à supporter. Pour la première fois, le rapport du groupe d'experts de l'ONU sur la biodiversité (IPBES) publié le 6 mai 2019 intégère les savoirs, les problèmes et les priorités de ces communautés.
Parmi les personnalités présentes dans les COP, Victoria (Vicky) Tauli-Corpuz, de la communauté montagnarde des Kankana-ey Igorot aux Philippines est rapporteure spéciale auprès des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Victoria Tauli-Corpuz, fait le tour du monde pour appeler la communauté internationale à reconnaître l'importance du savoir des peuples indigènes et à protéger leurs modes de vie et leurs savoirs ancestraux. Ces savoirs sont favorables à la préservation de l'environnement et mitigent les effets du changement climatique.
"A une époque où il est question de développement durable, les indigènes peuvent énormément contribuer à garantir que ces objectifs soient atteints. C'est le moment pour la communauté internationale de le reconnaître",... "Ils ont les connaissances pour maintenir leur habitat et la biodiversité, mais aussi les valeurs qu'ils transmettent aux futures générations quant à des modes de consommation durables", ...a-t-elle déclaré à l'AFP en marge d'une conférence à l'Université Nationale de Bogota.
Décembre 2019 : "Ils sont plus affectés parce qu'ils vivent dans des écosystèmes fragiles comme l'Artique où la glace fond, des îles à basse altitude, ou en haute montagne, et subissent donc directement les effets du changement climatique"; " ils ne représentent que 5% de la population mondiale mais 80% de la biodiversité se trouve sur leurs territoires".
Hindou Oumarou Ibrahim, leader autochtone et militante écologiste a été invitée au Climate Action summit le 23 septembre 2019. Elle dirige une association de protection des droits humains et de l'environnement du Tchad, où elle est née dans la communauté du peuple M'Bororo, un peuple d'éleveurs nomades du Sahel. Après avoir obtenu le titre de "Emerging Explorer" du National Geographic, elle a reçu en 2018 le prix Danielle Mitterand pour son combat de défense des peuples autochtones. Elle a été nommée ambassadrice des Objectifs de développement durable par le secrétaire général des Nations unies en janvier 2019.
Les peuples sibériens et inuits s'adaptent déjà aux conséquences du changement climatique: ils modifient leurs techniques de chasse et d'élevage et trouvent de nouvelles ressources de pêche pour faire face au recul des glaces. Ils savent qu'ils doivent trouver en eux des solutions plutôt que de subir et ils sont assez humbles pour respecter la nature plutôt que de la dominer.
La déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones reconnait les contributions des savoirs autochtones et traditionnels
Depuis près de 30 ans les peuples indigènes alertent le monde et assistent à l'impuissance des Etats à lutter contre le réchauffement climatique, à protéger les écosystèmes et à préserver terre et eau de la pollution. Les différentes nations indigènes collectent/rassemblent des études de cas sur les contributions des savoirs autochtones et traditionnels pour faire progresser l'adaptation, l'atténuation, et le développement. Les études de cas sont présentées aux Nations Unies pour montrer comment les savoirs autochtones renforcent les éléments clés de l'Accord de Paris et comment les partenariats avec les peuples autochtones et les communautés locales renforcent leur résilience et l'action sur le changement climatique.
Leur action collective s'appuie sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones adoptée le 13 septembre 2007.
le forum mondial des peuples indigènes sur le changement climatique participe a la CCNUCC et aux COP
Pour renforcer cette action collective, le Forum mondial des peuples indigènes sur le changement climatique a été créé en 2008 en tant que caucus pour les peuples autochtones participant aux processus de la CCNUCC. Ce groupe est systématiquement présent aux COP. Ils sont organisés par sept régions: Afrique, Arctique, Asie, Amérique du Nord, Amérique latine et Caraïbes, Pacifique, Russie et Europe de l'Est.
Plusieurs ONGs et organisations existent pour faire connaitre les droits des peuples indigènes. Par exemple :
Survival international est une organisation indépendante financée par la société civile qui observe et défend les peuples isolés.
