Application médicale: diagnostic de THADA
Définition et tableau clinique
Selon cette définition, un enfant souffrant d'ADHD doit présenter un degré inapproprié, par rapport à son âge et à son développement intellectuel, d'inattention, d'impulsivité et d'hyperactivité. Les symptômes doivent se manifester à l'école mais également dans l'environnement familial. Ils doivent avoir débuté avant l'âge de 7 ans et durer depuis plus de six mois. Le développement psychomoteur de ces enfants, est dans la majorité des cas tout à fait normal.
L'approche diagnostique « classique »
L'approche diagnostique se situe dans la même lignée, dans les consultations de neuropédiatrie générale que dans ce programme spécialisé. La différence réside dans le nombre de tests psychologiques appliqués et le nombre d'intervenants.
Il est nécessaire de pouvoir disposer de tests diagnostiques objectifs (détaillés ci-dessous) pour lesquels les normes par rapport à I'âge sont clairement définies.
- La première étape dans I'approche diagnostique consiste bien évidemment en une anamnèse complète incluant une anamnèse familiale (souvent positive) et révélant parfois
- Suit l'examen clinique somatique et neurologique, qui est habituellement normal. Un examen neurologique anormal doit absolument faire suspecter un autre diagnostic. L'étape suivante est l'évaluation par des questionnaires permettant d'établir des scores quantifiant séparément les plaintes des parents et celles des enseignants.( Bien entendu ces questionnaires n'établissent pas le diagnostic à eux seuls mais sont une aide objective pour le clinicien.)
- Dans le cadre de la consultation spécialisée du programme "learning disability/behavioural neurology", un certain nombre d'autres tests sont ensuite pratiqués, dans le but de dépister des troubles spécifiques de l'apprentissage. II s'agit tout d'abord de l'évaluation du QI, puis de tests de l'évaluation du langage test et du dépistage des troubles de l’organisation visuo-spatiale.
Mise au point d’un test de mesure objective du THADA par l’étude des mouvements oculaires
L’équipe de Douglas Munoz (Laboratoire de Queen’s University – Canada), est partie de l’hypothèse que les symptômes du THADA serait associés à une pathologie au niveau du striatum et du cortex frontal. Or ces régions sont impliquées dans le contrôle des réponses volontaires et les suppressions de saccades (voir la production et le contrôle des saccades Ils ont donc supposé que les enfants et adultes atteints de THADA pourraient avoir des difficultés dans les tâches oculomotrices demandant la suppression des saccades des yeux involontaires ou réflexes.
Pour tester cette hypothèse, ils ont mesuré les performances de mouvements oculaires de patients enfants ou adultes, atteints de THADA et de personnes contrôle, au cours de deux tests, "pro" et "anti"* saccade.
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A. Dans la tâche "pro" saccade, les participants étaient entraînés à regarder d'un point fixe central (notée FP) vers une cible excentrée (notée T).
B. Dans la tâche "anti-saccade", la présentation du stimulus était identique mais les participants étaient entraînés à supprimer la saccade liée au stimulus et à la place de cela, regarder du point central (FP) au côté opposé à la cible (T). La flèche pleine représente un mouvement oculaire correct. La flèche en pointillé représente un mouvement oculaire erroné. C. Condition de recouvrement : la cible est présentée alors que le point de fixation central est encore allumé D. Condition de délais : la cible est présentée après la disparition du point de fixation central
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3ème test : pour tester l’habilité à maintenir une fixation prolongée, les patients doivent réaliser des « pro »-saccades en condition de délais mais avec des périodes de délais variables (temps entre la disparition du point de fixation central et la disparition de la cible).
Pour l’ensembe des expériences, les mouvements oculaires sont mesurés par électro-oculographie (EOG) (voir techniques d’étude des mouvements oculaires)
Résultats :
Dans le test "pro" saccade, les patients atteints de THADA ont des temps de réaction plus longs, une plus grande variabilité "intra-sujet", et leurs saccades ont des vitesses réduites et des durées augmentées.
Dans le test anti-saccade (voir tableau de résultats ci-dessous), les patients THADA montrent de plus grandes difficultés à supprimer la saccade réflexe vers la cible excentrée, augmentent le temps de réaction pour réaliser une anti-saccade correcte, et présentent de plus grandes variations pour un même sujet. Ces résultats se retrouvent tant chez les enfants que les adultes et sont d’autant plus nets en condition de délais.
Pourcentages positifs = réponses correctes : ici réaliser une anti-saccade (saccade en direction opposée de la cible) En pointillés : les individus contrôle, en trait plein : les individus atteints de THADA A gauche: cas des enfants, à droite: cas des adultes |
Dans une troisième tâche demandant une fixation prolongée, les patients atteints de THADA produisent davantage de saccades "fâcheuses" pendant la période où il leur était demandé de maintenir une position fixe.
Ainsi un test de diagnostic de THADA chez l’enfant pourrait correspondre à des mesures de performances oculomotrices lors de réalisation d’anti-saccades ainsi que de fixation prolongée . Des résultats montrant une réduction de la capacité à supprimer les saccades non volontaires et à contrôler son comportement de fixation volontaire, conforteraient alors les résultats d’autres tests de diagnostiques de trouble hyperactivité avec déficit de l'attention.
D’après “Altered control of visual fixation and saccadic eye movments in Attention Deficit-Hyperactivity Disorder” J.Neurophysiol, Munoz et al., avril 2003