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SCÉNARIO PÉDAGOGIQUE AUTOUR DU PLAISIR SEXUEL

Par jcartier sbeaudin — Dernière modification 08/06/2020 10:47
Cette activité pédagogique repose sur l’exploitation de certaines des images disponibles dans la banque ANAPEDA, à l’aide du logiciel EduAnat2. Elle permet d’aborder la composante cérébrale du plaisir sexuel.

MISE EN GARDE

Cette activité correspond à un scénario pédagogique qui modifie volontairement le sens exact d’une IRM fonctionnelle. Concrètement elle présente comme l’IRM fonctionnelle d’une femme, l’IRM fonctionnelle moyenne de 17 hommes. Bien que les aires cérébrales mises en évidence lors de cet enregistrement chez des hommes soient théoriquement les mêmes chez les femmes il importe de garder à l’esprit qu’il y a bien là une « substitution » d’une image par une autre. Ce procédé pédagogique est comparable à l’emploi de produits de substitution dans certains TP. S’agissant d’imagerie cérébrale on veillera à ce que la substitution demeure crédible, par exemple on ne présentera pas l’IRM fonctionnelle localisant les aires visuelles comme étant l’IRM fonctionnelle montrant les aires auditives.    

OBJECTIFS PÉDAGOGIQUES

Le nouveau programme de seconde aborde la sexualité humaine, y compris dans sa dimension cérébrale puisqu'il invite à montrer que "le  plaisir  repose  notamment  sur  des  mécanismes  biologiques,  en  particulier l’activation dans le cerveau du système de récompense".

Mais, le programme demande aussi aux enseignants de veiller "à  ne  pas  limiter  la  relation  entre  sexualité  et  plaisir  à la seule composante biologique". On doit donc indiquer que "les facteurs affectifs et cognitifs ainsi que le contexte culturel (social) ont une influence majeure sur le comportement sexuel humain".

La banque ANAPEDA renferme plusieurs IRM fonctionnelles permettant de localiser les aires cérébrales constituant ce qu'on appelle le système de récompense et de mettre en évidence, comme le précise le programme, que ces aires "peuvent être activées en dehors des activités sexuelles". On trouvera sur ce site une présentation détaillée de ces images ainsi que des pistes d'exploitation pédagogiques les concernant.

Ici, on se propose d'exploiter certaines de ces images afin d'amener l'élève à appréhender la multiplicité des facteurs qui participent à la survenue de l'orgasme. C'est également l'occasion d'interroger un phénomène biologique généralement mal défini.

DÉMARCHE PÉDAGOGIQUE

La banque ANAPEDA ne contient pas d'IRM fonctionnelle permettant de localiser spécifiquement les aires cérébrales qui présentent une variation d’activité statistiquement significative lors d'un orgasme.

Toutefois, des études récentes (Wise, 2017) indiquent que l'orgasme s'accompagne d'une augmentation de l'activité des régions cérébrales suivantes : noyau accumbens, insula, cortex cingulaire antérieur, opercule, gyrus angulaire droit, lobule paracentral, cervelet, hippocampe, amygdale et cortex orbitofrontal. Il semble que ce dernier soit l'une des zones les plus actives.

Or, on retrouve plusieurs de ces aires dans l'IRM fonctionnelle de la banque ANAPEDA intitulée : "IRMsujet13241RecompenseErotiqueSupControle.fonc.nii" (seuil de réglage = 36). Ce dernier met en évidence les nombreuses aires du système de récompense présentant une variation d’activité statistiquement significative lors d'un stimulus visuel de nature érotique.

Dans cette activité on contourne cette difficulté en attendant de l'élève qu'il fasse preuve d'esprit critique en remarquant qu'il existe peut-être des différences entre l'activité cérébrale liée à un plaisir sexuel et celle qui accompagne un orgasme.

Du reste, si cette activité conduit l'élève à observer l'activité cérébrale liée au plaisir sexuel, elle ne se réduit pas à cette composante du plaisir. Notre stratégie consiste justement à élargir l'attention de l'élève aux autres facteurs impliqués dans la manifestation de l'orgasme.

Pour y parvenir on commence par présenter aux élèves le cas suivant :

"Une femme hétérosexuelle, que l’on appellera W, déclare avoir régulièrement des relations sexuelles avec son compagnon, mais s’inquiète de ne pas avoir d'orgasme. Pourtant, un examen gynécologique ne révèle aucune anomalie. Elle en parle à une amie qui travaille dans un laboratoire de neurosciences. Celle-ci lui propose d’utiliser les ressources de son laboratoire afin de rechercher la cause de son absence d’orgasme."

Les élèves sont alors chargés de déterminer la cause probable du trouble de madame W, à l'aide de l'exploitation de plusieurs ressources, dont des IRM fonctionnelles.