Une plateforme des peuples autochtones adoptée à la COP21
Le texte de l'Accord de Paris reconnait du bout des lèvres "la nécessité de renforcer les connaissances, technologies, pratiques et efforts des communautés locales et des peuples autochtones pour faire face au changement climatique", sans préciser le système de financement et de partage des fonds et des bénéfices du marché carbone, alors que ce sont les peuples autochtones qui gèrent durablement les forêts. Sans formuler de garantie juridiquement contraignantes pour le respect des droits (à la Terre, à l'eau, contre l'exploitation:extraction des ressources, contre la construction des barrages). Et donc sans justice climatique. A minima, une Plateforme des communautés locales et des peuples autochtones (LCIP), est adoptée à la COP21, pour fournir des connaissances et "l'échange d'expériences et le partage des meilleures pratiques et des efforts locaux en matière d'atténuation et d'adaptation . »
Décus par l'Accord de Paris, les peuples indigènes s'organisent dans L'alliance des gardiens de Mère Nature pour limiter la hausse des températures à 1,5º afin de prévenir les catastrophes naturelles
«Les résultats de l’accord de Paris confirment, une fois de plus, que les gouvernements ne se soucient pas de droits de l’homme. Autant qu’ils disent vouloir lutter contre le changement climatique, s'ils ne respectent pas les droits et les territoires autochtones et continuent à extraire des ressources naturelles de façon incontrôlable, il n’y aura pas de véritable changement, ni la justice climatique et ce sera désastreux pour toute l’humanité et toute la vie ". Patricia Gualinga de Sarayaku, activiste pour les droits des peuples Kichwa (en Amazonie), à la COP21
A la Cop21, les chefs indigènes d'Amazonie conduits par le cacique Raoni Metuktire et la fondation Planète Amazone ont dénoncé l’absence de la prise en compte de leurs droits spécifiques et de la justice climatique dans l'Accord de Paris. N’ayant pas reçu d’écho favorable à leurs revendications, ils espèrent faire pression sur les gouverbnements en lançant, en pleine COP21, l’Alliance des Gardiens de Mère Nature pour alerter sur leur vulnérabilité face au changement climatique ainsi que le rôle clé qu’ils doivent jouer pour la préservation de l’écosystème et la limitation de la température mondiale à un seuil de 1,5°C acceptable pour l’humanité. L'Alliance est un mouvement international citoyen associant des représentants indigènes de tous les continents et des personnalités engagées qui veut montrer au monde entier que les indigènes ne constituent pas un problème mais qu’ils sont, au contraire, des alliés indispensables pour lutter contre les changements climatiques, capables d'apporter des solutions concrètes pour protéger le vivant et les générations futures.
La déclaration constitutionnelle de l'Alliance, remise au Secrétaire Général de l'ONU et au Président de la République Française, appelle notamment à la reconnaissance des droits de la nature et celle du crime d'écocide.
L'alliance des gardiens de Mère Nature alerte les Etats et l’humanité en adoptant une déclaration de 17 premières propositions pour la planète : la Déclaration de Brasilia
Depuis Paris, peu de choses ont vraiment avancé. La plate-forme LCIP a été approuvée par la COP23. Le préambule du projet de décision rappelle la Déclaration des Nations Unies sur les peuples autochtones et souligne "le rôle des communautés locales et des peuples autochtones dans la réalisation des buts et objectifs de la Convention, de l'Accord de Paris et du Programme de développement durable à l'horizon 2030 sur le changement climatique."
Du 11 au 16 octobre 2017 s’est tenue, à Brasilia, la première Grande Assemblée de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature. Près de 200 représentants autochtones, les leaders indigènes du monde entier et des personnalités engagées dans la préservation de l’environnement ont débattu de sujets d’importance mondiale pour l’avenir de l’humanité : climat, biodiversité, environnement, énergie, technologie, conflits, droits humains, droits de la nature… Ensemble, ils se sont inspirés des problèmes, défis et solutions trouvés sur les territoires traditionnels des peuples autochtones de tous les continents, qu’ils soient forestiers, insulaires, arctiques, qu’ils vivent dans le désert, dans les steppes, dans les montagnes. Ils ont écrit un texte de déclaration, afin d’inspirer une stratégie globale pour la protection de la planète, pour la paix, pour les générations futures.
Texte de « L’appel des Gardiens de la Terre » pour la préservation de la vie sur la planète et celle des générations futures :
"Nous, Gardiens et enfants de la Terre Mère, peuples autochtones et partenaires alliés, avons tenu notre 2ème Assemblée et nos prophéties, notre sagesse, nos analyses, nous ont permis de constater que la vie sur la Terre Mère est en danger et que l’heure d’une grande transformation est arrivée.
Les peuples autochtones ont toujours pris soin de la Terre Mère et de l'humanité. Nous souhaitons qu’il en soit encore ainsi, avec le soutien des peuples du monde.
Les prophéties autochtones nous donnent la responsabilité de dire au monde que nous devons vivre en paix les uns avec les autres et avec la Terre Mère, pour assurer l'harmonie au sein de ses lois naturelles et de la création. Nous appelons à des solutions concrètes qui reconnaissent les droits des peuples autochtones. Nous appelons les dirigeants du monde, les États, les Nations Unies et la société civile à amorcer une réflexion visant à abandonner progressivement les systèmes juridiques hérités de l’époque coloniale pour les remplacer par de nouveaux, traitant la Nature, la Terre Mère en tant qu'entité porteuse de droits fondamentaux.
Nous devons évoluer vers un paradigme basé sur la pensée et la philosophie indigènes, qui accorde des droits égaux à la Nature et qui honore l'interrelation entre toute forme de vie et la préservation de la Terre Mère. Il n'y a pas de séparation entre les droits des peuples autochtones et les droits de la Terre Mère.
Par conséquent, nous appelons tous les États et l'humanité à :
1. Prendre des mesures pour appeler les Nations Unies et les gouvernements nationaux et locaux, y compris les structures de gouvernance des peuples autochtones, à adopter la Déclaration universelle des droits de la Terre Mère, proclamée par 35 000 personnes, représentants et délégués à la Conférence des peuples sur le changement climatique et les droits de la Terre Mère, à Cochabamba, en Bolivie, en avril 2010. Cette déclaration est un appel énonçant des principes fondamentaux et universels avec pour objectif de parvenir à la reconnaissance des droits de la Terre Mère et de tous ses êtres vivants pour poser les fondations d’une culture du respect nécessaire au bien vivre (Buen Vivir), et unir tous les habitants de la Terre autour d'un intérêt commun et universel : la Terre Mère est vivante, elle est notre maison commune et nous devons la respecter, prendre soin d'elle pour le bien-être des générations futures.
2. Mettre en œuvre et confirmer la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies en septembre 2007, en réponse aux recommandations de la Conférence des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Ratifier et appliquer strictement la Convention 169 de l'Organisation Internationale du Travail, adoptée en 1989.
3. Engager tout gouvernement, toute entreprise, à obtenir le consentement des peuples autochtones, conformément aux principes du Consentement Libre, Préalable et Éclairé, issu d’une décision collective suivant leurs propres procédures, avant l’approbation de n’importe quel projet affectant leurs terres et leurs territoires, et à reconnaître aux peuples autochtones le droit de refuser tout projet ayant un impact sur leurs peuples et leurs vies, y compris les industries polluantes toxiques, ou agro-industrielles, ou les activités extractives, incluant les mines souterraines ou sous-marines, après évaluation des impacts sur les zones sacrées, sur la culture et sur la santé de l’homme et de l’environnement. Les peuples autochtones auront le droit de révoquer à tout moment le consentement qui aurait été accordé.