LES DOCUMENTS FOURNIS AUX ÉLÈVES

Document 1 : le plaisir et le cerveau

Le plaisir est une sensation et, comme toute sensation, il repose sur l’activité de certaines zones du cerveau. Or, l’imagerie par Résonnance Magnétique permet d’étudier l’anatomie et le fonctionnement du cerveau d’une personne vivante. Concrètement, cette technique d’imagerie médicale mesure l’aimantation de chaque mm3 du cerveau. Cela donne une assez bonne image de la manière dont cet organe est fait, c’est ce que l’on appelle une IRM. Cependant, une IRM ne montre pas l’activité du cerveau.

Pour « observer » l’activité cérébrale il faut comparer deux IRM : l’une réalisée lorsque la personne est au repos et une autre lorsque la personne réalise une tâche, par exemple écouter de la musique. En effet, lorsque l’activité d’une partie du cerveau varie cela modifie l’aimantation des tissus à ce niveau. Donc, si on compare les deux IRM, dans notre exemple, on détectera une variation d’aimantation (ce qu’on appelle un « calque ») aux endroits du cerveau qui s’activent lorsqu’on écoute de la musique :

L’amie de madame W l’informe que son laboratoire dispose de la comparaison entre deux IRM d’une femme saine :

  • 1ème IRM : femme saine au repos
  • 2ème IRM : femme saine ressentant un plaisir sexuel provoqué par la vision d'images érotiques

ATTENTION : on attend des élèves qu'ils sollicitent du professeur l'accès à cette IRM fonctionnelle, mais aussi qu'ils réclament des données similaires réalisées chez madame W. L'expérience montre que ces deux demandes surgissent très rapidement et de manière argumentée. On fournit alors aux élèves le logiciel EduAnat2, sa fiche technique, et un dossier numérique contenant les fichiers suivants :

Pour madame W :

  • IRMsujet13241Recompense.anat.nii renommé IRM madame W
  • IRMsujet13241Recompense.stl également renommé IRM madame W
  • IRMsujet13241RecompenseErotiqueSupControle.fonc.nii renommé calque madame W

Pour la femme saine :

  • IRMsujet13231Empathie.anat.nii renommé IRM femme saine
  • IRMsujet13231Empathie.stl également renommé IRM femme saine
  • IRMsujet13241RecompenseErotiqueSupControle.fonc.nii renommé calque femme saine

ATTENTION : il s'agit d'un artifice pédagogique visant à permettre d'éliminer l'hypothèse d'une origine cérébrale du trouble de madame W. En effet, les deux calques sont les mêmes, et chez la femme saine le calque est superposé à l'IRM anatomique cérébrale d'un autre individu (le sujet 13231). Normalement, il ne faut jamais superposer un calque sur une autre IRM anatomique que celle du sujet sur lequel il a été réalisé, parce que les volumes cérébraux étant différents les pixels colorés du calque ne se superposent pas aux mêmes aires sur deux volumes cérébraux différents. Mais, il se trouve que les volumes cérébraux du sujet 13241 et du sujet 13231 sont très similaires car ils ne correspondent pas à deux personnes différentes mais à des volumes types sur lesquels se trouvent superposés les résultats d'enregistrements fonctionnels obtenus chez plusieurs individus.

Document 2 : qu’est-ce que l’orgasme ?

La stimulation des organes sexuels, aussi bien chez l’homme que chez la femme, procure une sensation de plaisir. On définit souvent l’orgasme comme le « pic du plaisir ». En réalité, cette définition ne veut rien dire car s’il est facile de savoir qu’on est parvenu au sommet d’une montagne, comment savoir que l’on est arrivé au sommet du plaisir ?

L’orgasme correspond en réalité à des phénomènes physiologiques très précis :

  • chez l’homme des messages nerveux provenant de la moelle épinière provoquent la contraction involontaire de muscles du pelvis et du périnée ce qui entraîne l’éjaculation
  • chez la femme des messages nerveux provenant de la moelle épinière provoquent une série de contractions involontaires et saccadées des muscles du vagin et du périnée
  • chez l’homme comme chez la femme, l’orgasme s’accompagne d’une sensation de plaisir intense, puis d’une sensation de bien-être et de détente

Contrairement à ce que l’on peut parfois lire dans les médias il n’existe pas différents types d’orgasmes (vaginal ou clitoridien). En revanche, l’intensité, la durée et le ressenti d’un orgasme varie d’une personne à l’autre, et, chez une même personne, le ressenti de l’orgasme peut varier suivant le contexte* et le type de stimulation.

* Par contexte il faut comprendre l’aspect psychologique : désir, excitation, fatigue, peur, stress, colère, et d’une manière générale toutes les pensées et les états d’esprits, lesquels sont susceptibles de moduler le désir, l’excitation et l’effet des stimulations sexuelles.