4. Mettre en œuvre une transition juste, à l’échelle étatique et locale, en tenant compte des savoirs traditionnels et sacrés des peuples autochtones, pour passer de l'économie des combustibles fossiles à une énergie 100% propre et renouvelable ; renoncer à tous les matériaux terrestres qui, une fois brûlés, libèrent des gaz qui changent le climat et à les laisser sous terre ou au fond des océans. Nous exigeons également l'interdiction de toute nouvelle exploration et exploitation de pétrole, de sables bitumineux, de gaz et pétroles de schiste, de la fracturation hydraulique, du charbon, de l'uranium, du gaz naturel, y compris pour les infrastructures de transport.
5. Agir pour améliorer l'Accord de Paris sur le climat de 2015 au sujet des droits et des besoins des peuples autochtones. La principale préoccupation des peuples autochtones et de leurs alliés est que cet accord, qui 3 n'est pas assez solide, doit élever ses ambitions en se voyant renforcé par des mesures concrètes afin de ne pas se contenter des projections sur les réductions volontaires des émissions qui conduisent en définitive à une augmentation moyenne de la température mondiale supérieure à 3-4° C. Les peuples autochtones éduqueront leurs communautés et élaboreront des stratégies pour prendre des mesures en réaction au constat suivant : l'Accord de Paris est un accord commercial qui ne fait que privatiser, transformer en marchandise et vendre des crédits compensatoires pour les océans, les forêts et les terres agricoles, permettant aux plus grands émetteurs de gaz à effets de serre non seulement d'acheter le moyen d’échapper aux impératifs de réduction de leurs émissions, mais aussi d’en tirer profit ; l'Accord propose une transition énergétique reposant sur d'autres énergies polluantes et destructrices, notamment la fracturation hydraulique, l'énergie nucléaire, les agrocarburants, la séquestration du carbone et d'autres propositions technologiques qui posent de sérieux risques écologiques ; étant donné que le texte opérationnel de l'Accord omet toute mention aux droits de l'homme et aux droits des peuples autochtones, il est nécessaire de travailler à l’élaboration de protocoles avec les États afin d’inclure les connaissances traditionnelles dans les réunions de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques; enfin, l'Accord ne traite pas non plus des devoirs de réparation du Nord envers le Sud, ni de la demande de règlement d’indemnités pour la réparation et la restauration des terres perdues ou dégradées, parmi les territoires et les foyers des peuples du Sud et du Nord. Nous croyons que le changement climatique n'est pas une simple question environnementale. C'est le résultat d'un système économique injuste qui consiste à rechercher une croissance sans fin, en concentrant la richesse entre les mains de quelques-uns et en exploitant la Nature jusqu’à mener à son à effondrement.
6. Adopter avec la participation pleine et effective des peuples autochtones un traité international établissant des obligations contraignantes à l'égard des sociétés transnationales et autres entreprises pour le respect des droits de l'homme, devant inclure les droits des peuples autochtones, qui reconnaisse pleinement les obligations de tous les États applicables aux peuples autochtones en vertu des instruments internationaux en vigueur.
7. Mettre en place des mécanismes et des législations pour garantir que le Consentement Libre, Préalable et Éclairé (CLIP) soit appliqué afin de protéger les droits de propriété intellectuelle des autochtones, en respectant les dimensions spirituelles, sacrées et secrètes de leurs connaissances. Les États doivent empêcher l'appropriation illégale et offensante des savoirs traditionnels. Les dispositions du Consentement Libre, Préalable et Éclairé doivent être appliquées dans le cadre de l'accès à ces savoirs et du partage des bénéfices générés.
8. Prendre des mesures contre le commerce illégal de la faune, du bois, des produits et des ressources forestières, des ressources génétiques, des espèces menacées et d'autres ressources biologiques. Appliquer strictement la Convention des Nations Unies contre la corruption.
9. Reconnaître que les actions d’entreprises ou de politiques gouvernementales qui résulteraient en la dégradation, ou la destruction, ou la contamination par des produits toxiques de l’environnement, des écosystèmes ou des habitats sont des éco-crimes contre l’intégrité territoriale de la Terre Mère – aussi appelées écocides. Cela doit s'accompagner d’initiatives visant à les intégrer comme crime d’écocide dans les dispositions de la Cour pénale internationale.
10. Soutenir la mise en place de programmes et initiatives de coopération et de partenariat locaux, infranationaux, étatiques et internationaux, à l’exception de systèmes mercantiles, pour protéger, conserver et restaurer les forêts natives avec la participation pleine et effective des peuples autochtones de l'intérieur et de ceux qui habitent à proximité de ces territoires, et ceci dans toutes les forêts et écosystèmes du monde. Ces 4 être évalués avec les peuples autochtones afin d'être reproduits dans d'autres régions forestières, en conjonction avec des mécanismes financiers de mise en œuvre graduelle.
11. Sanctuariser de toute urgence la totalité des espaces forestiers primaires de la planète qui sont traditionnellement sous la garde des peuples autochtones, puisque l'ONU a déjà reconnu que leur présence est un facteur garantissant la non détérioration de ces environnements inestimables. Les peuples autochtones doivent une fois pour toutes posséder et garder ces territoires, d’où ils ne peuvent être expulsés. L'Alliance souligne la nécessité de créer dès que possible, avec le soutien des États, un statut juridique international pour protéger efficacement ces écosystèmes vitaux de toute forme de prédation. Ces écosystèmes ne doivent pas être utilisés dans le cadre d'un marché du carbone qui quantifie et transforme en marchandise la Terre Mère, ni servir de paiement pour des services écosystémiques, ou pour le commerce de carbone, les compensations carbone, la tarification du carbone, les mécanismes de Réduction des Émissions dues à la Déforestation et à la Dégradation des Forêts (REDD), les Mécanismes de Développement Propre (CDM), ou des mécanismes de compensation de la biodiversité et de financiarisation de la nature, la transformant en « parts » à vendre sur les marchés financiers.
12. Protéger et d’assurer l’avenir des océans, de la biodiversité océanique, des espèces marines et des ressources océaniques. Si les océans meurent, nous mourrons tous. Les peuples autochtones ont un droit de regard sur les océans, les fonds marins, les zones maritimes, les mers côtières et les glaces de mer en vertu du droit de la mer et du processus mis en place par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.
Ainsi, pour protéger et assurer l'avenir de l’océan et de la biodiversité océanique, il faut agir pour :
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cesser toutes les subventions des gouvernements du monde aux opérations de pêche industrielles ; - interdire toutes les technologies de pêche industrialisées comme les super chalutiers, les palangres, les filets dérivants, les pêches à la senne, tous les filets et lignes monofilament en plastique, etc. ;
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appliquer les réglementations internationales contre les opérations de pêche illégales ;
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interdire toutes les activités de chasse à la baleine, à l’exception de la chasse vivrière pratiquée par les peuples autochtones dans le but exclusif de garantir leur subsistance ;
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bannir tout forage en mer, l'exploration des combustibles fossiles et l'exploitation minière sous-marine ;
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encourager la diversité en favorisant la croissance démographique des poissons, des mammifères marins, des oiseaux de mer et de tous les autres organismes marins naturels ;
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mettre fin à l'alimentation par des farines de poisson (environ 40% du poisson pêché) des animaux domestiques comme les porcs, les poulets, les saumons domestiques, parmi beaucoup d’autres ;.
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stopper le déversement de produits chimiques, de matières plastiques, de ruissellement agricole et de matières radioactives dans la mer.
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mettre fin à la pollution acoustique causée par l'exploration du pétrole par sonar et par les systèmes d'armes soniques.
13. S’assurer de la protection et du respect des sites et espaces sacrés, dans le cadre de l’UNESCO, avec la participation pleine et effective des peuples autochtones, conformément au Consentement Libre, Préalable et Eclairé, dans le respect de la diversité biologique et culturelle des peuples autochtones et des communautés locales, ainsi que de leurs droits fonciers et de gouvernance.
14. Interdire la construction de nouveaux grands barrages hydroélectriques. Nous demandons que les réglementations internationales et nationales lient de manière contraignante la construction et l'entretien des 5 barrages hydroélectriques autorisés en activité. L'Alliance recommande également le démantèlement des grands barrages construits en violation du droit de consentement ou de consultation préalable, libre et éclairée des peuples autochtones et populations affectées et de toutes les autres obligations en vigueur.