Document 3 : extraits de l’article intitulé Les femmes, leurs désirs, leur plaisir et leur orgasme, Noémie Renard, docteur en biologie

Une enquête de 2005 (…) portant sur près de 28 000 personnes du monde entier, âgées de 20 à 80 ans, indiquent que les femmes rencontrent plus de difficultés dans leur sexualité. Elles sont plus fréquemment incapables d’atteindre l’orgasme ou d’avoir du plaisir pendant les rapports sexuels (…) En France 24% des femmes contre 12% des hommes ont au moins occasionnellement des difficultés à avoir un orgasme (…) Les femmes rencontrent également plus de douleurs que les hommes lors des rapports sexuels (12% contre 4%) (…) Et les femmes françaises sont les plus mal loties en termes de plaisir sexuel : presque la moitié des Françaises (49%) ont du mal à atteindre l’orgasme contre 28% des Néerlandaises. Elles ne sont que 52% à avoir eu un orgasme « souvent » avec un partenaire au cours de leur vie (contre 69% des Italiennes et Néerlandaises). Ce sont aussi elles qui simulent le plus (31% simulent régulièrement) contre 18% des femmes néerlandaises. Comme expliquer que les femmes ont elles si peu de plaisir ? Peut-être parce que la pénétration vaginale reste la norme. Elle est souvent considérée comme la seule véritable pratique sexuelle (…) Un sondage IFOP récent indique que 83% des femmes pratiqueraient souvent la pénétration vaginale sans caresse clitoridienne de la part du ou de la partenaire. A côté de ça, les pratiques qui stimulent directement le clitoris (caresse, cunnilingus) ne sont souvent considérées que comme des préliminaires au « véritable » rapport sexuel (la pénétration), et non comme de la sexualité en tant que telle. Or la pénétration vaginale a peu de chances de provoquer un orgasme chez les femmes, surtout en l’absence de stimulations clitoridiennes. Shere Hite a publié en 1976 une enquête sur la sexualité des femmes qui fit scandale car elle remettait en cause les visions classiques. Cette enquête démontra que seulement une minorité de femmes (30%) pouvait avoir régulièrement un orgasme par la pénétration vaginale, auxquelles on peut rajouter 19% qui ont des orgasmes pendant la pénétration à condition qu’il y ait une stimulation manuelle du clitoris. Ces chiffres sont à comparer avec les 95% des femmes qui arrivent à avoir au moins régulièrement des orgasmes durant la masturbation, généralement effectuée via une stimulation directe du clitoris. La chercheuse Elisabeth Lloyd (…) estime qu’il y aurait globalement 25% des femmes qui auraient toujours ou presque un orgasme par la pénétration, et une petite majorité (50-60%) qui aurait un orgasme au moins une fois sur deux. Environ un tiers des femmes auraient rarement ou jamais des orgasmes par le coït.

RÉSULTATS ATTENDUS

IRM fonctionnelle de madame W

 

IRM fonctionnelle de la femme saine

La comparaison des deux IRM fonctionnelles amène les élèves à exclure l'hypothèse selon laquelle l'absence d'orgasme de madame W aurait une cause cérébrale. Néanmoins, quelques élèves font remarquer que l'activité cérébrale comparée ne correspond pas celle associée à un orgasme mais uniquement à l'activité cérébrale qui accompagne un plaisir sexuel de "moindre intensité". Il reste donc possible que ce type d'activité ne soit pas altéré chez madame W, mais qu'un disfonctionnement cérébral non identifié inhibe chez elle la survenue de l'orgasme.  

La lecture du document 2 conduit les élèves à formuler l'hypothèse d'une origine psycho-affective : madame W serait peut-être stressée, fatiguée, ou tout simplement moins attirée/excitée par son compagnon.

Enfin, le document 3 suggère que le trouble dont souffre madame W pourrait également avoir pour cause des pratiques sexuelles n'induisant pas une stimulation suffisante du clitoris. Evidemment, cet article a été sélectionné afin de souligner le rôle de cet organe dans le plaisir sexuel et dans la survenue de l'orgasme féminin. Cela donne l'occasion de montrer que l'anatomie du clitoris et du pénis étant similaires, on sait que les stimulations des terminaisons nerveuses contenues dans le gland de ces deux structures peuvent déclencher un orgasme (sans rentrer dans le détail des processus médullaires et cérébraux qui sous-tendent ce phénomène).  

Volontairement, les ressources proposées ne permettent pas de trancher entre ces différentes hypothèses, ce qui frustre beaucoup les élèves, mais favorise de fécondes discussions sur un sujet d'un abord difficile.

 

POUR ALLER PLUS LOIN

 

  • On trouvera à la page suivante des informations complémentaires sur les images de la banque ANAPEDA portant sur le système de récompense.

 

  • Odile Fillod, Des connaissances biologiques sur la sexe et la sexualité au service de l'égalité, verbatim de la présentation faite le 19 octobre 2017 à Université des femmes, Bruxelles

 

  • Nan Wise, Eleni Frangos et Barry Komisaruk, Brain Activity Unique to Orgasm in Women : An fMRI Analysis, in The Journal of sexual medicine, 2017

 

  • Barry Komisaruk et Beverly Whipple, Functional MRI of the Brain During Orgasm in Women, in Annual review of sex research, 2005

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