15. Reconnaître les droits des générations futures, notamment par l'adoption d’une Déclaration des droits (et devoirs) de l'humanité. Ce texte visera à rappeler que la présente génération a le devoir de protéger le patrimoine légué par les générations passées, mais aussi de faire des choix qui engagent sa responsabilité envers les générations futures. Le texte établit quatre principes fondamentaux : le principe de responsabilité, d'équité et de solidarité entre les générations, le principe de la dignité humaine, le principe de continuité de l'existence de l'humanité, et enfin de la non-discrimination due à l'appartenance à une génération. Reconnaître les visions indigènes du monde qui expriment que toute décision doit être prise en considération de son effet sur les générations futures de tous les peuples, de toute vie et de toute nature.
16. Reconnaître que l'eau est vivante, qu’elle a des droits et que ceux-ci doivent être protégés maintenant et pour les générations futures. L'eau est un esprit vivant, elle a le droit d'être traité comme une entité écologique, avec son propre droit inhérent à l'existence, les bassins versants et les écosystèmes aquatiques ayant le droit d'être en bonne santé et propres. L'eau est à la fois eau de pluie, rivières, sources des rivières, cours supérieurs, glaciers, glace, lacs, ruisseaux, cascades, affluents, eaux de source, estuaires, nappes souterraines, aquifères et autres plans d'eau. L'eau n'est pas une marchandise et les États doivent interdire sa privatisation. Toutes les espèces vivantes de la Terre Mère ont des droits à l'eau. En particulier, les peuples autochtones ont des droits à l'eau et aux cours d'eau pour la navigation, les usages coutumiers et culturels. Tous les peuples autochtones ont le droit d'avoir accès à un approvisionnement en eau suffisant et sans danger pour la consommation humaine, l'hygiène et la cuisine.
17. Reconnaître à l’échelle étatique et gouvernementale et prendre des mesures contre les atteintes aux femmes autochtones et trouver de nouveaux moyens de mettre fin à la violence liée au traitement de la société dominante et à l'objectivation de la Terre Mère et des femmes. L'humanité doit reconnaître l'importance des femmes autochtones en tant que gardiennes de la biodiversité. Les femmes ont la force et la résilience pour faire face aux effets du changement climatique provoqué par l’espèce humaine et de l'injustice environnementale. Les femmes autochtones et la Terre Mère supportent l’accumulation de ces effets issus d'une société capitaliste patriarcale. A travers les industries extractives, les femmes sont victimes d’abus domestiques et sexuels, de commerce sexuel et de prostitution, de l’alcoolisme et de la toxicomanie, perturbant le maintien de familles et de communautés autochtones en bonne santé. Les femmes sont le "premier environnement". Les nourrissons sont les premières victimes. Les femmes subissent les effets des produits chimiques toxiques qui affectent leur utérus, provoquant des avortements spontanés, la contamination par le lait maternel et des charges corporelles toxiques élevées causant des dommages aux générations futures. Des mécanismes de financement doivent être créés pour permettre aux femmes autochtones et à leurs communautés de se faire entendre aux niveaux local, national et international en tant que décideurs dans les domaines du climat, de l'énergie, de l'environnement et de la santé. Cette humanité invisible est littéralement en train de tuer les femmes autochtones, les enfants et les générations futures.
18. Protéger l’existence et reconnaître la volonté des peuples autochtones en situation d'isolement volontaire à accepter ou refuser tout contact. Les États doivent protéger leurs territoires et reconnaître les peuples autochtones déjà contactés par les sociétés nationales en tant que gardiens de l'autonomie et des droits de ces peuples. Les gouvernements et les individus doivent être responsables des violations des droits et des dommages à l'encontre des peuples autochtones en situation d'isolement volontaire.
Notes:
http://allianceofguardians.org/fr/
http://planeteamazone.org/alliance/gardiens-membres-de-lalliance-gardiens-de-mere-nature/